Le Lloyd's Register exclue à son tour l'armateur indien de pétroliers Gatik Ship Management

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Après la société de classification ABS, le P&I American Club et le registre Saint-Kitts-et-Nevis, le Lloyd's Register retire à son tour ses services à Gatik Ship Management. L'armateur indien est devenu l'un des plus actifs transporteurs de brut russe vers l'Inde au moyen d'une flotte clandestine.

Les ennuis continuent de pleuvoir sur l’indien Gatik ship management, l'un des principaux acteurs impliqué dans le transport de pétrole russe vers l'Inde. Au premier trimestre, la société indienne a acheminé plus de 2,7 Mt de produits pétroliers russes.

Pays plus sensible au prix qu'aux règles de la diplomatie, l'Inde, qui importe 85 % du pétrole que le pays consomme, profite largement du pétrole de l'Oural à prix décoté par rapport au Brent depuis l'invasion de l'Ukraine par le Kremlin.

La Russie, qui ne figurait pas parmi ses fournisseurs habituels, est depuis passée devant l'Irak, l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les États-Unis, représentant désormais 30 % de ses importations. Les deux grands raffineurs indiens – Reliance et Nayara –, se partagent environ la moitié du volume.

58 navires en 18 mois

Gatik ship management fait partie de ces sociétés qui, en peu de temps, se sont constituées une importante flotte de navires-citernes en acquérant sur le marché de l'occasion de vieux navires, dont on connait le rôle au sein de la flotte fantôme, opérant dans des conditions d'assurance et de propriété opaques.

Depuis décembre 2021, avec une flotte de 53 pétroliers ((37 100 à 318 100 tpl) d'une valeur de 1,5 Md$ (selon VesselsValue), l'armateur est devenu le plus important armateur de la flotte clandestine mondiale. Les Aframax et les LR2 ont concentrès près de moitié des achats.

La guerre en Ukraine, et les sanctions qui s’en sont suivies – embargo maritime de l’UE sur le pétrole et les produits pétroliers, et plafonnement du brut par la coalition G7, UE et Australie –, ont crée un appel d’air auprès de nouveaux acteurs sur le marché, motivés par les primes offertes par le transport de cargaisons sanctionnées, que les propriétaires traditionnels ne sont plus disposés à transporter.

Désertion des sociétés de classification occidentales

D'après Reuters, le Lloyds Register envisage à son tour de retirer ses certificats à 21 pétroliers de l'opérateur de Mumbai en raison d'un non-respect présumé de plusieurs mesures relevant des sanctions internationales. Une fois les faits avérés par les autorités compétentes, a indiqué la société dans un communiqué, elle retirera ses services « à tout navire dont il [aura] été constaté une infraction aux sanctions internationales ».

Cette décision intervient alors que le P&I American Club a fait savoir en avril qu'il ne couvrait plus la flotte de Gatik sans toutefois en préciser le nombre ni la raison (34 navires étaient assurés chez l'Américain). L'assureur russe Ingosstrakh a également déclaré qu'il allait cesser toute relation avec Gatik.

Le registre de Saint-Kitts-et-Nevis, basé au Royaume-Uni, a dans le même temps retiré son pavillon à 36 navires.

Effet boule de neige

Ces retraits successifs témoignent certes d'une surveillance accrue de la part des prestataires occidentaux de services maritimes sans lesquels le navire ne pourrait pas naviguer mais aussi des failles du système au vu de la facilité avec laquelle les propriétaires et les exploitants de navires y dérogent et  trouvent les documents nécessaires pour naviguer. 

Pour rappel, dans le cadre des sanctions, les sociétés occidentales ne peuvent fournir leurs services que si le pétrole russe est vendu à un prix plafond de 60 $ le baril.

Substitutions

La flotte de Gatik a trouvé refuge auprès de la société indienne IRClass pour la classification depuis la mi-mars et les registres du Gabon et de la Mongolie pour l'immatriculation.

Ce dernier est très mal noté par le Memorandum of Paris (MoU), qui s’assure de la conformité, en termes de sécurité, de protection de l’environnement et de conditions de travail, aux sept grandes conventions internationales de l'Organisation maritime internationale (OMI) et de l'Organisation internationale du travail (OIT).

Les conditions de navigation de la flotte fantôme sont dans le collimateur de Bruxelles notamment pour ces raisons. En cas de sinistre en mer, les réparations et indemnisations ne seraient pas garanties.

Des liens entre Rosneft et Gatik

Selon le Financial Times, Rosneft, principal client de Gatik, se serait affairé pour que l'armateur indien puisse transporter son propre pétrole. Le nom du PDG de Rosneft, Igor Sechin, apparaît en effet dans plusieurs opérations commerciales en lien avec Gatik au travers de sociétés écrans.

Adeline Descamps

 

Pétrole : de nouveaux acteurs sur le marché prospérant sur le transport du brut russe sanctionné

Gatik n'est pas le seul nouvel acteur sur le marché des pétroliers ayant permis au pétrole russe de continuer à circuler, avec très peu d'impact des sanctions.

Fractal Marine Shipping, basée à Genève et enregistrée aux Émirats arabes unis, a constitué une flotte de 27 navires depuis mars 2020, dont 26 ont été achetés depuis mai 2022. Les navires achetés sont âgés de 9 à 14 ans, l'âge moyen des navires achetés étant de 17 ans. Les aframax et LR2 constituent la majorité de sa flotte (42 %) devant les LR1 (23 %) et les MR (19 %). R

Radiating World Shipping, basé aux Émirats arabes unis, a acheté son premier navire en décembre 2022. Depuis, la société a acquis un total de 12 pétroliers, dont 6 aframax et 6 MR, d'un âge moyen de 17 ans.

Aussi, toujours selon VesselsValue, 43 ventes de pétroliers ont été signalées depuis le début de l'année, dont l'idendité des acheteurs n'est pas connue, contre seulement neuf pour la même période de 2022. Ces navires ont un âge moyen de 18 ans.

A.D.

 

 

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