« Non à la transition écologique punitive. Non, la décarbonation, la transition énergétique et la transition des trafics ne peuvent pas se traduire par de la casse sociale ». Cela fait plusieurs mois que les dockers et les portuaires du Golfe de Fos alertent sur le prix à payer en vertu de la décarbonation des activités industrielles et portuaires. « Des choix politiques » ont condamné des trafics structurants font-ils valoir, tandis que des trafics relais peinent à se concrétiser.
Les bassins Ouest du port de Marseille Fos seront à l’arrêt 24 heures le mardi 17 septembre pour faire à nouveau entendre leurs voix sur la situation, indique leur représentation professionnelle (CGT des ouvriers dockers et des personnels de la manutention portuaire du Golfe de Fos). Un rassemblement est prévu ce jour-là devant la préfecture de Marseille.
Le mouvement n'a rien d'opportuniste en cette rentrée sociale qui promet d'être bien chargée. Abandon du charbon à la centrale de Gardanne de GazelEnergie, où la biomasse se fait erratique, subordonné à un contrat avec l’État qui achoppe sur le tarif de l’électricité et la durée du contrat, et pas de nature à ce stade à pallier les 700 000 t du combustible condamné. Cessation de l’import de bauxite par l’industriel Alteo auquel l’alumine tarde à se substituer. Baisse de régime chez ArcelorMittal qui va fonctionner avec un seul de ses deux haut-fourneaux pour un certain temps pour ne pas dire un temps certain. Placement sous procédure de sauvegarde de Carfos Sea-Invest, l’exploitant du terminal minéralier… Les vracs solides (7 % du volume global manutentionnés) ont trinqué ces dernières années sur le port de Marseille.
Des mutations à effet collatéral
Dans un document intitulé « Après Marseille en grand, le Port de Fos en grand » (une version moqueuse du vaste plan à 15 Md€ « Marseille en grand », lancé par Emmanuel Macron en 2021 et censé transformer Marseille), les dockers et les personnels de la manutention portuaire du Golfe de Fos avaient porté plusieurs revendications en lien avec les mutations en cours. Un port, « cela fait d'abord de l'import/export », avaient-ils rappelé, estimant que l'établissement portuaire avait abandonné « la conquête des trafics et la stratégie des volumes ».
Les difficultés des uns et des autres ont fini par coûter cher aux trafics de vrac solides en général et aux opérateurs des terminaux en particulier. En 2023, ce fut même l’hécatombe à 8,7 Mt (- 24 %) alors que le port phocéen carburait plutôt autour d'une jauge entre 10 et 11 Mt. Avec 5,8 Mt échangés, les entrées de matières premières d’ArcelorMittal ont touché leur point bas (- 22 % par rapport à 2022, soit - 1,7 Mt), payant chèrement la mise à l’arrêt du haut fourneau n°1 dans un contexte de baisse structurelle et conjoncturelle (inflation) de la demande européenne d’acier.
Carfos, l'opérateur du terminal minéralier de Fos (TMF), un des deux (avec le multivrac de Caronte) que la filiale de la société belge Sea-Invest exploite avec ses propres moyens de manutention, a été placé en juin en procédure de sauvegarde par le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence. Les employés portuaires redoutent désormais sa liquidation.
En quelques années, l'entreprise a perdu le charbon pour la centrale GazelEnergie de Gardanne et le bauxite pour Alteo. Après avoir encaissé plusieurs exercices avec l'exploitation en perte, Carfos a accumulé plus de 10 M€ de dette pour un fonds de roulement de 2,5 M€ et un chiffre d’affaires de 26,2 M€.
Adeline Descamps
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