Alors qu’en ce 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, institutionnalisée par l’ONU en 1977, s’ organisent en France et dans le monde des actions en faveur de l’égalité des sexes, qui ne sera pas atteinte avant « trois cent ans » selon les Nations unies, la mobilisation contre la réforme des retraites se poursuit dans l’Hexagone. Le combat feminin se politise à cette occasion alors que les femmes figurent au rang des catégories qui seraient les plus affectées par la réforme à venir.
Des « grèves féministes » ont ainsi fait leur apparition dans le langage syndical de ces dernières heures. Mais elles sont aussi au coeur des débats au Sénat, où a commencé l’examen du très contesté article 7 (1 327 amendements déposés) sur le report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, le 7 mars, après la journée de mobilisation dans les rues. « Le report de l’âge légal aura de lourdes conséquences sur les femmes et leur quotidien », a répété Laurence Cohen, sénatrice PCF, soulignant que la « réforme creusera les inégalités » pour les femmes. « Selon les calculs de l’économiste Mickaël Zemmour, 60 % des économies de la réforme vont être réalisées sur les femmes », pointe pour sa part l’écologiste Raymonde Poncet Monge.
Partout en France, des cortèges continuent d’aborer la couleur de la lutte. La semaine sera jalonnée par des mobilisations éparses en France alors qu’une une nouvelle grande journée de mobilisation est prévue le samedi 11 mars.
Les quatre terminaux méthaniers français bloqués
Depuis le 6 mars, trois des quatre terminaux méthaniers d’Elengy, filiale d’Engie, à Fos-sur-Mer (Cavaou et Tonkin) et à Saint Nazaire (Montoir-de-Bretagne) sont à l’arrêt et ils le resteront toute la semaine. L’alimentation en gaz du réseau de distribution GRTgaz, le déchargement des navires méthaniers et le remplissage des citernes de GNL sont inopérants. Les stockages, extrêmement sollicités pour combler le manque de gaz, font l’objet de barrages filtrants depuis le mardi 7 mars, indique la CGT.
Le quatrième terminal méthanier de France, opéré à Dunkerque par le groupe belge Fluxys, est également entré en grève, mais pour une durée de 48 heures à compter du 7 mars au matin.
« Ports morts »
Les ports du Havre, de Rouen et de Marseille-Fos sont bloqués ce 8 mars par une opération « ports morts », un concept qui rappelle des temps anciens avant que n’émerge un virus planétaire mais qui avait été initialisé pour les mêmes raisons : la réforme des retraites. En 2020, alors qu’il y a eu au moins une soixantaine de jours de grèves, les ports ont été morts à plusieurs reprises et durant 72 heures.
« Environ 300 dockers, portuaires et territoriaux, organisent le blocage de la zone portuaire via 11 points de blocage tenus jusqu'à 15h00 [le 8 mars, NDLR]. Nous laissons passer les véhicules légers, mais pas les camions », a déclaré à l'AFP Yann Mallet, secrétaire général de la CGT dockers de Rouen.
Bassin d’emplois de 18 000 personnes, la zone portuaire de Rouen, premier port céréalier d'Europe, est paralysée en grande partie, a assuré à la presse Gérald Le Corre, de l'union départementale CGT.
Le Havre, premier port français de conteneurs, est bloqué lui depuis 6h00 du matin selon un tract diffusé sur le site de la CGT portuaire. Les zones industrielles des deux villes normandes étaient également bloquées. Selon la préfecture de la Seine-Maritime, l’accès était coupé à Rubis terminal (distribution de produits pétroliers) et aux zones industrielles des deux villes normandes.
À Marseille, tous les accès au Grand Port maritime, bassins est (centre-ville) et ouest (Fos-sur-Mer), sont bloqués, a confirmé Pascal Galéoté, représentant CGT des agents portuaires du Grand Port maritime de Marseille (GPMM) et de Fluxel, opérateur des terminaux pétroliers de Fos et Lavéra, dont rien ne sortira. Selon le mouvement syndical, les agents portuaires et dockers seraient totalement mobilisés, à « 100 % en grève ».
Aucune sortie de carburant
Les expéditions de carburants restent bloquées à la sortie de toutes les raffineries de France, les représentants de la CGT-Chimie, appelant à une grève reconductible. À ce stade, les gros sites d'expédition de TotalEnergies sont à l'arrêt et les piquets n’ont pas été levés à la Mède, Donges, la Raffinerie de Normandie, Feyzin et Flandres, « avec des taux de grévistes entre 70 et 100 % ».
Le syndicat fait également état de 80 % de mobilisés sur le site de Lavéra (Marseille Fos) du groupe Petroineos, filiale du britannique Ineos et de PetroChina tandis que la raffinerie Esso-ExxonMobil de Fos-sur-Mer comptait 86 % de grévistes parmi les équipes du matin. La mobilisation est moindre à Port-Jérôme-Gravenchon près du Havre, la CGT annonçant 20 % d’absents mais « aucune sortie de carburant ».
Reconduction de la grève sondée toutes les huit heures
L’anticipation pour les usagers du port reste difficile. La question de la reconduction de la grève est posée toutes les huit heures aux salariés, sachant que dans certains syndicats, les caisses de grèves permettent de limiter les pertes financières pour les salariés.
La direction de TotalEnergies a assuré pour sa part que « les stocks en dépôts et en station-service sont à un niveau élevé » et exclut une pénurie à court terme. Les 10 000 stations de France sont aujourd'hui remplies et peuvent compter sur 200 dépôts de carburants.
Les raffineries n’étant pas à l’arrêt, les productions sont actuellement stockées sur sites. Quand les cuves seront pleines – il faudrait que le blocage s’étire en semaine – elles devront alors se mettre à l’arrêt.
A.D.