GTT : « les commandes de méthaniers se maintiennent à des niveaux élevés »

Au cours de l'exercice 2020, l'activité commerciale du spécialiste des systèmes de confinement pour le transport maritime et le stockage de gaz liquéfié a été portée par les 41 commandes de méthaniers mais pas par celles de navires au GNL, faute de demande. GTT a réalisé trois acquisitions ciblées l’an dernier. Une année prospère pour cette société française qui semble parée pour manœuvrer par tous les temps.

Les lois des marchés sont parfois bien obscures. Alors que le spécialiste français des systèmes de confinement à membranes cryogéniques utilisés pour le transport et le stockage du GNL a publié des comptes d’excellente tenue, de nature à régaler ses actionnaires (dividende proposé de 4,29 € par action contre 3,25 € en 2019), le cours de son action a plongé dès ses résultats prononcés, trahissant des attentes déçues.

Dans un environnement aussi dégradé que fut 2020, ils relèvent pourtant d’une incroyable prouesse et nombre d’entreprises aimeraient se prévaloir d’un tel bilan. À vrai dire, GTT ignore superbement les aléas de l’industrie parapétrolière et para gazière dans laquelle elle évolue. Rien ne semble avoir prise sur son abonnement à la croissance et sa rentabilité au-dessus des 50 %. Pas plus les risques géopolitiques, prégnants dans le domaine du gaz, qu’une crise sanitaire planétaire.

Elle en fait encore la démonstration en 2020. En pleine crise planétaire, elle se permet un chiffre d'affaires (composé aux 9/10e de redevances) de 396,4 M€, en croissance de 37,5 % par rapport à 2019, lequel était déjà en progression de 17 % par rapport à 2018. Elle affiche un excédent brut d’exploitation (Ebitda) en hausse de 39,2% à 242,6 M€ et un résultat net en progression de 38,7 % à 198,8 M€. Le fabricant de systèmes qui permettent de stocker et de transporter le GNL en toute sécurité a été portée ces dernières années par la croissance du transport du gaz naturel liquéfié, consommé à près de 75 % en Asie. Son carnet de commandes reste garni, lui assurant un chiffre d’affaires de 640 M€ jusqu’en 2025.  

GTT a rendu ses systèmes GNL compatibles pour l'ammoniac

51 commandes en 2020

« Avec 51 commandes enregistrées en 2020, tous segments confondus, l'année s'est révélée particulièrement dynamique sur le plan commercial, a commenté Philippe Berterottière, le PDG de GTT. Les commandes de méthaniers se maintiennent à des niveaux élevés, précise-t-il, alors qu’entre 80 et 90 % des méthaniers en service dans le monde sont déjà équipés de ses cuves tapissées d’un revêtement en alliage spécifique. Aux 12 commandes de méthaniers enregistrées au cours du premier semestre, se sont ajoutées 29 autres au second semestre, dont la livraison interviendra entre 2022 et 2025. 

À noter, parmi ces commandes, celles de deux méthaniers de moyenne capacité pour le compte de l'armateur K-Line destinés au marché chinois, et de 15 méthaniers brise-glace suite à la signature fin juin 2020 d'un contrat de licence et d'assistance technique avec le chantier russe Zvezda

DSME confie de nouvelles cuves GNL à GTT

Couvrir l’ensemble de la chaîne

Dans le domaine du GNL carburant, l’entreprise de Saint-Rémy-lès-Chevreuse n’a en revanche pas fait recette, faute de commandes de nouveaux navires l’an dernier. Elle reste pour autant embarquée dans la plupart des grands projets actuellement emblématiques de la propaulsion GNL (CMA CGM, Ponant...). 

Philippe Berterottière balaie. « Nous avons démontré notre capacité à couvrir l'ensemble de la chaine de valeur du transport et du stockage de gaz liquéfié en décrochant notamment des contrats pour les éthaniers de grande capacité  [elle avait déjà engrangé 6 éthaniers un an auparavant, NDLR], pour des FSU [unités flottantes de stockage] et des FSRU [unité de stockage et de regazéification].

En juin, la société francilienne a notamment reçu une commande de la part du chantier sud-coréen DSME portant sur l'équipement d'une FSRU pour le compte de l'armateur japonais MOL. Le même mois, elle recevait du même constructeur une demande portant sur la conception des cuves de deux FSU, les plus grandes unités jamais construites (361 600 m3), destinées aux projets gaziers Yamal et Arctic LNG 2 du producteur russe de GNL Novatek.

GTT réalise une acquisition majeure dans l’hydrogène vert 

Positions dans l’hydrogène et l’ammoniac

Mais pour Philippe Berterottière, aux manettes depuis 2009, l’année 2020 fut aussi celle de la capacité de l’entreprise à évoluer vite et à acquérir des positions dans les énergies de demain. En octobre, il mettait la main sur Areva H2Gen, rebaptisée Elogen, seul fabricant en France d’électrolyseurs permettant la production d’hydrogène vert. « Cette opération permet à l’entreprise d'enrichir son portefeuille technologique par une expertise dans l'hydrogène vert, composante incontournable du mix énergétique des prochaines décennies ». 

Début 2021, GTT a reçu une approbation de principe de la part des sociétés de classification bureau Veritas et DNV GL pour l'application de son système de confinement NO96 sur les cuves des très grands porte-conteneurs. Le 15 février, le spécialiste a obtenu une approbation de principe de Bureau Veritas rendant « NH3 Ready » ses cuves à membranes Mark III. Ainsi le système peut-il être, sans modification majeure de design, adapté au confinement éventuel de l'ammoniac pour les applications GNL carburant.

GTT : Engie envisage de quitter le navire

Avec ou sans Engie 

Pour l'année en cours – sans doute la principale raison de la bouderie non justifiée des marchés financiers à l’égard de cette entreprise qui a toujours distribué un minimum de 80 % de son résultat net – le chiffre d'affaires devrait se situer dans une fourchette de 285 à 315 M€ et son excédent brut d’exploitation entre 150 et 170 M€. Soit en déça des attentes. À moins que la moue des investisseurs ne se justifie par la perspective de la cession par Engie de ses 40 % dans GTT. Le géant gazier français reste étrangement discret depuis qu’il en a évoqué la possibilité dans le cadre de sa réflexion sur l’arbitrage de ses activités de services. Quoi qu’il en soit, la « pépite technologique française », qui n’a pas vraiment de concurrence sur le segment de la propulsion des navires, n’est pas sans désintéresser les intérêts chinois et sud-coréens.

Adeline Descamps

 

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