Maersk réalise à nouveau un trimestre exceptionnel et relève ses prévisions pour 2022

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Le groupe A.P. Møller - Maersk a présenté le 3 août ses résultats financiers pour le deuxième trimestre. L’armateur danois de porte-conteneurs a encore enregistré des résultats exceptionnels dans un contexte où les taux de fret spot se sont pourtant inclinés mais il capitalise sur sa politique commerciale privilégiant les contrats long terme, dont les taux ont continué d’augmenter. Pour la troisième fois, le groupe revoit à la hausse son bénéfice pour l’année, désormais attendu à 37 Md$. 

L’arithmétique est assez simple pour Maersk. Sur l’ensemble de ses indicateurs financiers – chiffre d’affaires, bénéfices avant impôts, amortissements et intérêts (Ebitda), résultat d’exploitation avant éléments financiers (Ebit)... – le deuxième armateur mondial de porte-conteneurs, opérateur de terminaux et prestataire de services portuaires et logistiques, a doublé la mise au cours du second trimestre par rapport à la même période de l’an dernier.

A.P. Møller - Mærsk a même enregistré une performance financière largement supérieure à ses précédentes prévisions, avec un chiffre d'affaires de 21,7 Md$ (14,32 Md$ au deuxième trimestre 2021), un Ebitda de 10,3 Md$ (vs 5,06 Md$ il y a un an) et un Ebit de 8,9 Md$ (4,08 Md$). La division Ocean, qui correspond à l’activité maritime, demeure le navire-mère en contribuant à hauteur de 17,4 Md$ à l’ensemble. Ses recettes ont augmenté de 6,3 Md$. les volumes n’y sont pour rien. 

En baisse de 7,4 %, à 3,09 MEVP, ils témoignent « de la faiblesse des marchés et des perturbations de la supply chain », indique le rapport financier. Les volumes sur la ligne Est-Ouest ont diminué principalement sur la route Asie-Europe et sur les trajets de retour et de façon unilatérale sur la ligne Nord-Sud. Les flux intra-régionaux sont sanctionnés par le transport intra-européen, à la peine. 

Les taux fret restent le principal moteur de la dynamique, aidés par une congestion portuaire mondiale persistante. Le spot a baissé par rapport à son pic mais reste supérieur aux tarifs pratiqués il y a un an, tandis que les prix négociés dans le cadre des contrats à long terme – majoritaires chez Maersk –, ont pris le relais. Les taux de fret au départ de la Chine, mesurés par l'indice composite du fret chinois (CCFI), étaient ainsi 46 % plus élevés qu’au deuxième trimestre 2021.

« Ce résultat est dû à des taux contractuels élevés dans le maritime, à une croissance rapide et rentable dans le la logistique et à la poursuite de solides performances dans les terminaux, résume Søren Skou, PDG du groupe, dans un communiqué. Les volumes dans le transport maritime ont été plus faibles en raison de la poursuite de la congestion et de la guerre en Ukraine qui a pesé sur la confiance des consommateurs, en particulier en Europe. Cependant, dans la logistique, nous avons enregistré une croissance des volumes supérieure à celle du marché, nos clients du secteur maritime continuant à adhérer à notre proposition de valeur, ce qui s'est traduit par une croissance organique du chiffre d'affaires de 36 %, soit le sixième trimestre consécutif de croissance organique supérieure à 30 % ».

Activités maritimes au plus haut

Dans le détail pour ce qui est des opérations maritimes (Ocean), les taux de fret moyens, qui ont augmenté de 64 % (4 983 $ pour un conteneurs de 40 EVP) sur les routes d'Asie vers l'Europe et l'Amérique du Nord, ont largement compensé la baisse des volumes de 7,4 %. La capacité moyenne exploitée de Maersk (4,3 MEVP) a pourtant augmenté de 4,1 %. La chute des trafics est principalement observée sur la route Asie-Europe et sur les trajets de retour pour ce qui est de la ligne Est-Ouest et sur l’intra-régional européen.

Les prix élevés ont aussi couvert la poussée des coûts d'exploitation de 18 % (7,8 Md$), en raison de la hausse des soutes (+ 69 %, 2,2 Md$ avec un combustible au prix moyen de 827 $/t), du réseau (+ 1,5 %, coûts d'affrètement des slots notamment) et de la manutention portuaire (+ 6,4 %, en cause, le transport de conteneurs vides).

Normalisation progressive des taux de fret

Le numéro deux mondial de la ligne régulière, qui a fait le forcing ces derniers mois sur les accords de long terme avec ses clients – 72 % sous contrats avec plus de 1,9 MEVP –, s’attend à une normalisation progressive des taux de fret au quatrième trimestre après près de deux ans de fortes augmentations. L’armateur danois a évolué sur ce point car il prévoyait initialement un atterrissage au deuxième trimestre.

Les taux de fret pourraient avoir déjà atteint un sommet, estiment pour leur part les analystes du secteur. La conjoncture économique a basculé au cours du deuxième trimestre. Les volumes mondiaux de conteneurs transportés ont diminué de 2,3 % après une baisse de 1,7 % au premier trimestre sur une base annuelle. Ils se situent désormais au niveau de 2019. Dans le même temps, le débit portuaire mondial a augmenté de 2,8 % (Drewry) et les volumes mondiaux de fret aérien (CTK) ont diminué de 9,4 % en avril/mai.

Conjoncture négative

Alors que dans la zone euro, la consommation européenne est freinée par une inflation élevée et l'impact de la guerre en Ukraine, la demande résiste encore aux États-Unis après deux années de hausse spectaculaire, à l’origine du boom du transport maritime de conteneurs. Les importations nord-américaines conteneurisées en provenance d’Asie n’ont que très faiblement diminué (de 1 %) entre avril et juin. Elles ont en revanche dévissé de 5,2 % en Europe. En outre, les confinements, qui ont largement occupé le printemps en Chine, ont limité les exportations de conteneurs.

Dans ce contexte, selon Maersk, la demande mondiale de conteneurs devrait se situer dans la partie inférieure de la fourchette prévue, entre -1 % et +1 %.

Logistique en hausse de 61 %

Le chiffre d’affaires des activités relevant du département Logistics & Services a augmenté de 1,3 Md$ pour atteindre 3,5 Md$ (+ 61 %), principalement en raison des récentes acquisitions rapportés dans les états financiers (B2C Europe, Visible Supply Chain Management, Pilot Freight Services et Senator International) et de l’offre de fret aérien accrue via Maersk Air Cargo. 

Le groupe, qui aspire à devenir un « intégrateur de la logistique des conteneurs », devrait avoir en outre finalisé la reprise de LF Logistics au troisième trimestre tandis que la création d'une coentreprise avec Grindrod Intermodal, dans laquelle A.P. Møller - Maersk détiendrait 51 % des parts, sera ficelée en fin d’année.

La croissance des recettes est en revanche plus modeste dans les opérations de manutention de ses terminaux, n’ayant augmenté que de 155 M$, à 1,1 Md$. 

Prévisions annuelles relevées pour la troisième fois 

La veille de la publication de ses résultats, le groupe danois avait relevé, pour la troisième fois consécutive cette année (comme Hapag-Lloyd, son concurrent allemand), ses prévisions pour l'ensemble de l'année : l'Ebitda est désormais attendu à environ 37 Md$ (contre environ 30 Md$ auparavant) et l'Ebit à environ 31 Md$ alors qu’il était initialement envisagé à 24 Md$.

Si le marché se rétracte drastiquement comme semblent l’indiquer les indicateurs de conjoncture, devenus négatifs au deuxième trimestre, l’entreprise pourra puiser dans ses liquidités particulièrement abondantes, à 24 Md$ (elle misait sur 19 Md$). Le groupe ne prévoit pas pour autant d’investir davantage cette année, à savoir 7 Md$. Un niveau d’investissement qui n’est pas sans lien avec la rémunération des actionnaires : 553 M$ au deuxième trimestre. 

« Superprofits »

Nul doute que la presse généraliste qui a découvert le secteur du transport maritime conteneurisé depuis que les compagnies gagnent de l’argent va scruter la ligne « tax » sur le bilan comptable. Aidons-la : le transporteur maritime s’est acquitté d’un impôt de 164 M$ sur le trimestre.

Le Danemark, qui le loge à Copenhague, fait partie des 130 pays favorables à un impôt minimum mondial sur les bénéfices des entreprises multinationales mais n’a pas prévu de taxer les bénéfices dits extraordinaires réalisés par certains grands groupes. Le pays ne s’est pas non plus, pour l’instant du moins, saisi du cadre établi par la Commission européenne qui prévoit entre autres la taxation temporaire des bénéfices exceptionnels pour contrer l'inflation. Il faut dire que le Danemark partage avec la France le plus haut niveau de prélèvements obligatoires au sein de l’Union européenne…

Adeline Descamps

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