Pour le premier actionnaire d'Euronav, la fusion avec Frontline est désormais irréalisable

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Suite logique après avoir acquis suffisamment de droits de vote, Alexandre Saverys, PDG de la Compagnie maritime belge, principal actionnaire de l’armateur de pétroliers Euronav, enclenche la seconde étape. Dans un courrier adressé au conseil d’administration, il demande l'abandon du projet de fusion avec l’autre grand acteur du secteur, Frontline. La direction d’Euronav maintient le calendrier de l’OPA, avancée au premier trimestre. 

Énième épisode dans cette bataille d’influence particulièrement rythmée entre les principaux actionnaires de deux grands armateurs de pétrole. Alexandre Saverys, PDG de la Compagnie maritime belge, qui s’est affairé depuis des mois à monter au capital de l’armateur belge de navires pétroliers Euronav, met à exécution son plan, ayant l’ascendant nécessaire pour bloquer le processus de fusion avec la Norvégienne Frontline.

Quelques jours à peine après avoir acquis en deux temps suffisamment de titres pour mettre la main sur 25 % du capital d’Euronav, via la Compagnie Maritime Belge (CMB), la famille anversoise, à l’origine de la création de l’armateur, a adressé un courrier au conseil d’administration pour exposer la façon dont elle voit la suite de l’histoire.

« Comme nous contrôlons plus de 25 % des droits de vote et que nous nous opposons à la fusion, celle-ci est devenue irréalisable », fait valoir le dirigeant, alors que la fusion nécessite en effet le soutien de plus de 75 % des parties prenantes d'Euronav en vertu de la loi belge sur les valeurs mobilières régissant la transaction.

Depuis la présentation du projet, qu’il n’était pas parvenu à empêcher lors de l’assemblée générale annuelle d’Euronav du 19 mai et qui avait été scellé par un accord définitif en juilletAlexandre Saverys fait connaître par tous les canaux son désaccord. Il ne partage pas la même vision, souhaitant inscrire l’histoire d’Euronav dans des projets verts en phase avec sa filiale CMB Tech qui développe des navires basés sur une nouvelle génération de carburants non fossiles.

Euronav doit jouer un rôle de premier plan dans la décarbonation » Alexandre Saverys (CMB)

Concurrence fratricide

« Cette stratégie devrait être basée sur la diversification de la flotte d'Euronav et sur un rôle de premier plan dans la décarbonation de l'industrie maritime », est-il écrit. Le dirigeant, issu d’une famille d’armateurs, craint que la fusion provoque une concurrence fratricide sur un plan commercial qui vont se disputer « les mêmes clients et les mêmes opportunités d'affaires », des « conflits d'intérêts sur les décisions commerciales et d’investissement » et redoute « des problèmes de gouvernance complexes ». Il en résulterait deux « sociétés concurrentes distinctes dirigées par le même conseil d'administration et le même PDG, mais avec des listes distinctes et des actionnaires minoritaires ».

Valeur pas garantie

En termes de valeur, alors qu’il est prévu que la transaction prenne la forme d’un échange d’actions sur le plan capitalistique, le PDG de la CMB n’est pas du tout convaincu de la « prime de rachat élevée » pour Euronav.

Le plan prévoit que Frontline propose aux actionnaires de son ex-rivale de convertir leurs avoirs en actions Frontline, nom de la nouvelle entité, selon un rapport d'échange de 1 pour 1,45. Afin de mener à bien l'offre d'échange, il faudra accumuler un minimum de 50 % plus une action du capital actuel en circulation.

Depuis que l’homme d’affaires John Fredriksen (également actionnaire de Frontline et d’International Seaways) s’est imposé au conseil d’administration d’Euronav en 2021les deux principaux actionnaires s’affrontent à coups de droits de vote. Ce dernier, étrangement silencieux, était encore détenteur de 18,8 % des titres, jusqu’à ces derniers jours quand les sociétés gérant ses participations ont cédé un peu plus de 2 millions d'actions, ce qui a fait redescendre la participation à 17,8 %. Á la surprise générale...

Maintien du calendrier

En anticipation, Frontline planche sur une solution de repli qui consiste en une filialisation d’Euronav à la bourse de New York. « C’est à notre avis irréalisable et destructeur de valeur pour toutes les parties concernées », réagit Alexander Saverys dans le courrier. 

Hugo de Stoop, a la tête d’Euronav et appelé à prendre la tête du futur ensemble, a réagi le 15 décembre dans un communiqué, rappelant que l'offre d'échange, selon laquelle Frontline devienne la société mère et Euronav une filiale contrôlée majoritairement, est indépendante de toute fusion.

« Les actionnaires d'Euronav qui ne participent pas à l'offre d'échange doivent être conscients, bien que la société se conforme à toutes les règles applicables aux sociétés belges cotées en bourse, qu’ils s’exposent à un risque de liquidité réduite et à la demande des investisseurs, en raison du statut contrôlé et de son flottant limité », a-t-il souligné.

OPA lancée au premier trimestre 2023

La date du vote des actionnaires sur la domiciliation de la société issue de la fusion (à Chypre), prérequis au lancement de l'offre publique d'achat, laquelle a été avancée au premier trimestre 2023, avait été fixée au 20 décembre.

« Frontline a l'intention de lancer officiellement l'offre publique d'achat. Elle déposera un dossier à cette fin auprès de l'Autorité belge des services et marchés financiers [FSMA]. Le conseil de surveillance d'Euronav examinera alors le projet et présentera son avis détaillé dans un mémorandum. Si Frontline décide de ne pas donner suite à l'offre publique d'achat, elle en rendra compte conformément à ses obligations légales », tranche le patron d’Euronav.

L’opération doit donner naissance à une société dont la flotte sera composée de 69 très gros transporteurs de brut (VLCC), de 57 suezmax et 20 LR2/aframax.  

Adeline Descamps

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