Gazprom a opéré un premier voyage de GNL depuis son usine de la mer Baltique par la route maritime du Nord (Northern Sea Route, RMN), qui permet de relier les océans Atlantique et Pacifique en longeant les côtes arctiques russes.
Selon les données de suivi des navires de Refinitiv, le méthanier Velikiy Novgorod a chargé le 14 août 170 200 m3 de GNL depuis l'usine Portovaya LNG. Il doit transiter par la RMN le 22 août avant de rallier, via la Sibérie orientale, la Chine où il attendu mi-septembre.
D’'une capacité annuelle de 1,5 Mt pour ses premiers trains de liquéfaction, le site de Portovaya, situé dans l’oblast de Leningrad, est situé près du port russe de Vyssotsk, en mer Baltique, entre la Pologne et la Lituanie. Entré en service en septembre 2022, sa production a été jusqu'à présent exclusivement exportée en Turquie ou en Grèce.
Au début du mois d’août, une cargaison de naphta en provenance de Russie avait emprunté la même route, selon des négociants
Stratégie arctique
La Russie, qui considère la RMN comme partie intégrante de ses eaux territoriales, s’active depuis longtemps pour élargir la fenêtre saisonnière de navigation dans l’Arctique de façon à en faire une nouvelle voie commerciale entre l’Asie et l’Europe.
La RMN offrirait un raccourci de quinze jours sur le passage par le canal de Suez qui requiert généralement entre 30 et 48 jours.
Avant la guerre en mer Noire, Moscou entendait porter à 80 Mt le volume de marchandises transitant par la RMN d’ici 2025, contre quelque 10 millions à ce stade.
L’exploitation des ressources gazières est un des moteurs de cette quête absolue de navigation. Cette route permet déjà, dans les mois libres de glace, le transport vers l'Asie de GNL, puisé par Novatek, un autre géant russe du gaz, dans les gisements des péninsules russes de Yamal et de Gydan.
À un moment où les échanges commerciaux de la Russie avec les pays du bloc occidental sont contrariés par les événements géopolitiques, la « stratégie arctique » de la Russie pourrait s’accélérer.
Adeline Descamps
Une navigation appelée à se développer avec le réchauffement climatique
En dépit du réchauffement climatique, la navigation le long de la route arctique reste difficile, du moins à certaines périodes. En novembre 2021, 18 navires sont ainsi restés bloqués à divers points de la Route maritime du Nord (RMN).
Cette année, deux aframax et les deux méthaniers Arctic et Primorsky Prospect, ont transporté de l'Oural de la Baltique vers le nord de la Chine. Le voyage a duré environ 46-47 jours. Le suivi AIS indique des ralentissements importants e répétées, notamment entre la mer de Kara et celle des Tchouktches, atteignant parfois une vitesse de 3 à 4 nœuds, probablement en raison des conditions de glace difficiles.
« Dans ce cas, les longs transits réduisent le gain économique du passage, indique le courtier Gibson. en raison de l'obligation d'escorte par des brise-glace, même si les dépenses de soutage soient moins élevées en raison de la distance plus courte et qu'il n'y a pas droits de passage comme pour le canal de Suez ».
Les exportations de brut par voie maritime à partir de Mourmansk restent faibles, de l'ordre de 325 000 barils par jour depuis le début de l'année, mais près de la moitié a été expédiée vers la Chine, selon Gibson.
A.D.