L'UE, le G7 et l'Australie plafonnent le baril de pétrole russe à 60 $

Les 27 pays de l'Union européenne, le G7 et l'Australie ont fixé le 3 décembre le prix du plafond auquel sera soumis le brut russe transporté par voie maritime. Avec ce mécanisme, les transporteurs maritimes et les compagnies d'assurance et de réassurance ne pourront prendre en charge le pétrole russe que si son prix n'excède pas 60 $ par baril. Un niveau proche de celui auquel le touchent déjà l’Inde et la Chine tandis qu’un marché de transport illégal s’organise.

Ils se sont finalement mis d'accord à quelques heures de l’entrée en vigueur de la sanction européenne visant, elle, les importations maritimes de pétrole ce 5 décembre, dont il est un complément. Les 27 pays de l'Union européenne, ainsi que ceux du G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni) et l'Australie, ont trouvé, le 2 décembre, un terrain d'entente sur le plafonnement à 60 $ par baril du prix du pétrole russe vendu à des États tiers.

Le difficile accouchement en rappelle un autre lorsque, après plusieurs semaines de négociations interminables, les dirigeants de l’UE ont convenu d’un embargo partiel sur les importations de pétrole brut par voie maritime. La Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque avaient ensuite obtenu des dérogations, étant trop dépendantes de leurs importations par oléoducs.

Le transport maritime de pétrole ne craint ni l'embargo européen ni le plafonnement du G7

Conflit d’intérêts

L'accord restait suspendu à la décision de la Pologne, qui a donné son feu vert le vendredi 2 décembre dans la soirée. Varsovie et les Pays Baltes (Estonie et Lituanie) militaient pour un plafond très inférieur à 60 $ (autour de 30 $), estimant qu'à ce niveau, il n'avait quasiment aucun effet sur le marché en dehors d'une portée symbolique et politique. Les représentants de ces pays souhaitaient par ailleurs que sa mise en œuvre soit liée à la promesse d’élaboration du neuvième paquet de sanctions contre Moscou.

Certains États membres, y compris ceux dont les industries maritimes sont importantes comme la Grèce, Malte et Chypre, plutôt sceptiques sur le principe, voulaient pour leur part s’assurer que le prix soit suffisamment élevé pour assurer la continuité du commerce du pétrole russe. La France, l’Allemagne et quelques autres pays estimaient pour leur part que les pays méditerranéens avaient fait beaucoup de compromis, et qu’il revenait désormais aux plus critiques (dont la Pologne) de faire un pas.

Pétroliers sous embargo : une véritable odyssée pour dissimuler

Prix déjà décoté

Selon le mécanisme envisagé, les transporteurs maritimes et les compagnies d'assurance et de réassurance ne pourront plus prendre en charge les cargaisons de brut russe que si son prix n'excède pas 60 $ par baril. Les pays du G7 fournissent les prestations d'assurance pour 90 % des cargaisons mondiales.

Avec cette mesure, le bloc occidental espère limiter les recettes tirées par Moscou de ses livraisons à des pays comme la Chine (qui a sérieusement réduit ses achats en raison du ralentissement économique manifeste) ou l'Inde – les deux plus gros acheteurs actuels de brut de l’Oural –, alors qu’ils le paient déjà à prix décoté (entre 20 et 25 $ de moins) si bien qu’avec un pétrole à 80 ou 85 $, ils le touchent déjà en deçà ou proche des 60 $. Le cours du pétrole russe (brut de l'Oural) évoluait ces derniers jours autour 66 $ le baril, soit à peine plus que le plafond européen, d'où un effet attendu très limité dans l'immédiat.

 

Doutes et fébrilité sur le plafonnement du pétrole russe

67 Md€ tirés des ventes de pétrole

La Russie a tiré 67 Md€ de ses ventes de pétrole à l'UE depuis le début de la guerre en Ukraine, estime l'Institut Jacques-Delors. Les exportations de pétrole et de gaz de la Russie devraient représenter 42 % des revenus du pays cette année, soit 11,7 milliards de roubles, contre 36 % ou 9,1 milliards en 2021, selon le ministère des Finances russe.

Le prix doit en tout cas rester supérieur aux prix de production, pour inciter la Russie à continuer à vendre, et ne pas couper les vannes. Mais le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déjà prévenu que la Russie ne livrerait plus de pétrole aux pays qui adopteraient ce plafonnement comme il l’a fait pour le gaz, qui n’était pourtant pas banni.

Les alliés occidentaux de l'Ukraine envisagent de leur côté de refuser d'assurer les pétroliers (soit 90 % de la flotte mondiale) qui livreront du pétrole russe aux pays qui ne respectent pas le plafond de prix. Il sera donc difficile pour la Russie de vendre du pétrole au-dessus de ce prix.

Une flotte fantôme prospère à l'ombre des sanctions russes

Réactions des pays de l’Opep

La réaction des pays producteurs de pétrole, qui veillent à l’équilibre des marchés et qui ont été jusqu’à présent un soutien indirect de la Russie, est guettée. Les membres de l’Opep devaient se réunir le 4 novembre à Vienne. Il est fort probable qu’ils maintiennent leurs objectifs de production, toujours en jauge basse depuis 2020, pour maintenir les prix.

Le prix du Brent à l'échéance du contrat à terme LCOc1 est passé de 87,30 à 86,54 $ suite à l’annonce. Á l’approche de l’entrée en vigueur des sanctions internationales frappant le brut russe, un marché s’organise dans l’ombre pour transporter le pétrole sous embargo. Le courtier maritime français BRS estime à un millier d’unités la flotte prête à opérer illégalement.

Adeline Descamps

 

 

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