La présence d’un industriel, Nouryon, qui rejette 3 000 t d’hydrogène, place le Grand port maritime de Bordeaux en tête de pont pour des projets de valorisation de l’hydrogène comme vecteur énergétique. Deux années d’études, financées à 50 % par l’Europe, vont démarrer dès ce mois de septembre.
Engagé depuis plusieurs années déjà dans des démarches de transition énergétique, le port de Bordeaux possède un atout : l’industriel Nouryon installé sur la presqu’île d’Ambès, importateur portuaire de 15 000 t de sel par an. Cette société produit, à partir d’un procédé d’électrolyse, du chlorate de sodium utilisé ensuite dans le blanchiment de la pâte à papier. Ce process génère en parallèle 3000 t d’hydrogène par an qui, pour l’heure, sont rejetés dans l’atmosphère et donc « perdus ». Alors que toute la problématique du développement de ce vecteur énergétique repose sur sa production et son coût, les tonnes d’hydrogène de Nouryon font office d’aubaine. Pour autant, se posent à l’autre bout de la chaîne toutes les questions d’usage et de consommation.
L'Europe lance son plan pour de l'hydrogène « propre »
750 K€ d’études cofinancées
Le GPMB, Storengy et Nexeya se sont associés afin d’explorer tous les potentiels de ce carburant star. Leur projet d’études, dénommé « H2 Bordeaux » a touché juste. Il vient en effet d’être sélectionné dans le cadre d’un appel à projets s’inscrivant dans le programme européen CEF (Connecting Europe Facility) et piloté par l’agence Inea. D’un coût global de 750 K€, cofinancées à hauteur de 50 % par l’Europe, les études se dérouleront sur deux années.
La filiale d’Engie, Storengy, spécialiste du stockage souterrain de gaz naturel, va s’atteler au potentiel de l’hydrogène fatal de Nouryon : comment le stocker, le purifier, le redistribuer, dans quel contenant, sous quelle forme... Nexya, filiale du groupe Hensoldt pour la conception et maintenance de systèmes électroniques complexes, œuvrera sur un projet de barge multi-usages, stationnaire ou ambulante, qui pourrait faire office de « stations-services à hydrogène », capables de fournir de l’électricité, par exemple pour des pompes des formes de radoub ou des bateaux à quai.
Mobilisation générale autour de l'hydrogène
80 000 € d’investissements du port de Bordeaux
Quant au GPMB, qui investit en propre 80 000€ dans ce dossier, il s’attachera à évaluer la pertinence des autres usages de l’hydrogène notamment pour les équipements portuaires. « Pour l’instant, il n’y a pas d‘offres catalogue pour convertir des engins existants – grues, cavaliers, charriot élévateur... – à l’hydrogène », analyse Michel Le Van Kiem. Le chef du département Innovation au GPMB indique que la piste du retrofit sera également explorée. Autant de solutions qui, à l’avenir, pourraient être réutilisables pour d’autres ports. « L’enjeu repose également sur les piles à combustibles. Leur utilisation n’est pas certifiée pour un usage maritime, contrairement au terrestre. Il faut franchir cette étape », ajoute Michel Le Van Kiem, pour qui, le plan de relance annoncé début septembre par le gouvernement, offre l’opportunité de concrétiser, une fois les études réalisées, des projets plus rapidement.
Marianne Peyri
Bordeaux, le marché naissant de l’hydrogène
Nouvelle étape vers l'alimentation en hydrogène des navires ?
HDF : Des piles ultra-puissantes pour le maritime
La société girondine Hydrogène de France a postulé à l’appel à manifestation d’intérêt lancé cet été par la métropole bordelaise pour la réindustrialisation du site Ford à Blanquefort. Cet acteur de l’hydrogène, qui par ailleurs multiplie des projets de centrales à combustibles à l’international, porte un investissement de 15 M€ pour créer à Blanquefort une usine de fabrication de méga-piles à combustible, de plus de 1 MW.
Destinées initialement à équiper des centrales et au stockage d’énergies renouvelables, les méga-piles pourraient également être maritimisées. C’est l’objet du partenariat entre HDF et le géant suisse de l’électrotechnique ABB Marine &Ports.
Damien Havard, président de HDF, s’intéresse aussi au développement de la filière. Un projet en cours avec le Port de Bordeaux et l’architecte naval CLYD vise à équiper des bateaux en piles à combustible et « faire de Bordeaux un centre de compétences dans ce domaine ».