Les perspectives à court terme pour le secteur du vrac sont positives et c'est en soi une bonne nouvelle, a résumé Ian Adams, directeur général de l'Association of Bulk Terminal Operators en clôture de leur conférence annuelle Bulk Terminals, à Hambourg. D'autres indicateurs confirment ...
Le vrac sec doit revenir de loin pour que le secteur s'enorgueillisse d'une croissance autour de 3 à 4 %. L’année devrait se terminer dans une sphère positive avec, peu ou prou, la même « performance » que l’an dernier. Le minerai de fer et le charbon resteraient, selon l’association, les moteurs du marché. La croissance du premier (+ 2 %) a été soutenue depuis le début de l'année par la production des industriels brésiliens et australiens, et beaucoup moins par ceux de la Chine. Mais c'est le charbon qui est le principal ingrédient de la reprise, avec une augmentation de 7 % des importations chinoises et de 6 % des importations indiennes. Des données qui contrastent fortement avec la faible dynamique européenne. Ainsi la Chine, l'Inde, le Japon et la Corée importent-ils environ 900 Mt de charbon par an, alors que les deux plus gros marchés européens - le Royaume-Uni et l'Allemagne – ont réceptionné environ 110 Mt/an. Pourr rappel, l'Allemagne tire son énergie à 36 % des sources renouvelables.
Autre actif précieux de la convalescence, la croissance de la flotte qui fut modérée. Mais il reste des entraves de taille : les conflits commerciaux ouverts entre la Chine, les États-Unis et l'UE, dont les restrictions ici et là font et feront des gagnants et des perdants. Car les opportunités de court terme ne le sont pas automatiquement à plus long échelle, toutes barrières commerciales étant généralement négatives à long terme, a-t-on entendu dans les couloirs de la conférence annuelle fin octobre. Ainsi, dans l’immédiat, si les fournisseurs sud-américains de soja profitent des tensions entre la Chine et les États-Unis, il y a de fortes chances pour que la Chine n'aie d'autre solution à échéance plus lointaine que de basculer à nouveau vers le continent nord-américain.
Changement de production en Chine
Ces « humeurs » confirment plus ou moins un rapport publié en septembre par la plus grande association internationale d'armateurs et propriétaires de flottes, BIMCO, qui pointait un net redressement des taux de fret mais qui ne régalent pas tous les segments du transport maritime. Si les navires de type Capesize ont connu un début d'année faible, ils auraient ensuite enregistré un niveau élevé jamais vu depuis mars et novembre 2014 sans pour autant atteindre les sommets de 2012, indique l'organisation représentant les armements. Les exportations américaines de charbon (10 Mt par exemple en avril) durant le premier semestre (+ 31 %) ont mis le vrac sous amphétamines. En revanche, confirmant donc la tendance des opérateurs de vrac, le « méga moteur » traditionnel que sont les importations chinoises de minerai de fer a déçu.
Ce n'est pourtant pas un problème de production, tente une explication BIMCO : elle a atteint en Chine un niveau record, avec l'ouverture de nouvelles unités « plus efficaces dans leur rendement » et aidée par de forte marges. Or, le transport maritime n’en profite pas vraiment en raison d'un changement de mode de production. La Chine est passé aux fours électriques à arc (fusion de ferrailles pour leur recyclage), ce qui permettrait d’augmenter la production d'acier mais avec moins de minerai de fer et de charbon à coke. Le pays disposant de stocks suffisants pour alimenter ses centrales électriques, les importations chinoises de minerai de fer continueront donc de baisser.
Reflet de taux de fret plus élevés ?
Concernant la flotte, l’analyse des données mensuelles d’une année sur l’autre révèle en effet un point d’inflexion : une expansion historiquement faible de la flotte. Ce changement de tendance s'explique par la stabilisation de la croissance des Capesize et le retour des Panamax, résultant de l'arrêt brutal des activités de démolition. Ces derniers mois, entre 65 000 et 99 999 tpl ont été commandés : 14 des 24 navires étaient des Panamax et six des Capesize. Seulement 214 000 tpl de la capacité totale démolie en 2018 étaient des panamax, contre 24 % au cours des quatre dernières années. De manière générale, seuls 2,6 million de tpl ont été démolis en 2018 contre 14,7 Mtpl en 2017 et 29,5 Mtpl en 2016. Reflet de taux de fret plus élevés qui empêcheraient les propriétaires de mettre des navires à la casse ?
Comment conserver les taux de fret rentables ? « Veiller à ce que la croissance de la flotte ne dépasse pas celle de la demande », répond BIMCO. Depuis le début de l'année, la demande a dépassé la croissance de la flotte et le bénéfice moyen du Panamax s'est élevé à 11 181 $/j. « Si les propriétaires de navires avaient maintenu rythme des démolitions, ils auraient pu gagner entre 1 000 et 2 000 $/j sur les plus de 11 000 navires de la flotte », indique le rapport, rappelant que les propriétaires détiennent les clés d'un marché équilibré en actionnant l'arme de destruction massive qu'est l'envoi à la casse. En 2017, 121 armateurs ont démoli 219 navires. En 2018, 34 armateurs ont vendu 37 navires pour démantèlement, soit le niveau le plus bas depuis 2007.
Bénéfice net de 27,2 M$ pour Goodbulk
Pour Goodbulk, propriétaire et exploitant de vraquiers secs, les fondamentaux de l'offre et de la demande sur le marché des capesize resteront solides. Le 3e trimestre a confirmé l'amélioration du marché du Capesize. L'indice de référence BCI indique en effet une moyenne de 23 952 $/j en juillet et de 25 209 $/j en août, soit respectivement 195 % et 57 % de plus que le 3e trimestre 2017. En septembre, les taux ont baissé de 13 % (17 177 $/j), sous l’effet de l'affaiblissement des importations de charbon en Chine. En octobre, l’indice s’améliorait déjà avec une moyenne de 18 602 $/j.
Preuve s’il en est, le monégasque Goodbulk (28 navires dont 25 Capesize et trois récemment acquis) a dégagé sur les 9 premiers mois de l’année un bénéfice net de 27,2 M$ (contre 1,2 M$ enregistrés à la même période en 2017). Les Capesize de GoodBulk ont obtenu un taux moyen d'affrètement à temps équivalent de 19 612 $ par jour sur le 3e trimestre, pendant lequel il a réalisé un bénéfice net de 14,5 M$. Pour le dernier trimestre, le Monégasque a indiqué qu’il avait déjà fixé environ 75 % de sa capacité Capesize à une moyenne quotidienne de 20 290 $ par navire et 25 % pour 2019 à une moyenne de 21 352 $/j.
--- A.D. ---