La coopération entre Maersk et Hapag-Lloyd démarre avec un boulet administratif

Rolf Habben Jansen (HLAG), Vincent Clerc (Maersk)

Rolf Habben Jansen (Hapag-Lloyd) et Vincent Clerc (Maersk) doivent partager navires et stratégie à compter de février 2025.

Crédit photo ©Pixel pour le JMM
Simple procédure ou défiance ? L'autorité américaine de réglementation du transport maritime demande aux futurs partenaires de l'alliance Gemini des éclaircissements pour pouvoir apprécier les incidences sur la concurrence. Si Maersk et Hapag-Lloyd banalisent la demande de la FMC, elle intervient dans un contexte tendu sur le sujet crispant des accords entre transporteurs.

Le régulateur américain a besoin d'informations supplémentaires avant d'agréer la future alliance entre Maersk et Hapag-Lloyd, a fait savoir la Federal Maritime Commission (FMC) aux deux intéressés. L'autorité américaine de réglementation du transport maritime estime que les informations fournies ne sont pas suffisamment détaillées pour permettre une analyse complète des incidences éventuelles de la coopération Gemini sur la concurrence.

Maersk et Hapag-Lloyd – numéros deux et cinq mondiaux de la ligne régulière –, avaient créé la surprise en annonçant en janvier dernier leur future coopération à partir du mois de février 2025 sur la plupart des lignes Est-Ouest. La nouvelle alliance, qui consiste à partager des navires et une stratégie commune, consolidera une capacité de 3,4 MEVP, fournie à 60 % par Maersk et à 40 % par Hapag-Lloyd.

Dans ce cadre, Hapag-Lloyd sortira donc de THE Alliance dont il était membre aux côtés de ONE, HMM et Yang Ming (laissant ses partenaires avec une capacité de 2,3 MEVP). La rupture entre Maersk et MSC au sein de 2M a, quant à elle, été révélée début 2023 et sera effective à compter de janvier 2025 (2,71 MEVP partagés l'an dernier).

Une alliance revendiquée différente

Mais la spécificité revendiquée de la nouvelle alliance baptisée Gemini n'est pas dans le déballage de navires et de parts de marché acquises à coups d'EVP. Mais dans une garantie de fiabilité des horaires supérieure à 90 %. Pour ce faire, le nouveau partenariat repose sur un concept de hub & spoke, s'articulant autour « d'un réseau efficace de lignes principales, complété par des navettes dédiées, qui escaleront dans les hubs portuaires clés pour pouvoir y effectuer des opérations de transbordement côte à côte », avait détaillé Rolf Habben Jansen le PDG d'Hapag-Lloyd au cours d'une conférence de presse.

Le réseau en étoile, tel qu’il est proposé, prévoit ainsi un nombre limité d'escales (300 touchés) dans des ports pivots quasi exclusivement sous leur contrôle de façon à en maîtriser la planification et à garantir leur productivité, d’où leur engagement d’horloger. Les navires mères n’escaleront donc plus dans certains ports, lesquels seront desservis par des « shuttle ». Ces navettes, au nombre de 57, seront de plus grande capacité qu’un feeder classique (5 000 à 6 000 EVP) et en mesure de parcourir de plus longues distances (liaisons régionales).

Report d'agenda

La nouvelle alliance, qui doit encore recevoir l'approbation réglementaire des autorités antitrust concernées, démarre donc avec un boulet administratif au pied et peut-être un décalage dans le temps.

Les dirigeants de Maersk et Hapag-Lloyd ont rapidement balayé l'idée en indiquant que « la procédure » d'instruction n'avait rien d'anormal et que la coopération ne devait pas démarrer avant février 2025. Comprendre : aucun impact sur leur agenda.

L'approbation de l'autorité de régulation du transport maritime aurait dû intervenir 45 jours après la demande, soit le 15 juillet puisque le dossier a été déposé le 31 mai pour Gemini. « Le réexamen de l'accord ne commencera pas tant que la commission n'aura pas reçu une réponse entièrement conforme à son enquête », précise la FMC. Une fois les éléments reçus, elle disposera d'un délai supplémentaire de 45 jours pour l'examiner avant que le dépôt ne devienne effectif », souligne l'administration américaine.

Alliances sur le grill

Si les deux futurs partenaires se montrent confiants en banalisant la requête, elle intervient dans un contexte où les accords de coopération entre transporteurs font débat, en particulier aux États-Unis. Outre-Atlantique, le chaos dans l'organisation des services durant la pandémie a incité les autorités, sous la pression des chargeurs, à renforcer l'examen des pratiques commerciales. Les clients américains des transporteurs ont accusé ces derniers d'user de leur pouvoir de marché pour gérer les capacités à leur profit et dans un sens lucratif.

Concentration de pouvoir

Le secteur s'est tellement consolidé ces dernières années que plus de 80 % des capacités se trouveraient contrôlés par moins de dix transporteurs, selon les différentes études. Les alliances ont été autorisées parce que, de la coopération opérationnelle devaient découler une meilleure qualité de service et des prix plus compétitifs.

En octobre 2023, l'Union européenne, qui renouvelle en principe tous les quatre ans cet affranchissement aux règles anticoncurrentielles prévalant au sein du marché commun, a annoncé qu'elle suspendait cette autorisation à compter d'avril de cette année. La décision a fait l'effet d'un arc électrique chez les transporteurs.

Adeline Descamps

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