La 8e édition de VivaTech était placée sous le signe de l’Intelligence artificielle. Pour trouver des applications concrètes côté transport de marchandises, il fallait faire un tour sur le stand de La Poste. Le premier réseau de livraison colis en Europe a en effet présenté un robot consigne autonome, destiné à la livraison de colis et intégrant 8 compartiments pour environ 0,5 m3. Il sera testé prochainement à Milton Keynes, une ville nouvelle proche de Londres par sa filiale DPD UK. « DPD a déjà déployé des robots autonomes d’une taille plus réduite dans 5 villes en Angleterre et prévoit d’en déployer dans 5 autres prochainement. Nous avons souhaité cette-fois ci utiliser un robot de taille plus grande qui pourra servir de consigne en se positionnant à des endroits clés en fin de tournée. Cela permettra aux clients de renvoyer leurs articles s’ils n’en sont pas satisfaits », indique Céline Bertrand, responsable communication chez GeoPost. Le groupe va également tester à La Rochelle un Renault Master autonome, qui sera chargé d’approvisionner 6 à 8 facteurs facteurs au cours de leurs tournées à partir de septembre 2024 (voir interview). Côté entrepôt, l’entreprise ProGlove faisait la démonstration d’un gant facilitant le scan des colis. Déployé dans les dépôts de DPD Suisse, ce gant de 50g facilite la lecture des codes barres des colis et évite l’utilisation d’un PDA plus lourd (400g), avec un gain annoncé de 4 à 6 secondes par scan. De même, des représentants de l’entreprise tarbaise HMT présentaient leur exosquelette Wave 2, destiné à soulager le dos lors de la manipulation de colis de 5 à 12 kilos situés à faible hauteur, comme des tapis roulants. Cet exosquelette de 2 kg seulement, qui entrave peu les mouvements, est testé dans trois plateformes de traitement du courrier.
Jean Louis Carrasco, directeur logistique urbaine La Poste : « Il est important de continuer à expérimenter »
Quels regards portez-vous sur les différentes expériences de livraison autonomes menées par la Poste depuis quelques années ?
Nous avons commencé par expérimenter il y a 5 à 6 ans des robots suiveurs, qui accompagnaient les facteurs lors de leur tournée à une vitesse de 6km/h. Nous nous sommes rendu compte que cette solution n’était pas efficace, les robots avaient du mal à monter sur les trottoirs par exemple. Nous avons également expérimenté l’utilisation de robots de livraison autonomes d’une contenance de 1 m³ en collaboration avec la Métropole de Montpellier pendant 3 ans, cela a permis d’apporter beaucoup d’enseignements qui ont été envoyés au ministère des Transports afin de préparer la future réglementation sur les véhicules autonomes. Ces différentes expériences nous ont permis d’affiner nos projets de livraisons autonomes, en évitant désormais de recourir à des petits robots de livraison monocolis. D’autres sociétés comme Fedex ont aussi abandonné ces projets, faute de rentabilité et de productivité.
Dans ce cas, pourquoi continuez-vous à miser sur la livraison autonome ?
Nous préférons désormais focaliser nos projets sur le BtoB, en réservant la livraison finale des derniers mètres, ou du dernier km, au facteur. Il est important de continuer à expérimenter car nous exerçons un métier de « centimier » à faible marge, et une partie de la valeur de notre activité repose sur la data et la connaissance de nos clients finaux. Nous souhaitons ainsi nous approprier la technologie des véhicules autonomes de livraison afin d’éviter d’être désintermédiés par d’autres acteurs et ainsi préserver nos données clients.
Pouvez-vous dévoiler votre partenariat avec la société Milla ?
Nous nous sommes rapprochés des différents acteurs de mobilité autonome et nous avons eu un bon contact avec Milla, qui était intéressée par le développement d’une solution fret après avoir testé des navettes passagers. Milla développe un soft capable de s’adapter à tout véhicule, qui sera utilisé à La Rochelle sur un Renault Master de 8 m³ dont l’arrière a été co-développé avec La Poste. Nous partons du principe que La Poste a complètement renouvelé sa flotte pour les derniers km en centre-ville, avec l’abandon progressif des VUL pour le vélocargo. Mais passer de 8 m³ à 1 m³ oblige à multiplier les petits entrepôts en centre-ville pour continuer les tournées et le foncier coûte cher. Dès lors, l’une des pistes de réflexion porte sur l’utilisation de véhicules autonomes comme des entrepôts mobiles, capables d’approvisionner les facteurs au cours de leurs tournées.
Propos recueillis par GH