L’an dernier, le transport maritime de charbon thermique (celui qui sert à la production de l’électricité) et à coke (celui utilisé par les sidérurgistes) a été pénalisé par les absences de la seconde puissance économique mondiale dont l’activitéa été cadenassée par la politique zéro-Covid, l’augmentation de 10,5 % de l'extraction locale de charbon par les sociétés minières chinoises sous l’injonction de Pékin et une reprise des importations de la Mongolie voisine qui transitent par la voie ferrée.
Cette année, la reprise de l'économie chinoise découlant de l’assouplissement des restrictions sanitaires, le rétablissement des droits d'importation, la fin de l'interdiction officieuse par la Chine du charbon australien et les ambitions des autorités en matière de transition énergétique en Chine pourraient changer les perspectives.
Selon l’organisation maririme Bimco, dont les membres sont des exploitants de navires dans toutes les catégories du transport maritime, les exportations de charbon ont chuté de 12,2 % en 2022, s'affaiblissant au cours du premier semestre de l'année et se redressant partiellement au cours du second. « La demande d'importation s'est redressée principalement pendant les périodes de forte demande énergétique, comme pendant la canicule d'août, et lorsque les services publics ont constitué des stocks au quatrième trimestre pour l'hiver. Les expéditions de charbon à coke sont restées plus stables tout au long de l'année, ne s’affaissant que de 6,5 % », indique Filipe Gouveia, analyste des transports maritimes pour l’association.
La Chine en passe de lever l'interdiction sur les importations de charbon australien
Alternative abordable au GNL du point de vue de la Chine
Le charbon entre encore pour 60 % dans la production d'électricité en Chine. « Il reste une alternative abordable au GNL pour les consommateurs sensibles aux coûts, ajoute l’analyste. En outre, si la reprise en Chine apporte de la stabilité au secteur de l'immobilier, la demande d'acier, et donc de charbon à coke, pourrait augmenter ». Le BTP, qui représente un quart du PIB chinois, est en souffrance. Ses difficultés persistantes, incarnées par les difficultés retentissantes du géant chinois Evergrande, hypothèquent sa reprise.
Selon le Bimco, la décision de la Chine d'assouplir l’embargo sur charbon australien pourrait augmenter les tonnes-milles. Toutefois, cette politique est contrebalancée par un rétablissement des droits à l’importation du charbon à partir d'avril 2023, soit 3 % pour le charbon à coke et 6 % pour le charbon thermique. Pékin avait annoncé en avril 2022 la suppression des taxes sur diverses qualités de charbon pendant un an jusqu'au 31 mars 2023.
La Chine supprime les droits de douane sur ses importations de charbon
Clap de fin pour le charbon thermique ?
La production locale n’est pas non plus une alliée dans la mesure où elle vise à garantir que le charbon domestique reste plus abordable que les importations, rappelle l’expert.
« L’année 2023 pourrait être la dernière année positive pour les expéditions de charbon vers la Chine avant qu'elles ne commencent à décliner. En plus de l'augmentation de l'extraction locale du charbon, Pékin entend atteindre le pic de consommation de charbon en 2026 et produire un tiers de son électricité à partir de sources renouvelables d'ici 2025 » explique Filipe Gouveia, sous-entendant une condamnation pour le charbon thermique.
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit pour sa part que le commerce mondial du charbon thermique pourrait chuter de 10 % d'ici 2025 pour ces deux mêmes motifs. En revanche, le commerce du charbon à coke pourrait encore augmenter de 6 % jusqu'en 2025, en raison de la plus grande difficulté à remplacer cette matière première.
Adeline Descamps
