Dans le domaine du méthanol, il y a deux clans, ceux qui passent directement commande de nouveaux navires destinés à être propulsés avec cette énergie décarbonée si le méthanol est vert et ceux qui convertissent leur flotte existante.
Pionnier, Maersk a ouvert la voie à un carnet de commandes mondial qui a enregistré 228 contrats en 2023, dont 113 signés par les six leaders dans le conteneur (Maersk, CMA CGM, Cosco à qui il revient les premières constructions de mégamax avec ce carburant, Evergreen, ONE et HMM (cf. informations détaillées dans cet article : Premier avitaillement au méthanol à Anvers).
C’est aussi Maersk qui a signé le premier contrat de conversion avec le chantier naval Zhoushan Xinya de Ningbo-Zhoushan pour convertir le Maersk Halifax, porte-conteneurs de 15 282 EVP. Les onze navires de cette série, construite entre 2017 et 2019, pourraient être concernés. Les travaux devraient démarrer en juillet pour une durée d’environ trois mois. La découpe de la première tôle a eu lieu en mars.
CMA CGM s’est engagé, de son côté, avec Qingdao Beihai Shipbuilding Heavy Industry pour la conversion de dix unités de 9 300 EVP.
En décembre 2023, Cosco a fait appel à son tour au motoriste MAN ES pour convertir quatre porte-conteneurs, deux unités de 13 800 EVP et deux de 20 119 EVP en double motorisation avec le méthanol. Les premiers à être transformés seront les Camellia et Virgo. Le contrat de ce dernier est assorti d'une option pour neuf navires supplémentaires des classes Virgo et Pisces de 20 000 EVP. Ils devraient être livrés durant le premier semestre de l’année 2025.
Hapag-Lloyd et Seaspan ambitieux
Hapag-Lloyd, qui avait été le premier et le seul à avoir testé la conversion fort onéreuse d’un navire au GNL (Matson s’y est ensuite essayé), et Seaspan sont plus ambitieux encore : ils avaient annoncé en juillet 2023 plancher sur une conversion à grande échelle, jusqu’à 60 unités, dont 15 unités affrétées à long terme par Hapag-Lloyd et 45 autres en option.
Mi-avril, l’armateur allemand et son affréteur ont conclu un accord pour refiter les cinq premiers. Il s’agit de navires d’une capacité de 10 100 EVP (337 m de long, port en lourd de 115 000 tpl), dont le contrat d’affrètement a été prolongé de six ans mais dont le prix n’a pas été révélé.
La répartition de l'investissement a aussi été tenu à la discrétion des deux parties prenantes. Elle est déterminante. Si Seaspan assure le coût du chantier, il se peut qu’il ait revu à la hausse les termes financiers du contrat initial à moins que l’investissement ne soit partagé.
Des navires relativement récents
Les navires concernés – Seaspan Amazon, Seaspan GanGes, Seaspan Thames, Seaspan Yangtze et Seaspan Zambezi ont tous été construits en 2014 par le chantier naval chinois Yangzijiang Shipyard et sont dotés des moteurs MAN-B&W 10S90ME-C9.
Le motoriste allemand a lourdement investi de son côté pour être au rendez-vous de la propulsion au méthanol et à l’ammoniac. Selon MAN, chaque conversion peut permettre de réduire les émissions de CO2 de 50 000 à 70 000 t par an, lorsque les moteurs fonctionnent au méthanol vert.
80 à 90 jours de travaux
Les travaux devraient durer de 80 à 90 jours par navire et commencer au premier trimestre 2026.
Selon Hapag-Lloyd, l'investissement total est estimé à environ 120 M$ pour les cinq unités. De source professionnelle, au vu du prix consenti par navire, d'autres travaux sont prévus. Les deux armateurs mentionnent dans leur communiqué une « conversion et modernisation », ce qui suggère que les hélices, les étraves à bulbe et autres pourraient être modernisées dans le même temps.
Adeline Descamps