De rumeurs en spéculations. De révélations en annonces officielles. Le bruit autour d’une probable réorganisation stratégique de Maersk enflait de jour en jour. Le danois y a mis un terme en présentant un nouveau plan stratégique, visant « l'efficacité et la compétitivité du groupe ». Entre 26 000 et 27 000 postes pourraient être affectés par les ajustements. Les marques Safmarine et Damco auront disparu d'ici la fin de l'année…
Par un communiqué en date du 2 septembre, Maersk a coupé court à un feu-follet médiatique parti d’un courrier interne annonçant des licenciements, des changements de gouvernance, des réorganisations de marques. Dans une communication plus officielle, le danois fait pour sa part état de « changements stratégiques qui amélioreront l'expérience du client et la prestation de services de bout en bout ».
Le leader mondial du transport maritime accélère donc la cadence pour achever la mue du conglomérat auparavant diversifié en un groupe recentré sur le transport maritime de conteneurs, les services portuaires et la logistique terrestre. Sans doute aussi Søren Skou, à la direction de Maersk depuis 2016, presse-t-il le pas pour donner des gages aux investisseurs en quête de rendements plus élevés et de meilleurs résultats financiers. La discipline financière observée depuis son arrivée peine à porter ses fruits. Et le cours de l’action n’a retrouvé de la vigueur qu’en mars, à la faveur de la présentation des premiers résultats bénéficiaires.
Le dirigeant de Maersk Drilling se veut rassurant
Chasse aux coûts de gestion
Depuis 2016, A.P. Møller – Maersk s'est lancé dans une vaste restructuration en vue de filialiser ou céder bon nombre de ses activités pétrolières (Maersk Tankers, Maersk Oil et Maersk Drilling). La vente en 2017 de sa division pétrolière à Total, l’introduction en bourse de Maersk Drilling, l’intégration de Hamburg Süd et la réorganisation de l'entreprise en une structure intégrée ont déjà permis de dégager plus d’1 Md$ en synergies de coûts. Pas assez manifestement.
Dans cette dernière étape, l’attention semble se focaliser sur l'activité principale, à savoir la division Ocean (transport maritime et quelques terminaux portuaires stratégiques) et le secteur logistique. Ainsi dans le courrier sorti incidemment des enceintes de l’entreprise, le devenir du transporteur Safmarine et du commissionnaire de transport Damco est-il évoqué.
Finalement, A.P. Moller-Maersk ne cédera pas Maersk Supply Service
Fin de l’aventure indépendante de certaines unités
Dans le cadre de ce remaniement, Damco et Safmarine seront intégrés à Maersk et leurs marques disparaîtront progressivement entre octobre et la fin de l’année, a déclaré Maersk dans son communiqué. Il y a deux ans, dans une opération similaire, une grande partie de Damco avait été intégrée à la compagnie maritime. Le processus s’était accompagné de suppressions de postes.
Les produits Air & LCL de la société de logistique Damco seront intégrés à l'activité logistique de Maersk. Quant à Safmarine, concentrée sur l'Afrique du Sud, elle fait partie du groupe Maersk depuis 1999, mais opérait sous son propre nom. Maersk souhaite cette fois atténuer son ancrage régional africain, ce qui légitimait jusqu’à présent le maintien de la marque.
AP Møller Maersk rend grâce à Hamburg Süd
Équipes centrées sur le client
L’organisation d'Ocean & Logistics sera en outre simplifiée. À cet égard, la compagnie Hamburg Süd, que Maersk a filialisée en 2017, est dans le viseur. Au moment de l'acquisition, l’acquéreur avait insisté sur le fait que ce serait une erreur de repeindre les navires de la flotte du transporteur d’outre-Rhin en bleu. La compagnie allemande continuera d’opérer sous sa marque mais il est question d’intégrer le back office de Hamburg Süd à celui de Maersk « pour avoir des équipes plus centrées sur le client ».
Maersk brave la crise sanitaire au 2e trimestre
Revers de la médaille
Les jours de certaines sociétés en tant qu'unités indépendantes étant comptés, les répercussions sur les emplois du groupe sont difficilement maîtrisables. « La simplification de l’organisation aura malheureusement un impact sur les emplois en raison des doublons et des rôles qui ne seront plus nécessaires », indiquait le directeur commercial Vincent Clerc dans le courrier aux employés, vu par Reuters. Entre 26 000 et 27 000 sur les 80 000 employés pourraient être affectés par la restructuration. Hamburg Süd emploie 4 500 personnes, Damco et Safmarine 2 300 et 1 200 personnes respectivement, selon Maersk.
La réorganisation annoncée par Maersk ne serait donc pas imputable au Covid – que les transporteurs ont affronté avec un aplomb déroutant – mais répondrait davantage à une volonté de rationaliser l'organisation, source d’économies en termes de gestion. Objectif : efficacité à bord…
Adeline Descamps
