Les analystes s’inquiètent de son devenir alors que la compagnie est particulièrement exposée à un ralentissement du marché dans la mesure où elle réalise une grande partie de son chiffre d’affaires entre Asie et Amérique du nord. La compagnie sud-coréenne HMM doit néanmoins la parenthèse dorée de deux ans qu’elle vient de vivre à ce positionnement, qui lui a permis de s’extirper de la nasse dans laquelle elle était confinée depuis des années.
Les difficultés de Shanghai et autres places portuaires chinoises ont fait en outre du port coréen de Busan une place déroutage et ont ainsi offert aux chargeurs sud-coréens la possibilité d’exporter directement vers l’Europe ou les États-Unis. Une opportunité qu’a saisie HMM pour étoffer son offre de services (au moment où ses pairs ont multiplié les blank sailing). Le premier trimestre 2022 avait été le meilleur de son histoire, avec un résultat net de 2,4 Md$ (+ 1 932,8 %). Il a surtout été le sixième exercice trimestriel positif après plusieurs dizaines d’autres à pertes.
Ses résultats financiers ont d’ailleurs conforté ses actionnaires – l’État avec la banque publique –, dans leur intention, annoncée l’an dernier, de privatiser la plus grande compagnie du pays (SM Line, qui était entrée au capital de sa compatriote en janvier dernier, a augmenté sa participation en juin). Le moment était alors jugé opportun pour trouver un candidat à la reprise de l’héritière de Hyundai, que l’État avait reprise pour la sauver de la faillite en 2016 alors qu’elle faisait partie du conglomérat sud-coréen Hyundai Group.
Un plan d’investissement de 11,5 Md$ sur cinq ans
En attendant, le groupe HMM vient d’annoncer un nouveau plan d’investissement de 11,46 Md$ (15 000 milliards de wons) au cours des cinq prochaines années. Le gouvernement sud-coréen avait déjà annoncé l’an dernier un financement de 1,5 Md$ pour la commande d’une douzaine de porte-conteneurs de 13 000 EVP qui ont été confiés aux deux géants sud-coréens DSME et HHI pour une livraison d'ici le premier semestre 2024.
Le nouvel apport d’argent public vise à porter la capacité du huitième armateur mondial de porte-conteneurs (992 000 EVP avec son carnet de commandes, selon Alphaliner) à 1,2 MEVP, et à l’exploitant de vraquiers d’acquérir 26 navires, ce qui portera sa flotte à 55. Des investissements seront également réalisés dans les terminaux et les installations logistiques, a déclaré dans un communiqué la société.
Cosco, OOCL, Evergreen, des résultats inédits au deuxième trimestre
Les autres compagnies asiatiques, qui viennent de publier des résultats préliminaires pour le deuxième trimestre, continuent d'afficher des résultats de bonne tenue, défiant tous les indicateurs suggérant un ralentissement généralisé, alors que la consommation des particuliers et la confiance des entreprises sont paralysées par les tensions inflationnistes et géopolitiques.
La première d’entre elles, Cosco, quatrième groupe mondial dans la ligne régulière, a déclaré un bénéfice net en hausse de 74 % pour le premier semestre 2022 sur une base annuelle. Avec 64,7 milliards de yuans (9,7 Md$) dont 37,1 milliards de yuans (5,5 Md$) entre avril et juin. L’an dernier, il lui a fallu le semestre pour atteindre un tel niveau.
Le résultat brut d'exploitation (Ebit) devrait, selon les estimations de la société cotée sur le marché de Hong Kong, avoisiner les 14 Md$. Il marquerait alors un bond de 92 % sur un an, bien que l'indice chinois du fret conteneurisé (CCFI) n'ait augmenté que de 59 % au cours de la même période. L’Ebit attendu pour le premier semestre représente déjà plus de 70 % du total enregistré pour l'ensemble de l'année 2021.
Les taux contractuels ont pris le relais du spot
La pépite du groupe Cosco, OOCL, basée à Hong Kong, a annoncé un chiffre d’affaires de 5,3 Md$ pour le deuxième trimestre, en croissance de 52 % par rapport à l'année précédente, malgré une baisse de 5,6 % de ses volumes (mais entre les deux premiers trimestres de cette année, ils ont néanmoins rebondi, de 2,4 %).
Le revenu mondial moyen d'OOCL par EVP a bondi de 61,5 % en un an pour atteindre 2 874 $, tiré sans surprise par le transpacifique (revenu par EVP en hausse de 97,6 %, à 4 365 $). Le double de celui enregistré sur les autres marchés – Asie-Europe, transatlantique, intra-asiatique –, qui affichent une moyenne de 2 355 $ par EVP.
Révélateur de la montée en puissance des taux contractuels et du rôle de relais qu’ils ont prix par rapport au spot, le revenu moyen par EVP d'OOCL sur le transpacifique a augmenté de 10 % au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre alors même que les taux spot sur cette route ont bien marqué le pas.
Evergreen, le sixième transporteur mondial, a présenté un deuxième trimestre se soldant par un chiffre d’affaires de 175 milliards de dollars taïwanais, soit 5,9 Md$, dont 2 Md$ sur le seul mois de juin.
Les résultats des Européennes attendus en août
Les résultats du second trimestre pour les compagnies européennes – Maersk et Hapag-Lloyd pour les premières –, sont attendues en août. Ils devraient encore être largement dans le vert. Tout en relevant un ralentissement, Maersk, Hapag-Lloyd, CMA CGM (MSC ne publie pas ses comptes), ont annoncé des niveaux encore très confortables pour le second trimestre. Et 2022 devrait être aussi une année de performances inédites. Envers et contre les perspectives macroéconomiques…
Adeline Descamps
