Les situations évoluent vite en mer Noire et d’Azoz, là où se concentrent sur un plan maritime les problématiques pour les opérateurs de navires qui persistent à transiter dans ces eaux à hauts risques.
Depuis mi-juillet et le retrait de la Russie de l’accord céréalier, les infrastructures portuaires et silos essuient des salves de tirs. Les ports du Danube d'Izmail et de Reni, sur la rive ukrainienne, ont également été ciblés mais sans être bloqués.
La Russie et l'Ukraine ont expressément averti qu'elles considéreraient les navires de l'autre partie, dans la région, comme des bâtiments militaires. Les navires étrangers se trouvent ainsi exposés aux tirs de missiles, attaques de drones et à la présence de mines flottantes dans la partie nord-ouest de la mer Noire. Autant de risques susceptibles de renchérir les primes d'assurance contre les risques de guerre.
Un itinéraire alternatif
Depuis début août, Kiev travaille à la mise en œuvre d’un corridor alternatif pour permettre aux navires bloqués dans ses ports depuis de longs mois de sortir et partant, de poursuivre les expéditions de céréales sur lesquelles repose un pan du commerce extérieur du pays.
Si la route a été enregistrée auprès de l'Organisation maritime internationale (OMI) et le Conseil de l’ONU a reconnu son droit international à la libre navigation commerciale, elle reste un corridor sans protection négociée.
Six navires bravant l'interdit russe
Depuis, six navires – un porte-conteneurs et cinq vraquiers – , ont emprunté avec succès ce couloir mettant à l'épreuve la détermination russe à bloquer le passage des navires marchands.
Le 19 septembre, le Resilient Africa a été le premier vraquier à quitter le port ukrainien de Chornomorsk, au sud-ouest d'Odessa. Selon ses données de navigation, le navire de 3 276 tpl, appartenant à des intérêts turcs (HDR Denizcilik), chargé de 3 000 t de blé, va transiter par les eaux roumaines et bulgares pour rallier Israël.
Le vice-premier ministre ukrainien, Oleksandr Kubrakov, avait indiqué l’arrivée de deux vraquiers, le Resilient Africa et l’Aroyat, un navire de 18 315 tpl en provenance du port turc de Diliskelesi. « Ils sont prêts à charger près de 20 000 t de blé à destination de l'Afrique et de l'Asie. Les navires battent pavillon de Palau et leur équipage est composé de marins de Turquie, d'Azerbaïdjan, d'Égypte et d'Ukraine », avançait le représentant du gouvernement sur les réseaux sociaux.
Ce 21 septembre, l’Aroyat, également lié à un propriétaire turc (Kiva Marine), était toujours à quai dans le port ukrainien.
Des candidats aux risques
Il reste à voir s'il y aura d'autres candidats à l'aventure, les deux défis consistant à trouver les marins disposés à naviguer dans de telles conditions et une assurance pour couvrir un risque de guerre.
Le gouvernement ukrainien est prêt, sur ce point, à assumer un premier niveau de garanties. Il avait déclaré début septembre être en négociation avec des compagnies d'assurance et une banque publique locale.
Des sources d'assurance sur le marché londonien ont confirmé auprès de TradeWinds qu’un accord reposant sur un partage des risques était en train d'être négocié avec l'assureur Marsh.
La couverture du risque de guerre porterait sur une période critique de 10 heures de navigation entre la frontière roumaine sur le Danube et les ports ukrainiens, y compris l’attente et le chargement et le voyage de retour. Dans ces conditions, les assureurs privés pourraient offrir une couverture moins chère qu'ils ne peuvent le faire actuellement, sans en perdre le bénéfice commercial.
« Le diable est dans les détails et il y a beaucoup de détails », a confié Frédéric Denèfle, le président de l'IUMI, au Lloyd's,
Point de départ d'un trafic régulier ou opérations qui resteront isolées, les assureurs n'ont pas la réponse. Mais le marché de l'assurance contre les risques de guerre suit l'évolution de la situation de près, a assuré Frédéric Denèfle.
Adeline Descamps
Cet article fait partie d'une série sur les nouveaux risques maritimes
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