Les méthaniers gagnés à leur tour par la fièvre à l'affrètement

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Il faut compter 200 000 $ par jour pour affréter un porte-conteneurs, 86 000 $ pour un vraquier et désormais près de 200 000 $ pour des méthaniers. Les navires de transport de GNL s’engagent à leur tour sur la voie de la prospérité. La conjonction de phénomènes extrêmes dans le monde, hérités de la pandémie, stimule les importations et fait des navires des actifs rares et donc précieux.

Pouvait-il en être autrement au vu de la fièvre qui s’est emparée des prix du gaz naturel au cours des six dernières semaines et à l'approche du pic hivernal ? Les méthaniers s’engagent à leur tour sur la voie de la prospérité dans le sillon des porte-conteneurs et des vraquiers, qui s’y sont déjà frayés un chemin depuis un certain temps. Le coût de l’affrètement d’un porte-conteneurs sur une durée de deux ans peut équivaloir à 75 % des prix de l’achat. Dans le vrac sec, il est de moins en moins exclu par les sphères du courage maritime que le tarif journalier d’un capesize atteigne les 100 000 $ après avoir dépassé les 86 000 $ début octobre. 

La crise du gaz naturel et de l'énergie qui frappe l'Asie et l'Europe a propulsé les taux spot des navires transportant du GNL sur la plupart des grandes routes. Sur la seule journée de vendredi dernier, leurs tarifs ont bondi de 40 % sur le marché au comptant et de 65 à 86 % en une semaine en fonction des caractéristiques de ce navire réputé pour sa sophistication technique. Selon la motorisation plus ou moins efficiente sur un plan énergétique, le méthanier s’offre à un tarif compris entre 157 500 $ et 180 000 $. Même les plus anciens ne se bradent pas, aucun en deçà de 100 000 $ selon Clarksons Platou Securities.

Le Baltic Exchange a enregistré des taux équivalents d'affrètement à temps au-delà des 200 000 $ pour expédier 180 000 m3 de GNL à Tokyo depuis Gladstone en Australie. Les taux de GNL du Pacifique se négocient avec une prime record de 64 250 $ par jour par rapport aux taux de l'Atlantique, selon Spark Commodities, spécialisé dans la tarification du transport de GNL.

Entre 200 000 et 300 000 $/j

Les raisons de cette poussée de fièvre ne diffèrent pas de celles des autres segments du transport maritime : ils reposent sur une combinaison de facteurs qui relèvent de l’offre et de la demande, avec en plus, pour les méthaniers (comme pour les vraquiers), de paramètres qui relèvent d’aléas conjoncturels (un hiver 2020-2021 rigoureux, des inondations, typhons et autres événements météo qui ont asséché les stocks de produits énergétiques) et structurels (transition environnementale qui met en concurrence le charbon et le gaz naturel dans la production d’électricité et a encore accru la demande).

Ces phénomènes (liste non exhaustive) ont été aggravés par des prix élevés au printemps et en été, qui n’ont pas incité les utilisateurs finaux à se réapprovisionner assez vite. Résultat, le choc simultané sur l’offre et la demande a l’effet d’une bombe à retardement. Les prix du gaz naturel ont grimpé en flèche partout dans le monde au même moment.

En Europe, les pays se sont trouvés en concurrence avec le Japon et la Chine pour obtenir des cargaisons au comptant dans un contexte où l'approvisionnement par gazoduc de la Russie, qui fournit environ 50 % des importations de gaz naturel de l'UE, a été plus faible que prévu.

Inérêt inédit 

Dans la perspective du pic hivernal, les tarifs des méthaniers sur le marché spot sont montés en température et les exploitants de méthaniers évoquent dans des colloques des taux qui devraient se maintenir entre 200 000 et 300 000 $/j. Le secteur est toutefois moins « accro » au spot que dans les autres segments du transport maritime et traditionnellement plus enclin à signer des chartes pluriannuelles. « L'intérêt pour les affrètements à long terme plutôt que pour le spot a été unique. Nous n'avons jamais vu un marché à terme aussi fort auparavant », a confirmé devant des investisseurs Oystein Kalleklev, PDG de la compagnie norvégienne cotée en bourse Flex LNG, qui exploite une flotte 13 méthaniers.

Des bénéfices qui excitent les exploitants

L’offre de navires disponibles est un autre point clé. Une partie de la flotte de 630 méthaniers est actuellement déployée sur des contrats à long terme de plus de 10 ans. Les cargaisons de GNL au comptant représentaient environ 40 % des 356 Mt expédiées en 2020, selon les données de l’association des importateurs de GNL (International group of LNG Importers).

Les bénéfices de l'arbitrage donnent en outre la fièvre aux tarifs d'affrètement. Dans ses échanges avec les milieux financiers, Flex LNG indiquait que le transport de 172 000 m3 du Golfe des États-Unis vers le Japon s’était soldé par un arbitrage de 124 M$ tandis qu’une cargaison d'une valeur de 20 M$ valait 120 M$ lorsqu'elle a atteint l'Europe. L’exploitant estime à 19 Mt les achats de GNL à court terme d’ici à mars et à 14,5 Mt la pénurie gaz naturel en Europe.

Adeline Descamps

 

 

 

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