Le port de Marseille Fos confirme le rebond du conteneur au premier semestre 2024

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En dépit des perturbations sociales en mai et en juin, le Grand Port maritime de Marseille Fos a enregistré une hausse de 7 % de son trafic conteneurisé, profitant du report d'escales de transbordement d'autres ports méditerranéens. En revanche, tous trafics confondus, la stabilité a primé, masquant quelques petites échappées.

Il y a eu du mieux dans les ports français au cours du premier semestre à en juger par les bilans communiqués par deux des plus grandes infrastructures de l’Hexagone. Après Haropa, dont les données de trafic ont été publiées il y a quelques jours, le Grand Port maritime de Marseille Fos (GPMM) présente, aux compte-gouttes, les siennes dans un communiqué épuré.

Bien que les grands ports nationaux aient enregistré durant les trois mois de l’année leur quatrième exercice trimestriel stagnant, des signes d’embellie étaient alors déjà notables. Entre le premier trimestre 2023 et 2024, les volumes (71,5 Mt) ayant transité par les grands ports maritimes étaient en hausse de 6,9 %. Certes, les importations (45 Mt, + 2,5 %) étaient toujours tirées vers le bas par la sidérurgie française. Mais les exports (26 Mt) avaient été, durant cette période, dynamiques (+ 12,3 %), portés par les vracs solides (+ 49,2 %) ainsi que par les conteneurs (+ 12,7 % en EVP). Le premier trimestre avait principalement réussi au trafic conteneurisé, donnant à Haropa un coup de fouet (en hausse de près de 10 % sur un an à fin mars) et du peps à Marseille Fos (+ 6,3 %).

Tonus du conteneur

Le second trimestre confirme le tir, en dépit des perturbations sociales en mai et en juin – arrêts de travail de quatre heures, suppression des shifts exceptionnels et des heures supplémentaires pendant dix jours, grèves de 24 h pendant quatre jours –, à l’appel de la CGT Ports et Docks et en lien avec des revendications portées dans le cadre de la réforme des retraites promulguée le 14 avril 2023.

Il y a un an, à la même époque, Haropa comme Marseille avaient été sanctionnés par une chute de 15 % du trafic conteneurisé en unités EVP. Le rebond a été particulièrement vif au premier semestre pour le port de l’axe Seine (+ 17 %, 1,46 MEVP). Dans le même temps, Marseille Fos, dont le trafic conteneurisé avait glissé sous le seuil des 700 000 EVP au premier semestre 2023, est repassé au-dessus de la barre avec 719 000 conteneurs grâce à une progression de 7 % en glissement annuel. Mais le port méditerranéen reste loin des 800 000 EVP enregistrés sur les six premiers mois de 2022 (1,53 MEVP cette année-là).

« Il a fallu attendre le mois de mai pour observer une accélération. En juin, les conteneurs en entrée de ce port ont augmenté de 17 % sur un an », indique TLF Overseas dans sa note de conjoncture publiée en juillet. L’organisation représentant les intérêts des entreprises du transport et de la logistique nuance le rebond, y voyant « le contrecoup des grèves de l’an dernier ».

Effet transbordement

« Cette hausse s'explique par plusieurs facteurs, notamment l'arrivée de nouvelles escales pour le transbordement qui étaient jusqu’alors effectuées à Tanger Med et Algésiras », explique de son côté la direction du port dans le communiqué.

La crise en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, où les houthis font pleuvoir les drones et les missiles sur les navires en soutien au Hamas Palestinien dans sa guerre contre Israël, a dissuadé les exploitants de navires de transiter par leur itinéraire traditionnel, via le canal de Suez. Contraint d’emprunter pour rallier l’Asie depuis l’Europe la route historique par la pointe de l’Afrique, qui allonge considérablement les distances, les armateurs ont revu leurs services.

Pour respecter leur transit-time, certains ont annulé les escales les moins rentables et procédé à un « regroupement de navires » dans certains ports de transbordement. La situation a provoqué des goulets d’étranglement dans les grands hubs clés notamment en Asie du Sud-Est (Shanghai, Qingdao, Guangzhou, Singapour, Port Kelang, Tanjung Pelepas…) et en Méditerranée (Tanger Med, Barcelone et Algésiras). Marseille a dû profiter de l’encombrement de ces derniers.

Tous trafics stables

Tous trafics confondus, le port phocéen affiche la stabilité à la baisse avec 34,8 Mt (35 Mt manutentionnées au premier semestre 2023). Les marchandises diverses sont aussi repassées au-dessous de la barre des 10 Mt (+ 14 %), gagnant 1 Mt mais pas suffisamment pour retrouver son étiage du premier semestre 2022 (11 Mt).

Le communiqué ne mentionne pas, dans le bilan de ses vracs solides, l’état de la sidérurgie française qui tourne au ralenti depuis 2022 face à une demande européenne d’acier en berne. En juillet, ArcelorMittal, a annoncé qu’il allait fonctionner avec un seul de ses deux hauts-fourneaux pendant un certain temps en raison de la « baisse de la consommation en Europe, combinée à la hausse des importations d'acier et à des coûts de production non compétitifs ». L’an dernier, déjà, seuls 4,5 Mt avaient été manutentionnés à la même époque, soit une diminution de 23 % par rapport au premier semestre 2022.

Engagé dans sa transition énergétique, le sidérurgiste européen s'appuie sur le démarrage du four poche (qui permet d'utiliser plus d'acier recyclé) dont il attend les premiers résultats tangibles dès 2025, avant de poursuivre les études relatives au projet de four à arc électrique à horizon 2030. Non sans impact pour les tonnages du port.

La direction de l'établissement portuaire préfère, elle, mettre en valeur le trafic des vracs agro-alimentaires, en hausse de 26 %, passant de 151 000 à 190 000 t, portés par une « demande soutenue de la part des pays méditerranéens ». En règle générale, en France, les céréales comptent pour les trois quarts des flux sortants de la catégorie des vracs solides.

Dynamique des produits raffinés

Après avoir progressé de 2 % au premier semestre 2023, les vracs liquides affichent un volume stable de 21,6 Mt. Les importations de produits raffinés, notamment le gasoil, ont augmenté de 10 %, confirmant leur solidité (+ 19 % l’an dernier à la même époque), Mais avec 5,5 Mt, elles ne permettent pas de compenser la baisse des flux de brut de 5 %, à 9,8 Mt.

De même, les services du port restent discrets sur le trafic de GNL, qui était en baisse à l’issue des six premiers mois de l’an dernier (- 5 %) après avoir battu un record historique en 2022 (+ 24 % au premier semestre avec 8,5 Mt), année de grand chambardement du fait de l’arrêt des importations de gaz par pipeline en provenance de Russie.

Les remorques se rangent parmi les filières en légère progression (+ 2 %), passant de 109 000 à 111 000 unités, « dont une augmentation de 5 % du fret corse, signe d’une demande plus forte des acteurs de la grande distribution », souligne le communiqué.

L'activité passagers progresse à nouveau, de 2 %, à 1,57 million de voyageurs, pour la deuxième année consécutive. Tout en étant loin de sa jauge (1,5 million de croisiéristes) lorsque la jeune industrie a été sapée par le Covid, le secteur des croisières (1,06 million) voit le nombre de passagers en tête de ligne augmenter de 6 %.

Sous la pression sociétale, l’acceptabilité de la croisière étant de plus en plus contestée, l'établissement portuaire a accéléré ses investissements pour permettre le branchement à quai, désormais opérationnel pour les ferries de/vers la Corse et le Maghreb. Aussi, le nombre d’escales au GNL a augmenté de 18 %, passant de 108 à 128, fait-il valoir.

Adeline Descamps

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