La flambée des prix du gaz met à l'arrêt certains secteurs industriels

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Les prix mondiaux records du gaz naturel poussent certaines entreprises voraces en énergies à réduire leur production. Une tendance qui ajoute aux perturbations dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et à la flambée des matières premières.

Déjà impactés par la pénurie et le coûts de matières premières, des producteurs d'acier, des fabricants d'engrais et des industriels du verre, ont dû suspendre ou réduire leur production en Europe et en Asie en raison de la flambée des prix de l'énergie, indique Reuters. La société norvégienne Yara International, l'un des plus grands fabricants mondiaux d'engrais, a annoncé en fin de semaine dernière qu'elle allait réduire d'environ 40 % sa production européenne d'ammoniac en raison des prix élevés du gaz, principal facteur de coût pour les produits chimiques et les engrais à base d'azote.

Cette annonce est intervenue après que la société américaine CF Industries a imputé le prix du gaz comme responsable de l’interruption momentanée des activités de deux de ses usines britanniques.

Les prix du gaz naturel ont fortement augmenté dans le monde entier au cours des derniers mois. En Europe, ils ont enregistré une hausse de plus de 250 % depuis le début de l’année et d'environ 175 % en Asie. 

Factures qui flambent

L’indice de référence européen (TTF, Title Tansfer Facility), place de marché néerlandaise du gaz naturel où sont effectuées les opérations d’achat et de vente mais aussi des opérations de couverture de risque, est passé au-dessus du mégawattheure pour livraison en octobre 2021, ce qui équivaut à plus de 24 $ par million de British Thermal Units (BTU). C'est environ cinq fois son niveau d'il y a un an. La flambée du coût du gaz a contribué à ce que les prix de l'électricité atteignent également des sommets, de nombreuses centrales étant alimentées au gaz.

Inquiets de l'impact sur les consommateurs cet hiver, certains pays européens ont pris des mesures pour y remédier comme l'Espagne, où un plafonnement les prix a été approuvé la semaine dernière.

En Asie, les prix du GNL sont à des niveaux similaires, s'échangeant à environ 20 $ par million de BTU. Aux États-Unis, ils ont atteint un niveau historique et sont environ deux fois plus élevés qu'au début de l'année.

Trois facteurs 

La hausse résulte de trois facteurs qui se sont combinés : une augmentation de la demande, en particulier en Asie, où la reprise a été particulièrement forte, des stocks de gaz au plus bas alors qu’approche l'hiver et un approvisionnement en gaz plus serré que d'habitude en provenance de Russie.

Ce que dément Gasprom, le principal producteur de gaz russe, qui dit avoir augmenté sa production de 18,4 % en un an (298,2 milliards de m3 de gaz fin juillet). Selon le gazier, l'Europe a augmenté ses importations de gaz par gazoduc au premier semestre 2021 de 31,5 milliards de mètres cubes (bcm), soit 33 %. 

Atténuer la pression

Aux États-Unis, l’organisation Industrial Energy Consumers of America, qui fédèrent les industriels de produits chimiques, minéraux et agroalimentaires, a demandé au ministère américain de l'Énergie de limiter les exportations de GNL du pays « afin de maintenir les coûts énergétiques à un niveau bas pour l'industrie ».

Certains des facteurs qui poussent les prix du gaz à leurs sommets en Europe et en Asie pourraient être transitoires. Des approvisionnements supplémentaires en gaz pourraient atténuer la pression, soutiennent les analystes. La Norvège a pour sa part autorisé une augmentation des exportations de gaz. D'ici à la fin de l'année, la Russie pourrait fournir davantage si le Nord Stream 2, son nouveau gazoduc très politisé et contesté parce qu’il accroît la dépendance énergique de l’Europe à la Russie, obtenait les autorisations du régulateur allemand de l'énergie. 

L’acier et le ciment touchés

D'autres secteurs à haute intensité énergétique, comme l'acier et le ciment, sont également touchés. British Steel, le deuxième plus grand producteur d'acier du pays, a déclaré qu'il maintenait ses niveaux de production, mais que les augmentations « colossales » des prix de l'énergie rendaient « impossible de produire de l'acier de manière rentable », mentionne Reuters.

D’autres actionnent les mécanismes de couverture pour ne pas stopper les hauts-fourneaux. Ainsi de l’allemand Thyssenkrupp AG, deuxième plus grand producteur d'acier d'Europe. 

Le deuxième cimentier mondial, Heidelberg Cement, n’a pas non plus interrompu ses opérations mais reconnait que la hausse des prix de l'énergie a surenchéri ses coûts de production.

Retour du charbon en substitut

Bien que la demande de gaz soit soutenue par l'abandon du charbon pour la production d'électricité, le combustible noir carbone s’impose comme une source d'énergie alternative bien que son recours est limité dans certains pays par les politiques gouvernementales qui bannissent les fossiles.

La hausse des prix du gaz pourrait aussi agir comme un catalyseur de la demande de pétrole si davantage de pays optent pour des approvisionnements à base de pétrole pour passer l’hiver, a fortiori s’il est rigoureux, indique Gibson. Dans son dernier rapport hebdomadaire, le courtier maritime s’attache à montrer que « la vigueur des prix du gaz a des ramifications majeures sur les marchés mondiaux de l'énergie en obligant les industriels et entreprises de services publics à chercher des alternatives. »

Parmi elles, les deux vieilles ressources énergégiques qui ont rendu possible la révolution industrielle des XVIII et XIXe siécle : le charbon et le pétrole dans les régions où il existe encore des capacités de production d'électricité à base du charbon. Ces deux sources d’énergie pourraient bénéficier d’une hausse dans certaines régions, analyse Gibson, qui y voit une opportunité pour le transport maritime. « Les pétroliers pourraient-ils enfin recevoir le catalyseur qu'ils attendaient depuis longtemps ? ».

Adeline Descamps

 

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