À l’issue de la rencontre du cabinet de la ministre de la Mer Annick Girardin avec les compagnies transmanche le mardi 15 septembre, le Premier ministre Jean Castex a annoncé dans la soirée à l’Assemblée nationale « un effort exceptionnel » en faveur des compagnies françaises du ferry.
« Je vous annoncer aujourd’hui que le gouvernement a accepté de faire un effort exceptionnel pour sauvegarder Brittany ferries et les autres, a indiqué, solennel, le premier Ministre Jean Castex à l’Assemblée nationale le 15 septembre. Pour le long terme, nous avons saisi, avec Bruno Le Maire, le Comité interministériel de restructuration industrielle afin de prendre des mesures structurelles dont nous continuons à discuter. Mais d’ores et déjà, pour passer ce cap extrêmement difficile, nous avons décidé de rembourser l'intégralité des cotisations salariales (Énim et Urssaf, NDLR), comme le demandent les professionnels, pour les versements de l’exercice 2021 ».
La communication était attendue de la part du ministère de la Mer, Annick Girardin ayant depuis plus d’une semaine pris date et mot en annonçant une rencontre prochaine avec les « différents opérateurs transmanche Brittany Ferries et DFDS pour aborder avec eux les conditions de leur reprise d’activité et d’un maintien de l’emploi pour les salariés » et en promettant un engagement quel qu’il soit : « l’État sera au rendez-vous ».
Mobilisation française autour du ferry
L’État vient donc de s’engager à hauteur d’une valeur de 15 M€ pour la seule compagnie de Roscoff, Brittany Ferries, et un montant similaire pour les « autres », « qui reste à affiner ». Un « travail structurel » va désormais s’enclencher avec l’ensemble des acteurs. Mais, plastronne le premier Ministre, « nous aurons dans l’immédiat permis de dégager l’horizon ». Quant aux « autres » évoquées, il s’agit des compagnies de transport maritime de passagers opérant à l'international et hors délégations de service public en toute logique.
« Cette mesure est un premier pas mais ne suffit pas. L'enjeu est clairement de sauver Brittany Ferries par des mesures fortes, inscrites dans la durée, à la hauteur d'une situation exceptionnellement difficile. La réglementation européenne le permet. Là où l'État n'annonce que 15 M€ en 2021 nous confirmons, Régions Bretagne et Normandie, notre engagement à contribuer au plan de sauvetage à hauteur de 85 M€. Nous soumettrons le dossier à nos assemblées dès le mois d'octobre », ont réagi dans un communiqué commun Loïg Chesnais-Girard et Hervé Morin, présidents des deux régions concernées.
Brittany Ferries suspendue à une réaction de l'État
Dossier stratégique
Cela fait quelques jours que les élus régionaux et locaux font du bruit pour placer en haut de la pile un dossier qu’ils estiment relever de la « défense du pavillon France » et du stratégique « pour assurer la présence de la France sur le transmanche ». Et ainsi éviter le naufrage de la compagnie qui à l'heure actuelle emploie 2 400 marins français.
À peine sortie du confinement, la compagnie présidée par Jean-Marc Roué s’est pris une seconde vague scélérate avec la décision du premier Ministre britannique d’instaurer une quarantaine qui a dissuadé nombre de ses ressortissants de traverser la Manche. La décision de Boris Johnson, annoncée sans préavis, s’est matérialisée pour Brittany Ferries par 65 000 annulations et reports instantanés pour septembre et octobre.
La société, qui n’a obtenu l’autorisation de réarmer ses navires que fin juin, avait déjà dû se contenter d’une fréquentation en jauge basse, en recul de 70 % sur les mois de juillet et août par rapport à l'été dernier (200 000 passagers contre 780 000 un an plus tôt). La crise sanitaire devrait se matérialiser par une perte sur ses résultats de l’ordre de 130 M€.
« Jean Castex a choisi une aide sur le court terme. Un an. Pour passer les élections régionales ? », a mordu Jean-Marc Roué, en réaction à l’annonce sur son compte twitter. Le président de Brittany Ferries souligne que les compagnies ont besoin d’une aide pérenne et indique au passage que l'abattement était tout à fait compatible avec une durée de cinq ans, correspondant à l’échéance du prêt garanti à l’emploi auquel a eu recours l’entreprise à hauteur de 117 M€.
Les plans sociaux se multiplient dans le ferry européen
Vieille lune
Il faut rappeler à propos des nouvelles dispositions annoncées, qui ne font visiblement pas l'unanimité hormis chez les députés de la majorité, qu'elles ne font que reprendre celles déjà adoptées en février 2016 mais jamais appliquées quand Alain Vidalies était ministre des Transports. Le net wage, en français le salaire net, prévoyait en effet une exonération des charges patronales pour les marins et gens de mer employés par les armateurs de navires de commerce battant pavillon français et soumis à la concurrence internationale.
Adeline Descamps – Gérard Le Brigand