Le constructeur naval chinois Shanghai Waigaoqiao Shipbuilding (SWS) a confirmé l’information relayée par plusieurs médias.
CMA CGM a bien passé commande de huit porte-conteneurs supplémentaires à double motorisation avec le méthanol. Ces derniers contrats portent à 32 sa future flotte propulsée avec la technologie la plus disponible à ce stade pour répondre à la problématique de la décarbonation.
Ce sont les premiers de 9 200 EVP dans le carnet de commandes méthanol de l'armateur français qui comprenait jusqu'à ce dernier engagement douze unités de 15 000 EVP (confiés à deux sites du constructeur chinois CSSC, Jiangnan et Dalian), et douze de 13 000 EVP auprès de Hyundai Samho. Et ce sont aussi les premiers pour SWS, filiale du puissant groupe de construction navale chinois (CSSC, China State Shipbuilding Corp.).
Avec une capacité de 409 600, CMA CGM distance Maersk de quelque 100 000 EVP et huit navires.
Au coude à coude dans le tonnage vert
Longtemps opposés dans leur approche du verdissement, Les numéros deux et trois mondiaux de la ligne régulière conteneurisée ont annoncé, il y a quelques jours, une collaboration en vue d'accélérer la transition écologique du secteur du transport maritime, y compris sur la production et l'avitaillement en méthanol.
Les dix-neuf premiers navires au méthanol, que Maersk mettra en service entre 2023 et 2025, nécessiteront environ 750 000 t du combustible. En juin, le Danois a porté sa commande à 25 unités, la nouvelle série de six unités de 9 000 EVP qui lui sera livrée entre 2025 et 2027.
6,28 % de carburants alternatifs soutés dans ses navires
« D’ici 2027, le groupe CMA CGM opérera une flotte de plus de 100 navires [sur 593 navires en 2022, NDLR] en mesure d’être propulsés à 65 % avec des solutions décarbonées, soit via le gaz déclinable en biométhane et méthane de synthèse ou avec le méthanol, a assuré Christine Cabau-Woehrel, précise la vice-président du groupe, en charge des actifs et des opérations, dans un entretien pour le JMM. Nous aurons à cet horizon 77 navires biométhane et e-méthane ready et avons actuellement 24 navires en commande qui pourront brûler du bio– ou e-méthanol dont les premiers seront livrés à partir de 2026 ».
Pour sécuriser l’approvisionnement de ses 100 futures unités bas carbone qui vont représenter 15 à 20 % de l’ensemble de ses consommations [6,28 % de carburants alternatifs soutés dans ses navires aujourd’hui], la société a acheté 50 000 t de biométhane. Elle s'est aussi associée à Titan, fournisseur de GNL et de gaz liquéfiés, pour produire entre 160 et 180 000 t de biométhane liquéfié d’ici 2026. Et a par ailleurs co-investi avec Engie dans une unité de production et de commercialisation de biométhane de deuxième génération [projet Salamandre] à destination de l’industrie du shipping. L’usine d’une capacité de 11 000 t par an à partir de 2027, installée au Havre, permettra de fabriquer du méthane de synthèse décarboné à 85 %.
À l'instar de plusieurs des navires au méthanol et au GNL de CMA CGM, cette nouvelle série sera dotée d'un grand pare-brise avant qui réduira la consommation de carburant en mer d'environ 2 %.
D'après la déclaration du constructeur à la Bourse de Shanghai, la commande est d'une valeur d'1 Md$, ce qui correspond à environ 125 M$ par unité, soit 10 M$ de plus que le prix payé par Maersk pour une série similaire passée auprès du chinois Yangzijiang Shipbuilding.
GNL en perte de vitesse par rapport au méthanol ?
Selon la dernière actualisation de la société de classification DNV, 43 contrats de construction ont été signés pour des navires avec une motorisation hybride avec le GNL au cours des trois derniers mois.
Le gaz naturel liquéfié rencontre un certain succès auprès des transporteurs de voitures et de conteneurs, avec respectivement 133 et 196 navires en commande. Mais il séduit de plus en plus les exploitants de pétroliers (83) et de vraquiers (39).
Auparavant, le méthanol était un choix exclusivement réservé aux navires-citernes utilisés pour son commerce, avec 23 unités en exploitation et 14 en construction.
Mais depuis le début d'année, il a opéré une véritable percée dans le segment des porte-conteneurs avec 142 navires en construction compatibles avec le méthanol comme carburant. Sur les seuls trois derniers mois, 60 contrats ont été signés. Un plébiscite.
6,5 % de la flotte en service et 51 % de celle en commande peuvent être alimentés par des carburants alternatifs contre 5,5 % et 33 % respectivement l'année dernière. C'est dire que 1 376 des 5 258 navires en construction pourront être motorisés avec des carburants moins fossiles.
La société de classification Lloyd’s Register prévoit que la demande moyenne du secteur maritime en méthanol vert devrait représenter 13,4 % de la consommation totale de combustibles de soute d'ici à 2050, le biométhanol, 8,6 % et l'e-méthanol, 4,8 %.
Adeline Descamps