Aux termes de deux ans et demi de construction, l’usine Knauf de Fos-sur-Mer avait sorti ses toutes premières plaques de plâtre le 15 mars destinés à approvisionner les grandes surfaces de bricolage du sud de l'Hexagone. Un bâtiment de 20 000 m2 a été édifié sur les 8 ha concédés pour trente ans par le port de Marseille-Fos. « Nous avons choisi Fos pour sa configuration en hub multimodal. Nous souhaitions une solution moins coûteuse en carbone pour alimenter nos clients en Rhône-Alpes », a annoncé Christine Muscat, directrice générale de Knauf en France, lors de l’inauguration de l’usine, le 18 octobre dernier, en présence de 130 invités, élus, clients, autorités et dockers.
Le choix de la multimodalité repose sur un sourcing constitué de gypse extrait des carrières espagnoles du groupe familial allemand et acheminé par la mer. Les navires de 15 000 t déchargent sur le site de Carfos ce minéral acheminé par bandes transporteuses vers les silos avant d’être concassé, broyé et calciné dans l’usine jouxtant le terminal. Un trafic de 300 000 t quand la production montera à pleine charge pour un volume de 30 millions de m2 de plaques au deuxième semestre 2025.
Charbon versus gypse issu du recyclage
Ce trafic portuaire ne compensera cependant pas la perte des imports de charbon mais devrait générer plus de manutention portuaire. Cette production plus « naturelle » sera adossée à l’incorporation progressive de gypse issu de la filière recyclage. L’objectif étant d’atteindre 35% de matière recyclée dans les plaques.
À la sortie de l’usine semi automatisée, les plaques de plaque de plâtres sont stockées sur 800 000 m2 dans l'attente de la livraison, encore aujourd’hui par le mode routier. À pleine capacité, les 150 références approvisionneront les enseignes de matériaux de construction et l’usine Knauf de Rousset qui double des plaques de plâtre de panneaux de polystyrène. En revanche, il n'y aura pas d’export de produits finis, à l'exception de quelques expéditions maritimes ponctuelles vers l’Afrique et les territoires ultramarins.
Un intérêt pour la barge
Knauf envisage sérieusement de faire appel à la solution fluviale pour les clients rhônalpins. « Les clients nous demandent une réactivité de 48 heures entre la commande et le chargement des palettes sur le camion », tempère Sébastien Izabel, responsable logistique de Knauf en France.
Le groupe allemand*, qui détient 25 % du marché français des plaques de plâtre, possède 13 unités de production dans l’Hexagone (transformation de polystyrène expansé, plaques de plâtre, panneaux de laine de bois, profilés, extraction d’anhydrite). Il alimente la moitié nord de la France depuis Saint-Souplet (Seine-et-Marne) et depuis l’usine belge de Wielsbeke, à 30 km de Lille qui dessert également les Pays-Bas. « Nous avons un grand intérêt pour le Canal Seine-Nord Europe qui nous permettrait d’augmenter les volumes par barges », souligne Gwijde de Vocht, directeur de Knauf Belgique. Le gypse est actuellement acheminé par le fleuve depuis Liège et Düsseldorf
À la différence de la France, les plaques belges sont fabriquées à partir du gypse industriel que sont les déchets de désulfurisation des centrales thermiques. Le soufre à l’origine des pluies acides a été transformé en gypse.
Six ans pour aboutir
Six ans se sont écoulés entre l’esquisse du projet de construction de l’usine à Fos et la coupure du ruban ce 18 octobre. Un process long que Christine Muscat déplore : « Entre le discours de la réindustrialisation et la réalité, il faut être super motivés. Les pouvoirs publics sont déconnectés du temps des industriels. Il appartient au port de se réinventer pour attirer les investisseurs », ajoute-t-elle.
Knauf a bénéficié d'une subvention de 400 K€ allouée par la région Sud dans le cadre de l’appel à projets « Territoires d’Industrie ». Elle a été abondée à hauteur de 234 K€ par TotalEnergies pour la formation des personnels de l’usine recrutés dans le bassin d’emploi local.
Nathalie Bureau du Colombier
*Le groupe Knauf possède 80 carrières et 320 usines dans le monde pour un chiffre d’affaires 2023 de 15,6 Md€.
