Nouvelles rumeurs autour du méthanol, qui s’y prête décidément bien. Selon Alphaliner, Maersk serait en pourparlers avec des « chantiers asiatiques » pour une nouvelle série de porte-conteneurs au méthanol d'une capacité de 7 000 à 8 000 EVP.
Une taille au demeurant de plus en plus populaire auprès des armateurs au vu du carnet de commandes des navires de cette taille qui compte quelque 120 unités, dont près de la moitié à double carburant avec le GNL.
Maersk revient en tête
Cette série permettrait à Maersk de revenir en tête pour ce qui est de la flotte future de méthanol avec 375 000 EVP en commande devant CMA CGM (316 000 EVP). Le carnet de commandes pour le méthanol de Maersk compte, lui, actuellement 19 navires. Le dernier contrat porterait donc sa flotte à 29 unités.
Jusqu’à présent, les chantiers du Hyundai Heavy (HHI) ont été destinataires des contrats de Maersk. Le Sud-coréen est déjà le constructeur des huit premiers commandés de 16 200 EVP en août 2021 dont la livraison est prévue en 2024 et 2025. Maersk avait ensuite exercé son option pour quatre autres en janvier 2022. Il lui a ensuite confié la dernière commande d’octobre portant sur six de 17 000 EVP. L'ensemble avait été précédé, en juillet 2021, d’un feeder, confié à Hyundai Mipo Dockyard (HMD).
Lorsqu’ils seront livrés, tous d’ici 2025, les porte-conteneurs, sous pavillon danois, remplaceront du tonnage ancien.
336 000 EVP dans le carnet
Ce statut de leader ne devrait pas tenir longtemps, CMA CGM étant ces derniers temps particulièrement entreprenant en commandes. Même si la théâtralisation de la dernière, orchestrée à l'occasion de la visite du président Macron en Chine, n’est que l’officialisation d’actes déjà passés comme le JMM l’a souligné immédiatement.
Si l’on tient compte uniquement de ce qui est confirmé – douze unités de 15 000 EVP (répartis chez Jiangnan et Dalian) et les douze navires de 13 000 EVP (janvier, Hyundai Samho), soit 24 porte-conteneurs –, CMA CGM disposerait d’une flotte en commande totalisant 336 000 EVP.
Prix unitaire surprenant autour de 115 M$
Progressivement, le surcoût généré par ces navires verts devrait être absorbé par le nombre de commandes. Il semblerait que ce soit déjà le cas. Le prix unitaire de ces nouvelles commandes est estimé autour de 115 M$ par Alphaliner, ce qui est étonnamment peu. Alors que le numéro deux mondial de la ligne régulière avait payé 177 M$ pour chacune des huit premières unités, que l’affaiblissement du won coréen a ensuite réduit à 175 M$.
Maersk avait indiqué, lors de sa dernière prise de commande, que les dépenses d'investissement supplémentaires, comparés aux porte-conteneurs conventionnels (fuel lourd), sont désormais de l'ordre de 8 à 12 %, « ce qui représente une amélioration par rapport à la précédente commande », ajoutait la compagnie. À l'époque, le transporteur avait en effet évoqué un surcoût de l'ordre de 10 à 15 %.
Défi de l’avitaillement
Si le coût de construction est un critère, le défi majeur reste celui de l’avitaillement de sa future flotte. Les dix-neuf navires au méthanol vert que Maersk mettra en service entre 2023 et 2025 nécessiteront environ 750 000 t de méthanol vert.
Depuis de longs mois, l’armateur s’y emploie et bétonne son réseau avec des contrats d’achat long terme. Il s'est associé en mars 2022 à six sociétés, fournisseurs d’énergies, pour sécuriser au moins 730 000 t de méthanol par an d’ici 2025. Sachant que la consommation de ses douze premiers porte-conteneurs de 16 000 EVP est estimée à 360 000 t par an. Pour son feeder, son premier geste inaugural, Maersk a contracté avec Reintegrate, filiale du groupe danois d’énergies renouvelables European Energy, qui sera en mesure de lui assurer 10 000 t d'e-méthanol, de source solaire.
La compagnie a par ailleurs investi dans WasteFuel, qui produit du bio-méthanol et biogaz à partir des déchets agricoles et ménagers. L’entreprise californienne aurait la capacité de fournir à Maersk environ 300 000 t par an à partir de 2024 à partir d'un projet de bio-méthanol développé en Amérique du Sud. Mais dans l’absolu, l’offre de biomasse est limitée car elle entre en concurrence avec les demandes d’autres secteurs.
En août dernier, le danois a conclu un accord avec le chinois Debo Energy portant sur l’achat de 200 000 t par an alors que la production sera lancée en septembre 2024.
En décembre, il a signé un neuvième contrat d’achat avec la société américaine SunGas Renewables.
Mise à l’eau du feeder
Dans le même temps, Maersk a assisté à la première mise à l’eau opérée chez Hyundai Mipo Dockyard de son très attendu feeder hybride de 2 100 EVP de 172 m de long et 32,2 m de large (13 rangées), qui pourra carburer au VLSFO ou au méthanol. Le navire source, qui a ouvert la voie aux autres commandes, est sorti de la cale sèche la semaine dernière
Sa livraison prévue pour juin, il devrait entrer en service dans le courant de l'année sous le nom de Laura Maersk et sera déployé sur des services baltiques.
Le navire classe glace sera propulsé par un moteur principal MAN B&W - 6G50-LGIM et bénéficie une vitesse de 18 nœuds.
Il figure parmi les premiers à recevoir la nouvelle livrée d'entreprise blanc sur bleu de Maersk, ainsi que l'inscription « all the way to zero » sur la coque.
Quatre contrats de construction pour Cosco
Cosco vient également de signer quatre autres contrats de construction « méthanol » de 16 000 EVP (366 m de long et 51 m de large) au chantier du groupe chinois, Shipping Heavy Industries Yangzhou (CSHIY), qui devrait délivrer entre mi-2025 et fin 2025 ou début 2026. La commande porte sur un mix entre des « ready for » et des doubles carburations. Mais seul le quatrième de la série est conçu pour fonctionner au méthanol dès le premier jour, les autres pourront être configurés le cas échéant.
Aucun prix n’a été délivré. Avec les quatre coques récentes, le carnet de commandes du constructeur chinois est passé à 49 navires et 929 000 EVP, dont 23 mégamax par ses chantiers navals jumeaux Dacks et Dacks. Cosco Shipping/OOCL attendent douze navires au méthanol de 24 000 EVP.
Prime aux carburants alternatifs
En février, les navires avec des carburants alternatifs atteignaient 40 % du carnet de commandes, selon Alphaliner, avec 198 navires au GNL (représentant une capacité de 2,31 MEVP), ce qui équivaut à un peu moins de 30 % du carnet de commandes (25 % en février 2022).
Les unités à double carburant au méthanol ont progressé à un rythme plus rapide encore, se comptant désormais au nombre de 68 porte-conteneurs (0,93 MEVP). Ce segment représentait, en février, 12 % du carnet de commandes en termes de capacité contre moins de 1 % il y a un an.
Dans le même temps, seuls 14 % de la capacité commandée au cours du second semestre 2022 portaient sur des motorisations au fuel et plus que 8 % sur les deux premiers mois de l'année.
Adeline Descamps
Carnet de commandes méthanol : le match entre CMA CGM et Maersk
Le « carnet de commandes méthanol » de CMA CGM compte actuellement 24 navires et environ 336 000 EVP si l’on considère les contrats pour douze unités de 15 000 EVP répartis entre CSSC Jiangnan, CSSC Dalian, et les douze de 13 000 EVP auprès de Hyundai Samho.
Celui de Maersk comprend 19 unités pour un peu moins de 300 000 EVP : le feeder inaugural de 2 100 EVP, sorti de cale sèche, les douze navires de 16 200 EVP auprès de Hyundai Heavy et la dernière commande d’octobre portant sur six de 17 000 EVP chez Hyundai Heavy (HHI).