Vincent Bouchery : La SAS Transport Bouchery s’inscrit dans une démarche RSE. Je suis également soucieux de l’image de notre métier qui est trop souvent mauvaise auprès du grand public. Notre secteur a intérêt à prendre les devants, à anticiper l’évolution de notre métier sur le plan des énergies nouvelles. Quand l’on s’intéresse aux alternatives, on s’aperçoit que le choix n’est pas étendu et pourrait se résumer au moteur à explosion qu’il s’agisse du diesel, du XTL ou du B100. Cela m’a laissé relativement perplexe et j’ai cherché à pousser ma réflexion plus loin. Enfin, nous effectuons localement pour l’un de nos clients une rotation de 250 kilomètres qui pourrait tout à fait être effectuée en local, à la journée, avec une motorisation autre que thermique et donc en électrique.
V.B. : Le fond du problème reste toujours l’autonomie qui a une importance réelle pour un professionnel. J’ai pris pour benchmark un constructeur nord-américain qui dispose à l’échelle mondiale du meilleur recul et de l’expérience de la technologie électrique laquelle, dans son principe, reste assez simple à mettre en œuvre et est bien connue historiquement. Outre une longue période de test et maintenant de commercialisation, cet acteur a révolutionné le domaine de la mobilité, notamment électrique. J’ai comparé son offre avec celle de quatre constructeurs européens, dont un Français et un Allemand.
V.B. : Il faut d’abord noter que l’électrique est très intéressant puisque les frais d’entretien sont réduits. Le coût du carburant représentant 30 % du chiffre d’affaires d’une entreprise du TRM, passer à l’électrique peut permettre une économie colossale et un gain de rentabilité énorme, ne serait-ce qu’en réduisant par exemple de moitié ce poste. D’autant que les prix du gazole et des carburants alternatifs vont sans doute continuer à augmenter alors que, notamment grâce à la production de notre propre énergie, ceux du kilowatt pourraient se stabiliser voire diminuer. De mon point de vue, l’avenir de notre métier pourrait passer par le recours à deux types de technologies, l’une au-deçà de 300 kilomètres, l’autre au-delà. Il faut aussi remarquer que les modèles des constructeurs européens relèvent davantage de prototypes que de véhicules à part entière, étant adaptés de bases connues. En réalisant cette étude, j’ai également constaté que le système de subvention biaise le prix de marché, en surélevant la valeur faciale. Finalement, j’ai pour le moment décidé de ne pas franchir le pas car passer à l’électrique ne serait pas viable économiquement. Il faudrait par exemple cinq à six années de plus pour amortir un moteur électrique en comparaison d’un thermique. Les prix des constructeurs européens sont beaucoup trop élevés.
V.B. : Probablement. Nous sommes des gestionnaires. Si demain se présente une offre deux moins chère que celle proposée par les acteurs européens, je n’aurai sans doute pas le choix. Si l’on ne suit pas le mouvement initié par toute la profession du TRM, on n’est plus compétitif. Au-delà de notre propre situation, il y a aussi de quoi s’interroger sur l’économie du secteur automobile professionnel européen : ne risque-t-on pas de reproduire ce qui s’est passé sur le marché du véhicule particulier électrique ? Avons-nous déjà pris du retard à l’échelle européenne sur le TRR électrique ?
V.B. : Les marques que j’ai consultées le savent : je reste intéressé et suis convaincu du bien-fondé de l’électrique dans certaines configurations. Je suis également de près la législation liée aux méga-camions dont la mise en œuvre fera peut-être bouger les lignes.