L’opération entre les deux compagnies opérant des navires-citernes était attendue de longue date. Mikael Skov y a d’ailleurs fait allusion dans le communiqué annonçant l’accord. Le PDG de Hafnia ne l’a jamais caché auprès de la presse : il est l’avocat d'une consolidation dans le secteur des transporteurs de produits pétroliers. Et ce, bien avant la crise sanitaire qui a précipité le secteur des tankers dans une dépression sévère.
Le singapourien Hafnia (BW Group) et le danois Chemical Tankers (CTI) ont donc conclu un accord portant toutes ses actions en circulation en vertu duquel le premier peut ainsi prendre le contrôle absolu du second, qui s’appelait encore Navig8 Chemical jusqu’en août. Fondée en 2013, la compagnie maritime, basée à Hellerup au Danemark, est spécialisée dans le transport maritime de produits chimiques et opère une flotte de 32 navires, exploités dans les pools commerciaux spot de Navig8 Group et Odfjell, deux des plus grands opérateurs de chimiquiers au monde.
32 navires de conception récente
Hafnia hérite donc d’abord et avant tout lieu flotte importante et de conception récente – tous ont été livrés entre 2015 et 2017 – et donc efficiente sur un plan énergétique (spécification ECO). Fait non négligeable, les six Middle Range (MR, 49 000 tpl), 18 handysize (38 000 tpl) et les huit tankers (25 000 tpl) de CIT ont tous été construits, soit par des chantiers japonais soit sud-coréens, maîtres dans ce type de navires plus techniquement sophistiqués : Hyundai Mipo Dockyard, Kitanihon Shipbuilding, Fukuoka Shipbuilding, STX Offshore & Shipbuilding et Hyundai Vinashin Shipyard.
Dans le cadre de la transaction*, qui doit encore être validée par les conseils d’administration, les actionnaires de CTI recevraient des actions de Hafnia représentant 21,5 % du capital du singapourien. Oaktree Capital Management, principal actionnaire de CTI, pourrait alors détenir 20,4 % des actions de l’entité fusionnée. Pour la petite histoire, le fonds d'investissement détient aussi des participations dans le capital de Torm et Ardmore, des concurrents que Hafnia a un temps convoités. Les parties prenantes espèrent finaliser la transaction avant le 1er février 2022.
Premier rang par la capacité
Hafnia, qui exploite actuellement 201 navires – en majorité des MR (83), aux côtés de handysize et de LR (Long Range)–, se retrouve ainsi avec une flotte de 233 transporteurs de produits pétroliers et chimiques, ce qui devrait le hisser au premier rang par la capacité dans le secteur. Avec cette opération, il rajeunit par ailleurs son parc (âge moyen des navires de sept ans) et étend son champ d’intervention avec des navires de 25 000 à 115 000 tpl.
« Ces navires vont contribuer à nos efforts de modernisation de la flotte et à l'introduction d'une efficacité opérationnelle qui se traduira par une meilleure performance environnementale. La société est en bonne voie pour atteindre l'objectif de l'OMI d’ici 2028, à savoir une réduction de 40 % de l'intensité de carbone », indique le communiqué de la compagnie, qui y voit un atout face à la volatilité de ses marchés.
Selon les derniers comptes publiés de l’entreprise, Hafnia est sorti du deuxième trimestre avec une perte nette de 11,2 M$, soit de 26,9 M$ sur l’ensemble du premier semestre. La compagnie ne devrait pas mieux se porter que ses concurrents à l’issue du troisième trimestre. Ils ont tous présenté pour l’instant des résultats reflétant la léthargie dans laquelle ils baignent.
Adeline Descamps
*Hafnia a été conseillé dans le cadre de cette opération par Gorrissen Federspiel et Advokatfirmaet Thommessen et CTI par Fearnley Fearnley Securities et PJT Partners (conseillers financiers) et Linklaters LLC et Advokatfirmaet Wiersholm (conseillers juridiques).