700 000 $ de frais de détention et surestaries remboursés aux chargeurs américains

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La nouvelle législation américaine, plus favorable aux chargeurs en inversant la charge de la preuve et en facilitant les démarches devant les juridictions pour abus, a engendré le dépôt de quelque 200 plaintes, indique la FMC, l’autorité de régulation du transport maritime. Plus de 70 d’entre elles ont été transmises aux enquêteurs.

La réforme de la loi sur le transport maritime (OSRA) votée en juin 2022, qui se veut une réponse aux pratiques commerciales jugées abusives des principales compagnies maritimes qui opèrent sur le marché américain mais dont aucune ne hisse la bannière étoilée, est un franc succès. La Federal maritime commission (FMC), qui s’est réunie le 25 janvier, a fait état de plus 200 plaintes déposées par les chargeurs, dont 70 vont faire l’objet d’une enquête.

Le régulateur américain, qui a hérité de pouvoirs renforcés pour accentuer les contrôles sur les situations de monopole, a souligné à cette occasion que « le processus de plainte pour frais abusifs s'avère efficace pour promouvoir les règlements informels et régler les conflits sur les frais de surestaries et de détention ». La Commission estime à 700 000 $ le total dû par les transporteurs aux chargeurs depuis juin.

Des tensions épiques outre-Atlantique entre chargeurs et transporteurs

Les tensions entre les chargeurs américains et les compagnies de la ligne régulière à propos notamment des frais de détention et de surestaries auront animé les deux ans de pandémie. La FMC a été régulièrement saisie des plaintes des clients des transporteurs, qui n’ont eu de cesse d’accuser ces derniers de supprimer délibérément des traversées pour faire monter les taux de fret spot et de privilégier le repositionnement des boîtes vides au détriment des conteneurs pleins à l’export au nom d’intérêts lucratifs.

Par exemple, pour pallier la carence d’équipements au plus fort de la crise, la compagnie allemande Hapag-Lloyd avait décidé de suspendre le transport par conteneurs de produits agricoles en provenance d'Amérique du Nord, ou plus précisément de se limiter aux marchandises accessibles (près des ports de sortie) et non de l’hinterland (qui aurait fait perdre du temps). Ce qui avait provoqué la colère de la Specialty Soya and Grains Alliance (SSGA). But de la manœuvre selon ceux qui accusent : accélérer les cadences des trafics transpacifiques pour profiter à plein de tarifs de transport en ébullition.

Les compagnies maritimes ont été entendues à plusieurs reprises par les autorités de contrôle à ce sujet et ont fait l’objet d’enquêtes. L’une d’entre elles, menée par la FMC, les a disculpés de l’accusation grave de collusion commerciale. 

Affaire MSC / MCS Industries

L’une des affaires les plus emblématiques de cette période reste le différend commercial, depuis août 2021, entre MSC et MCS industries, un importateur américain de meubles. Le leader mondial dans le transport maritime de conteneurs, dont la part a explosé sur les trafics États-Unis-Asie et États-Unis-Europe au cours des deux dernières années, entend faire appel de la décision arrêtée le 13 janvier par un tribunal administratif qui la condamne à des dommages et intérêts de près d’1 M$ dans le cadre d'une des plaintes déposées auprès de la FMC par l’entreprise de Pennsylvanie. Le juge a déclaré dans son avis que l’armateur n'avait pas produit les documents et les communications justifiant l’annulation des services. 

« Par ses termes, la décision ne traite pas du bien-fondé de l'une ou l'autre des accusations portées contre MSC et nous continuons de croire que les réclamations sont sans fondement, a affirmé le transporteur dans sa déclaration. MCS Industries cherche à tenir MSC responsable de ne pas avoir transporté des marchandises que l’entreprise ne lui a jamais demandé de transporter »

Dans sa plainte initiale contre MSC et Cosco, le chargeur avait accusé les compagnies d’entente commerciale en vue de restreindre artificiellement la capacité en supprimant des traversées sous prétexte de la congestion des ports notamment, le but de l’opération étant, selon le fabricant, de faire monter les prix sur le marché spot. Dans une de ses plaintes, le chargeur a mis l'accent sur les surcoûts générés par le refus du service qui l’a contraint à opter pour un contrat de long terme au prix fort. 

Cosco a réglé à l’amiable cette affaire. Mais MSC a toujours plaidé contre. 

Affaire à suivre 

Lors de la réunion du 25 janvier à Washington, la Commission a par ailleurs annoncé avoir reçu près de 30 commentaires en réponse à son avis de proposition de réglementation (NPRM) sur le refus déraisonnable de négocier publiée en septembre dernier.

La FMC a aussi confirmé le retour à une situation normalisée sur les quais nord-américains après une pagaille sans nom pendant au moins un an et demi. Le rétablissement va de pair avec les taux de fret revenus à des niveaux prépandémiques pour les imports (ils sont encore plus élevés pour les flux en sortie), ont confirmé les commissaires tout en pointant de grands bouleversements en cours dans le système portuaire américain. 

Changement de donne portuaire

Bien qu’il allonge le transit-time de deux semaines, le port de New York et du New Jersey a été privilégié au détriment de Los Angeles/Las Vegas. Le port de la côte Est a traité près de 9,5 MEVP en 2022 (+ 27 % par rapport à 2019) pour la première fois de son histoire au-delà de la barre des neuf millions de conteneurs.

La côte Ouest a, elle, fait les frais de la congestion et des menaces de grèves que font peser les négociations salariales pluriannuelles qui s’enlisent faute d’entente sur les augmentations de salaires et l’épineux dossier de l'automatisation. Les tractations entre l’International Longshore and Warehouse Union, qui représente les dockers, l'ILWU et la Pacific Maritime Association, pour les employeurs, sont au point mort. Sans que pour l’instant le blocage n’ait donné lieu à des arrêts de travail.

Les discussions portent sur le statut de plus de 22 000 dockers dans 29 ports, de la Californie à l'État de Washington. Depuis le 1er juillet 2022, date d’échéance du précédent contrat pluriannuel, les dockers travaillent sans filet. 

Nourris par l’expérience d’un précédent – les dernières négociations se sont étalées de mai 2014 à février 2015 et se sont matérialisées par des retards de livraisons –, les compagnies ont anticipé et depuis plusieurs mois détournent leurs services vers la côte Est. Les traditionnelles portes d’entrée du continent pour les importations conteneurisées subissent en conséquence des baisses à deux chiffres de leurs volumes après avoir vécu une hyperactivité inédite.

Ces derniers mois, le port de New York a ravi la première place à la Californie. Considéré sur l’ensemble de l’année 2022, le premier port de la côte Est se place toutefois derrière Los Angeles, premier port pour le conteneur avec 9,91 MEVP, mais devant Long Beach, l’autre californien, à 9,13 MEVP.

Adeline Descamps

 

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