Le marché du conteneur en 2025 : à quoi s'attendre ?

Crédit photo ©Eunavfor Aspides
Le transport maritime de conteneurs a bénéficié en 2024 de l'émergence des perturbations en mer Rouge. La persistance des événements géopolitiques, la perspective de nouvelles guerres commerciales, le renforcement des exigences environnementales et les conséquences des nouvelles alliances maritimes devraient secouer le marché en 2025.

À moins que Donald Trump, une fois en poste, ne parvienne à régler en 24 heures,  comme il l’a promis, les « problèmes » dans les mers séquestrées, et à considérer que la nouvelle victoire du Républicain à la Maison Blanche fait de ses mensonges des vérités, les tendances qui ont façonné le transport de marchandises en 2024 devraient être celles de 2025. Mais en version amplifiée.

La crise en mer Rouge en particulier, qui a connu en fin d’année un épisode supplémentaire avec l'effondrement du régime d'Assad en Syrie, et l’instabilité géopolitique en général, devraient rester des standards du transport maritime, un des secteurs les plus exposés aux conflits en raison « de plusieurs points d'étranglement sur des routes maritimes clés, de son rôle vital dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et de sa capacité limitée à ajuster sa capacité effective à court terme », a résumé Fitch dans une introduction à son rapport prévisionnel pour 2025.

Une liberté de navigation compromise

Est-il encore nécessaire de le constater. La géopolitique a remplacé l'économie comme principal moteur des décisions politiques (en témoigneront les guerres tarifaires). La liberté de navigation, principe de base du droit de la mer dans les eaux internationales, n'est plus ce qu'elle était. De la mer Rouge, voie de passage très fréquentée pour le trafic vers et depuis l'Asie via le canal de Suez, à la mer Noire, cruciale au transit des vraquiers, jusqu'à la Baltique, enjeu d'une cybercriminalité sur les câbles sous-marins, il faut désormais composer avec des voies commerciales sinon à sens interdit du moins à restrictions dictées par des lignes géopolitiques. Un an après l'arrivée de forces navales internationales et européennes en mer Rouge pour protéger la navigation marchande de la milice militaire houthie qui pilonne les navires dans la région, le trafic reste inférieur de 60 à 70 % à son niveau d’avant novembre 2023, date de la première de la première attaque sur le Galaxy Leader, dont l'équipage est toujours otage.

Au cours des 11 premiers mois de 2024, 174 porte-conteneurs avaient traversé la mer Rouge, contre 606 sur la même période de 2023. Selon Linerlytica, la capacité mesurée en EVP a diminué de 91 %, passant de 5,9 MEVP à 544 000 EVP en 2024.
Les recettes du canal de Suez ont, elle, plongé de 60 % l'an dernier, soit une perte de 7 Md$ pour les caisses de l'État égyptien. En novembre, cela faisait 40 semaines qu'un porte-conteneurs d'une capacité de plus de 18 000 EVP n'avait pas traversé le canal, a noté Alphaliner. Ce mois-là, seuls trois passages ont été enregistrés dans la catégorie des 10 à 15 000 EVP. Il s'agissait de navires CMA CGM, qui empruntent la route à risques quand l'armateur est assuré de disposer d'une escorte par une frégate française opérant dans le cadre de la mission européenne Aspides.

L'augmentation du trafic par la mer Rouge a été presque entièrement due aux petits gabarits de moins 5 000 EVP, un segment où les transits ont atteint le chiffre record de 193 en novembre, en hausse de près de 28 % par rapport à la moyenne de l'année. Elle est le fruit de la stratégie de X-Press Feeders, d’Emirates Shipping Line ou encore Safeen qui ont augmenté le nombre de services en short sea entre l'Inde et le Golfe du Moyen-Orient et la mer Rouge, selon Hua Joo Tan, cofondateur de Linerlytica. Elle reflète par ailleurs la tendance dite opportuniste des petits transporteurs prêts à combler le vide laissé par les géants du secteur. La compagnie chinoise CU Lines est une spécialiste. Elle avait exploité cette fenêtre d'opportunité durant la pandémie.

Une forte sollicitation des navires

En contraignant la flotte mondiale de porte-conteneurs à emprunter la route par le sud de l'Afrique, les perturbations ne sont pas sans incidence sur l’approvisionnement des marchandises. Les navires doivent parcourir des milliers de kilomètres supplémentaires (aberration écologique et économique), consommer davantage de combustibles, et y laisser jusqu’à deux semaines supplémentaires de transit sur certaines lignes.

Néanmoins, la crise sécuritaire en mer Rouge a été jusqu’à présent un allié financier crucial pour les compagnies maritimes. Le « grand tour » exigeant bien plus de navires pour pouvoir maintenir la fréquence du service (environ 7 % de la capacité mondiale des porte-conteneurs absorbée), l’offre s’est tendue. Ce faisant, elle a exercé une pression à la hausse sur les taux de fret et d’affrètement. Soudain, la surcapacité menaçante, au regard des livraisons des nombreux nouveaux navires commandés durant la pandémie, a été magiquement effacée par une sollicitation accrue. Selon Veson Nautical (ex-Vessel Value), l'allongement des distances de navigation s'est traduite par une croissance d'environ 16 % en un an du nombre d'équivalents vingt pieds-milles (EVP-milles).

En conséquence, les taux d'affrètement à temps pour une durée d'un an, par exemple, ont augmenté dans toutes les catégories de navires et, à la fin de l'année, les revenus des post-panamax s'élevaient à 73 330 $/jour, soit plus du double des niveaux observés à la même époque de 2023.

Une nouvelle manne financière

Maersk, qui prévoyait en février 2024 de terminer l'année sur un résultat net compris entre zéro bénéfice et une perte de 5 Md$, a ainsi relevé ses prévisions de bénéfices à plusieurs reprises au cours de l'année. Il n’est pas le seul. Hapag-Lloyd s’y est aussi prêté plusieurs fois, bien que le transporteur allemand ait été le seul à enregistrer des bénéfices d'exploitation sur neuf mois inférieurs à ceux de 2023.
Pour la première fois, Maersk, dont la rentabilité faisait défaut depuis au moins trois exercices trimestriels, a présenté une marge de 25,5 % à l'issue de neuf mois d'activité (contre 5,6 % au troisième trimestre 2023). Le transporteur danois pourrait finir l'année 2024 avec un bénéfice de 30 % supérieur à celui de 2024.

Les marges d'exploitation moyennes des neuf principaux transporteurs de conteneurs déclarant un Ebit – soit le bénéfice pur avant impôts et intérêts qu'un transporteur réalise sur chaque dollar de vente –, ont atteint 38,4 % au cours du troisième trimestre (le dernier résultat publié), ce qui correspond aux niveaux observés pour la dernière fois au début de 2021. Soit 16 Md$ entre juillet et septembre, contre 6,1 Md$ au cours du troisième trimestre 2023, et seulement 1,8 Md$ un an plus tôt. Tous ont enregistré un bond de leurs marges au cours de la période, a fortiori pour ceux qui se concentrent sur les activités spot et sur le transpacifique. Comme le Taïwanais Evergreen, qui a dégagé un résultat d’exploitation remarquable (de plus de 50 %), ayant plus que multiplié par deux ses revenus par rapport à l'année précédente et par huit son Ebit trimestriel (2,4 Md$).

Avec ou sans la mer Rouge

« 2025 dépend de la mer Rouge. Si la crise se poursuit, ce sera une année très forte pour les compagnies maritimes », estime Lars Jensen, consultant spécialiste du transport maritime de conteneurs. Un argument auquel consent Peter Sand, ex-analyste du Bimco, aujourd’hui employé par Xeneta, pour lequel la poursuite des attaques contre les navires marchandes fera de cette année un exercice négatif ou positif pour les compagnies maritimes. Dans son rapport sur les perspectives pour 2025, Xeneta anticipe, selon qu’il y ait ou pas de retour des navires en mer Rouge, une croissance de 3 % ou une contraction de 11 % pour la demande en EVP-milles cette année.

Commerce mondialisé contre protectionnisme américain, Donald Trump le come-back

Le candidat Trump en campagne pour la Maison Blanche a promis une autre tonalité dans sa conversation avec la Chine. Le président élu, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, n’a pas modéré son discours depuis, bien qu’il puisse être entravé par les forces d’opposition du Congrès dans sa capacité à mettre en œuvre pleinement sa vision de la politique commerciale. Avocat de la protection des industries nationales vis-à-vis de la concurrence mondiale, mais maître es-qualité en imprévisibilité, il prévoit d'appliquer des droits de douane de 10 % (au minimum) sur les importations en provenance de Chine et de 25 % sur les marchandises en provenance du Mexique et du Canada, envers et contre l'accord commercial USMCA ou ALENA 2 (États-Unis-Mexique-Canada) signé au cours de son premier mandat. Et ce, en trois vagues, à partir de l'été 2025.

Le transport maritime de conteneurs, qui assure l’acheminement de 90 % des biens de consommation, reste très exposé à tous facteurs susceptibles de nuire aux volumes d'importation. L’inflation du coût de la vie en est un, même si les droits de douane, imposés au stade de l'importation sur la base de la valeur déclarée des marchandises, donc sans les coûts ultérieurs (main-d'œuvre, marketing, marges, etc.), ne puissent pas être assimilés à des taxes sur les ventes. Les mesures de rétorsion des partenaires commerciaux sont encore plus à redouter.

Les analystes prévoient une augmentation des droits de douane moyens américains de près de 8 % d'ici la fin de l'année 2026, ce qui constituerait la plus forte augmentation depuis ... 1930. Selon eux, cette évolution devrait entraîner une baisse notable de la part des États-Unis dans les échanges commerciaux de 21 à 18 %. Dans cette contraction de 11 % du commerce américain avec le reste du monde, la Chine est susceptible de perdre jusqu'à 83 % de ses ventes.

En conséquence, les experts de Linerlytica prévoient une diminution potentielle de 8 à 12 % des flux commerciaux transpacifiques, laquelle pourrait se traduire par une baisse de 1,7 % du commerce mondial de conteneurs. Mais à court terme, selon les modèles dits historiques, c'est plutôt à un rush de la demande de transport (effet de planification de la chaîne d'approvisionnement « juste au cas où ») auquel il faut s'attendre. Il est estimé entre 5 à 15 % et il est en cours, sans que l’on puisse à ce stade présenter un bilan renseigné.

Plus que les droits de douane – politique qui était déjà celle du démocrate Joe Biden qui a élargi certains des droits de douane imposés par le premier mandat Trump pour inclure l'acier, l'aluminium, les semi-conducteurs, les véhicules électriques, les batteries et les minerais essentiels en provenance de Chine –, c’est surtout l'imprévisibilité du Républicain qui effraie les analystes. Initiés par la première séquence du président trublion, ils se savent sur la brèche pour établir des prévisions de marché.

De son côté, la NRF, la puissante fédération des détaillants américains (Walmart, Macy's, Target, Microsoft, Levi Strauss, etc.), a exhorté le président élu à déployer des tarifs douaniers de manière ciblée et « stratégique » plutôt que d'adopter une approche globale ce qui entraînerait, d'après une de ses études, une hausse des prix à la consommation de 78 Md$ par an.

Lorsqu’ont été promulguées des taxes de 25 % sur les produits chinois en 2018, les calculs sur les prix à la consommation se sont avérées infondées. Les hausses ont finalement été minimes et temporaires, la plupart des effets étant absorbés en l'espace d'un an...

Droits de douane et grève, un cocktail explosif pour le conteneur transpacifique

La menace d'un nouveau mouvement social dans les ports est-américains, conjugué à la perspective de droits de douane, suggèrent de nouveaux débordements dans la ligne régulière. Alors que la grève a été suspendue jusqu'au 15 janvier pour finaliser le contrat-cadre des six prochaines années, les négociations entre les dockers des ports de la côte est-américaine, représentés par le syndicat ILA (International Longshoremen's Association), et leurs employeurs de l'US Maritime Alliance (USMX) butent toujours sur l'automatisation. Un sujet sur lequel les représentants des personnels portuaires demandent d’en écarter le principe, y compris si elle était partielle. Les parties se sont séparées après quelques réunions de négociation et, depuis, elles se livrent à une guerre des mots et des arguments dans les médias.

Les usagers des ports de la côte-est américaine se trouvent donc à nouveau sous la menace d’un mécontentement d’ampleur des dockers auxquels ils avaient échappé en novembre, la grève ayant été écourtée par rapport à ce qui était initialement prévu. Jusqu'à 45 000 dockers prévoient de débrayer si un nouvel accord de travail n'est pas conclu avec leurs employeurs d'ici la mi-janvier.

Les ports américains couverts par le baromètre Global Port Tracker, dont la NRF est à l’initiative, ont traité 2,29 MEVP en septembre (sans les données de New York/New Jersey et de Miami), en hausse de 12,8 % d'une année sur l'autre, et de 2,25 MEVP en octobre (+ 9,3 % par rapport à octobre 2023). Tous n'ont pas encore communiqué les données des deux derniers mois de l’année, mais les volumes étaient attendus à 2,17 MEVP en novembre et à 2,14 MEVP en décembre. Cela porterait l’année à 25,3 MEVP, contre 22,3 MEVP en 2023. Ils témoignent de l’affolement des importateurs et des effets d’anticipation avant l’entrée en vigueur des droits de douane.

Si les flux conteneurisés devraient encore s’établir au-dessus des 2 MEVP en janvier, le mois de février, entre 1,77 et 1,87 MEVP, devrait accuser un repli en raison des fermetures des usines asiatiques pour le Nouvel An lunaire (du 29 janvier au 12 février). Mais depuis l’ère covidienne, les repères dans le conteneur sont brouillés et les saisons n’en sont plus vraiment.

Selon les indicateurs de Freightos, les taux de fret transpacifique – de l’Asie vers la côte ouest-américaine –, ont augmenté de 8 % pour atteindre 4 825 $ par unité d'équivalent quarante pieds (FEU) pour la semaine qui s'est achevée le 27 décembre et de 3 % vers la côte Est, à 6 116 $/FEU. « Avec l'approche du Nouvel An lunaire et la série d'augmentations générales des taux (GRI) annoncées en janvier pour le transpacifique, les prix de transport sur ce marché pourraient subir une pression à la hausse au début de 2025. Une baisse saisonnière de la demande à partir de février devrait entraîner une diminution des taux bien que les détournements de la mer Rouge et les augmentations tarifaires attendues les maintiendront bien au-dessus des moyennes à long terme, tout comme ils l'étaient jusqu'en 2024 », explique Judah Levine, en charge des données chez Freightos. Sur le marché transatlantique, dans le sens Asie-Europe du Nord, l'indice Freightos tand aussi à montrer des tarifs en hausse, de 4 %, à 5 155 $/EVP. En revanche, vers la Méditerranée, les prix s’affichent à la baisse, de 4 %, soit 5 471 $.

Régionalisation de la supply chain

Les conflits géopolitiques en cours, l’élévation d’un cran des barrières commerciales, les bouleversements dans la supply chain devraient amplifier les tendances en cours dans l’organisation de la production et de la logistique des industries, claironnent les experts. Les chaînes d'approvisionnement mondiales s'orientent de plus en plus vers la régionalisation, les entreprises cherchant à réduire les coûts, à améliorer les délais de livraison et à atténuer les risques. Avec à la clé, une reconfiguration des routes maritimes, devraient-ils ajouter. Au profit des volumes intra-Asie et la région LATAM (Argentine, Brésil, Colombie, Chili, Mexique et Pérou), pronostique Linerlytica, sur la base de l'expérience des tarifs douaniers passés.

Dans le même temps, l'Inde devrait jouer un rôle plus important dans le transport maritime mondial, à mesure que l'industrie manufacturière se diversifie au détriment de la Chine. Le Mexique a déjà largement profité de la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis. Au cours du premier mandat de Trump, l'accord États-Unis-Mexique-Canada a rendu le commerce avec le Mexique plus attractif qu'avec la Chine, ce qui a incité la production à revenir sur le continent américain. Donald Trump a laissé entendre qu'il souhaitait modifier cet accord, ciblant précisément les entreprises chinoises qui utilisent le Mexique pour « sauter la frontière ». Les investissements chinois au Mexique et les échanges commerciaux avec ce pays ont en effet bondi, les droits de douane mexicains étant généralement inférieurs aux droits américains tandis que le programme IMMEX (Manufacturing, Maquiladora and Export Services Industry) a permis aux importations destinées aux États-Unis d'entrer au Mexique en franchise de droits. Toutefois, en réaction aux menaces tarifaires, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a d’ores et déjà validé une loi qui augmente immédiatement les droits de douane sur les vêtements en provenance de Chine et d'autres pays jusqu'à 35 % et revoit la liste des produits éligibles à l'IMMEX.

Big bang des alliances : tectonique des plaques

Les mouvements au sein de trois des quatre alliances qui vont opérer à partir du 1er février 2025 ne sont pas neutres pour les ports au débouché des lignes réorganisées, que ce soit en Europe ou en Asie. Le remodelage des réseaux réaménage le range nord-européen et accouche de deux types d'offres. Quantité de navires ou qualité de services. Dans quel camp se gagneront les 5 MEVP encore captifs sur le range nord-européen d'ici 2030 ? C’est une des nombreuses questions posées par le remaniement des alliances et pas la seule.

« C'est probablement la première fois que les clients ont des options très différentes lorsqu'ils choisissent une compagnie maritime et une alliance », a résumé Peter Sand. Depuis l’annonce de la dislocation de l’alliance entre les deux plus grands transporteurs de la ligne conteneurisée, Maersk et MSC, qui a obligé les transporteurs à restructurer leur réseau de façon à maintenir une couverture et une fréquence, l’onde de choc n’en finit plus de se diffuser.

La rupture entre les deux leaders mondiaux a poussé l'armateur danois à se rapprocher du transporteur allemand Hapag-Lloyd pour former la nouvelle Gemini (février 2025). Ce faisant, ce dernier s’est désengagé du consortium (THE Alliance) qu'il formait avec le Japonais ONE, le sud-coréen HMM et le taïwanais Yang Ming.
Les trois transporteurs asiatiques ont convenu de poursuivre leur coopération, à l’issue du départ d’Hapag-Lloyd, au sein d’une nouvelle structure, dénommée Premier Alliance, qui prendra le relais à partir de février 2025 de l'actuelle THE Alliance. La perte du cinquième armateur mondial ont contraint ces derniers à négocier avec MSC pour assurer leurs slots sur le trade Asie-Europe, où les parts de marché du groupement sont à dix points d’écart des deux grandes alliances concurrentes. Le leader mondial MSC s'appuiera, lui, sur ZIM pour la route Asie-côte Est des États-Unis/Golfe des États-Unis où les deux partenaires aligneront six services hebdomadaires.

En décembre, une énième réplique a concerné cette fois le transatlantique. Comblant leurs faiblesses grâce à MSC sur la ligne Asie-Europe, où il vont pouvoir aligner neuf services hebdomadaires (contre quatre actuellement par THE Alliance), les membres de la future ex-THE Alliance sont en plus grande difficulté encore entre l'Europe et l'Amérique du Nord, autre maillon faible les poussant à contracter en dehors de leur entre-soi. Le groupe (260 navires totalisant 3,3 MEVP) ne détient que 2,9 % de parts de marché en capacité sur cette ligne. Dans ce contexte, ONE a assuré ses arrières en concluant un VSA transatlantique avec Ocean Alliance, le mouvement formé par CMA CGM, Cosco/OOCL et Evergreen, resté à l'abri du big bang. Le plus grand réseau, en termes de capacité déployée avec 353 porte-conteneurs et 4,62 MEVP, s'est même offert le luxe de renouveler, avant l’échéance de 2027, leur coopération opérationnelle jusqu’en 2032.

Mais c’est la stratégie Gemini que tous ont en point de mire car elle prône une organisation différente, restructurant le réseau entre ports hubs et terminaux secondaires, ces derniers desservis par des navettes (feeders de grande taille), selon l’approche aérienne en étoile « hub and spoke », qui prévalait il y a plusieurs dizaines d'années dans le maritime. Avec en sus, une promesse de fiabilité horaire de 90 % (mais les chargeurs sont plus sensibles au timing en door-to-door qu’entre deux ports). Au fil de l’eau et des années, une navigation en paire de ports s’y est substituée. MSC, devenu suffisamment puissant pour s’affranchir de toute dépendance, pousse ce modèle jusqu’à l’extrême.

« Les différentes stratégies peuvent donner aux chargeurs et aux transitaires l'occasion de faire pression sur les alliances et les compagnies maritimes pour qu'elles fournissent de meilleurs services et peut-être aussi des prix plus bas », assure l'analyste en chef de Xeneta, Peter Sand. Une nouvelle histoire doit désormais s’écrire.

La décarbonation, un sujet de conversation qui va s’intensifier

La décarbonation continuera d’animer les conversations du secteur, plus encore en 2025, qui introduit d'autres règles de conformité dans l’espace communautaire européen, exigeant des compagnies qu’elles respectent des plafonds d'émissions plus stricts et adoptent des carburants plus propres. Après l’extension au transport maritime du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SCEQE) le 1er janvier 2024, dont les allocations progressivement réduites rendront les émissions de gaz à effet de serre (GES) de plus en plus coûteuses, cette année marque l’entrée en vigueur de la directive FuelEU. Adoptée en juillet 2023, elle fait partie du paquet législatif de l'UE sur le climat « Fit for 55 » qui vise à réduire les émissions de GES dans l'UE d'au moins 55 % d'ici à 2030, par rapport aux niveaux de 1990, avec un objectif de neutralité climatique d'ici à 2050.

Dans le cadre de ce règlement, qui concerne les navires d'une jauge brute supérieure à 5 000 tonnes, un accent particulier est mis sur les carburants renouvelables d'origine non biologique (RFNBO), produits en combinant de l'hydrogène vert avec d'autres éléments tels que le carbone ou l'azote extraits de l'atmosphère. Concrètement, depuis le 1er janvier 2025, les navires opérant dans l'UE/EEE doivent couvrir leurs besoins énergétiques avec des combustibles dont l'intensité en GES est inférieure à la valeur de référence de 91,16 gCO2e/MJ (ou GES par unité d'énergie). Cette dernière doit diminuer d'un pourcentage qui augmente progressivement tous les cinq ans, jusqu'en 2050 : la réduction est fixée à 2 % de 2025 à 2029, 6 % de 2030 à 2034, 14,5 % de 2035 à 2039, 31 % de 2040 à 2044, 62 % de 2045 à 2049, et 80 % à partir de 2050.

Les exigences FuelEU s'appliquent à 100 % de l'énergie utilisée lors des voyages entre « ports d'escale » (là où les navires s'arrêtent pour charger ou décharger des marchandises, ou pour embarquer ou débarquer des passagers) au sein de l'UE/EEE, et à 50 % de l'énergie utilisée lors des voyages à destination ou en provenance de l'espace européen depuis/vers des ports d'escale situés en dehors. La notion exclut les arrêts de porte-conteneurs dans un port voisin de transbordement situé en dehors du marché communautaire mais à moins de 300 milles nautiques afin d'éviter les comportements évasifs. Le navire devra enregistrer 50 % de l'énergie consommée pendant le voyage jusqu'à ce port, et non plus seulement pendant le court trajet entre le lieu de transbordement et la destination finale dans l'UE. La Commission européenne doit établir une liste des ports concernés d'ici au 31 décembre 2025.

À ce stade, la principale préoccupation, que ce soit du point de vue des transporteurs que de celui des chargeurs, reste d’évaluer l’impact du nouveau règlement sur les opérations et les prix du transport. Les transitaires doivent s’attendre à l'augmentation progressive, et déjà active, via des surcharges ETS, des coûts liés à la tarification du carbone que dénoncent des ONG comme Transport&Environment.

Pour couvrir la double mise à jour réglementaire que représentent la deuxième année du marché carbone européen et l’entrée en vigueur du Fuel EU Maritime, Hapag-Lloyd a d'ores et déjà ajusté sa surcharge.

Les cartes du monde sont brouillées. Depuis la pandémie, la même conclusion s'impose à l'aube de chaque nouvelle année : la perturbation est devenue la nouvelle normalité du transport maritime et l’adaptabilité, un manuel de survie. 

Adeline Descamps

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