Fort des éléments de contexte, le Bimco, principale organisation professionnelle représentant tous les acteurs opérant dans le conteneur, prévoit une croissance de la demande de navires de l’ordre de 3 à 4 % en 2025 (contre 5,5 à 6,5 % en 2024), suivie d'une chute de 5 à 6 % en 2026. Ces hypothèses se basent sur un maintien des déroutements de la flotte sur l'ensemble de l'année 2025 mais d’un retour à des itinéraires normaux en 2026. Si le passage par le canal de Suez revient à l’ordre du jour dès 2025, alors la demande de navires chutera de 5 à 6 % en 2025 et augmentera de 3,5 à 4,5 % en 2026.
Même si la croissance du volume des importations en Asie du Sud a été décevante en 2024, l’association estime, contre toute attente, que la région connaîtra la plus forte croissance du volume des importations au cours de la période 2025-2026 (entre 6,5 et 7,5 %), soit les niveaux observés en 2021 et 2023. « Si les taux d'intérêt continuent de baisser et que la confiance des consommateurs continue de s'améliorer, nous pensons que les volumes vers l'Europe et la Méditerranée pourraient augmenter plus rapidement que ce que nous avons prévu. Les consommateurs européens ont accumulé plus d'épargne que d'habitude. Si elle est convertie en dépenses accrues pour l'achat de biens, les volumes d'importation pourraient dépasser nos prévisions ».
Une offre de plus en plus inquiétante
Quant à l'offre, elle devrait augmenter de 12,1 % en 2024 (en attente d’une consolidation pour les données relatives à 2024, relevé arrêté en novembre), de 5,8 % en 2025 et de 2,8 % en 2026. L’année 2024 devrait se solder par un apport de nouveaux navires équivalent à 2,8/2,9 MEVP, soit près de 10 % de plus qu’en 2023. D'ici à la fin de 2026, ce sont encore 2,6 MEVP qui devraient étoffer la flotte de porte-conteneurs, ce qui correspondra à une expansion de 8,5 % au cours des années 2025 et 2026.
Pour autant, les exploitants ont gardé de l’appétit pour des objets neufs et ce ne sont pas moins de 3,5 MEVP qui ont été contractés en nouvelles commandes l'an dernier pour des livraisons en 2027-2028-2029. Le carnet de commandes mondial s'élève désormais à 8 MEVP, soit un ratio entre le carnet de commandes et la flotte de 26 %.
Influence sur les taux de fret ?
Compte tenu de cette évolution de l'offre et de la demande, les taux de fret pourraient baisser légèrement en 2025 par rapport aux niveaux actuels, mais chuter de manière assez significative en 2026, indique encore le Bimco. Les prix spot pour les exportations au départ de Shanghai (SCFI) et les taux de fret moyens pour les exportations chinoises (CCFI) ont été en 2024, en moyenne, respectivement supérieurs de 148 % et 64 % à ceux de 2023. Les tarifs ont augmenté d'avril à juillet, puis ont baissé de juillet à octobre. Depuis, les moyennes sont restées stables, les tarifs vers l'Europe et la Méditerranée ayant augmenté tandis que les tarifs vers l'Amérique du Nord ont baissé.
Les tarifs d'affrètement à temps ont été, eux, de plus de 50 % plus élevés qu'en 2023. L'allongement des périodes de fixation réduit, mécaniquement, la disponibilité du tonnage affrété. « Cela soutiendra les taux tout au long de l'année 2025 », assure l'organisation, qui défend aussi les intérêts des propriétaires de navires. Les taux d'affrètement à temps d'un an pour les porte-conteneurs ont en augmenté dans tous les secteurs et, à la fin de l'année, les revenus des post-panamax ont atteint 73 330 $/jour, soit plus du double des niveaux observés à la même époque l'année dernière et une augmentation impressionnante de 111 % en glissement annuel.
Le FMI confiant
Dans sa mise à jour sur les perspectives économiques mondiales (octobre), le Fonds monétaire international prévoit que l'économie mondiale connaîtra une croissance de 3,2 % en 2025 et de 3,3 % en 2026, en ligne avec les 3,2 % estimés pour 2024.
L'Union européenne et le Japon devraient connaître une croissance plus rapide en 2025-2026 qu'en 2024. En revanche, les États-Unis, la Chine et l'Inde devraient décélérer, notamment en Chine, malgré les efforts du gouvernement pour stimuler la croissance. Dans les régions Océanie, Amérique du Sud et centrale et Afrique subsaharienne, la croissance économique au cours de la période 2025-2026 devrait être supérieure de 90 %, 29 % et 42 %, respectivement, à celle de 2024.
L'indicateur composite avancé (ICA) de l'OCDE indique que la croissance sera conforme ou légèrement supérieure à la tendance au cours des six à neuf prochains mois dans la plupart des pays et zones mesurés. En fait, l'indicateur est supérieur à 100 pour toutes les zones et tous les pays, à l'exception de la France et de la Turquie.
Production et ventes au détail
Début novembre, l'indice mondial des directeurs d'achat du secteur manufacturier (PMI) était remonté à 50 après quatre mois de contraction. En Chine, l'indice PMI manufacturier Caixin et NBS a été supérieur à 50 en octobre et novembre. C'est la première fois depuis avril 2024 que les deux indicateurs sont supérieurs à 50. Dans la zone euro, le secteur manufacturier continue d'éprouver des difficultés, la production à la peine (indice inférieur à 50 pendant 29 mois consécutifs).
D'autre part, la confiance des consommateurs dans l'Union européenne (UE) a continué à s'améliorer et avait atteint en octobre 2024 son plus haut niveau depuis février 2022, bien qu'elle reste plus faible qu'avant la pandémie Aux États-Unis, l'évolution de la confiance des consommateurs est plus incertaine.
Les évolutions légèrement divergentes de la confiance des consommateurs se retrouvent également dans l'évolution des ventes au détail. Dans l'UE, les volumes des ventes au détail ont augmenté de plus ou moins 1 % l'an dernier, inférieurs de 9 % à ce qu'elles étaient en 2019, avant la pandémie. Jusqu'à novembre, aux États-Unis, ils avaient baissé de 0,7 % en glissement annuel, toutefois supérieures de 12,4 % aux niveaux de 2019. En Chine, les ventes ont continué à décevoir avec une croissance de 3,5 % depuis le début de l'année, soulignant la nécessité pour le gouvernement chinois de prendre des mesures pour stimuler la demande intérieure, affirme le FMI.
Adeline Descamps
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