Mickaël Smith, dit « Mike », le raconte avec passion : la première fois qu’il a conduit un camion, en tant que bénévole pour la Croix Rouge, ça n’a été « que du bonheur ». Cet écossais, qui a plaqué sa carrière dans la finance à la Royal Bank of Scotland pour venir s’installer avec sa femme en France, a trouvé sa vocation en se reconvertissant comme conducteur routier. « En arrivant en France, j’ai enseigné quelques années. Mais j’avais déjà des soucis d’audition, liés au fait que j’ai été batteur dans différents groupes de musique. J’avais du mal à comprendre mes élèves, mes collègues… Il était nécessaire que je change de métier. » Équipé d’un appareil auditif, il passe deux ans comme conducteur dans une entreprise de messagerie, il se reconvertit grâce à un titre professionnel, puis est embauché chez DB Schenker Nantes en 2021. « A mon arrivée, j’ai échangé avec les directeurs, chefs de quai et ma propre cheffe de quai. Ils ont expliqué aux autres salariés que le français n’était pas ma langue étrangère, que j’avais des problèmes d’audition et que j’avais plus de facilité à comprendre en lisant sur les lèvres. Ils ont aussi expliqué que j’évitais le coin café car en présence de monde, j’ai du mal à entendre », raconte-t-il.
« Le camion électrique rend mes journées bien moins fatigantes »
DB Schenker a proposé à Mickaël Smith la conduite d’un Renault Trucks E-Tech D 100% électrique. « Au début, je conduisais un 19 tonnes très agréable mais c’était très bruyant. Je n’entends plus les sons aigus et je devais mettre mon appareil auditif en silencieux et le régler à chaque fois que je devais échanger avec un client, se remémore-t-il. Avec le camion électrique, ça n’a rien à voir : c’est très silencieux, il n’y a quasiment pas de vibrations… Cela a changé mes journées de travail, c’est bien moins fatigant. » En raison de son handicap, DB Schenker accorde également à Mike plusieurs demi-journées pour se rendre à ses rendez-vous médicaux et pour le suivi de ses appareils auditifs.
Rappelons qu’en France, c’est l’arrêté du 28 mars 2022 qui a permis aux personnes sourdes la conduite d’un poids lourd, sous réserve d’une évaluation de leurs capacités : la pré-évaluation des capacités à la formation (PECF). Celle-ci met le candidat en conditions réelles, dans un camion et avec un simulateur de conduite, pour qu’il démontre ses capacités dans un environnement adapté à son handicap.
Le taux d’emploi de personnes en situation de handicap dans le TRM à 3,5 %
Malgré tout, le taux d’emploi de personnes en situation de handicap dans le TRM, de 3,5 %, demeure faible. Et si, selon l’OPTL (2021), 2 906 entreprises du TRM sont soumises à l’obligation d’emploi d’au moins 6 % de travailleurs handicapés, elles ne sont que 70 % à respecter cette obligation. « Chaque année, la technologie des appareils auditifs évolue de façon incroyable. Aujourd’hui je peux les connecter en bluetooth pour passer des appels et je peux les régler pour m’adapter à l’acoustique du lieu dans lequel je me trouve, explique Mikaël Smith. Donc oui, la surdité est un handicap mais les technologies actuelles permettent tellement de minimiser son impact que je n’imagine pas que cela puisse poser problème à une entreprise pour recruter quelqu’un. D’autant que cela n’impacte pas trop le quotidien du chauffeur livreur, puisqu’on est seuls et on a des conversations courtes en face à face avec les clients. »
