En première lecture à l’Assemblée nationale, le texte proposé par le député Renaissance Le Gac prévoyant un minimum de salaire et de temps de repos pour les marins opérant sur les ferries transmanche a été adopté à l’unanimité. Le pavillon Registre international français (Rif) sera exclu des traversées transmanche par un prochain décret.
Rare unanimité sur un sujet social à l’Assemblée nationale : dans la nuit du mardi 28 au mercredi 29 mars, 153 députés ont adopté la proposition de loi visant à lutter contre le dumping social dans le transport de passagers entre la France et le Royaume-Uni. Aucune voix, parmi les 160 députés présents, n'a voté contre le texte présenté par le député macroniste du Finistère Didier Le Gac. Avec son adoption, « une première étape essentielle a été franchie pour sauver notre marine marchande », s'est emporté l'élu de la majorité.
Le secrétaire d’État chargé de la Mer, Hervé Berville, a déclaré pour sa part à l’issue du vote que ce texte, « fruit d’un long combat mené avec les armateurs et les syndicats » permettra de « continuer à porter le combat au niveau européen ».
Avant même l’unanimité des députés, le projet de réglementer le transport maritime transmanche de passagers avait déjà réuni dans un même objectif les syndicats de marins et les armateurs. Du moins Brittany Ferries et DFDS, P&O et Irish Ferries pratiquant ce dumping social auquel la proposition entend mettre fin.
Le licenciement, en mars 2022 de l’ensemble de ses marins par la société P&O pour les remplacer par des employés étrangers sous-payés et dans des conditions d'emploi dégradées (jusqu'à 17 semaines de suite, 7j/7 et 12h/j) est à l’origine de la volonté de légiférer sur ce sujet. Côté britannique, une loi vient d’entrer en vigueur qui prévoit le salaire minimal national y compris pour les marins naviguant sur des navires battant pavillon étranger.
En France, trois propositions de loi avaient été déposées en janvier dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale : l’une soutenu par la majorité présidentielle, l’autre par la Nupes et la troisième par le Rassemblement national.
Le texte examiné lundi et mardi avait déjà été amendé en commission des affaires sociales le 22 mars, en particulier pour inclure la préparation de deux rapports que le gouvernement doit remettre au parlement dans les neuf mois : l’un sur l’état des pratiques relatives au dumping social, l’autre sur les moyens financiers et humains des services chargés de lutter contre ces pratiques.
Le texte adopté en première lecture à l’Assemblée prévoit pour les marins embarqués sur les ferries transmanche, quel que soit le pavillon du navire, un salaire minimal égal à celui du pavillon français. La loi réglemente aussi le repos des marins, avec un temps à terre équivalent au temps passé à bord. Il est prévu que les modalités pratiques, c’est à dire les durées exactes des temps d’embarquement, soient définies par un futur décret.
C’est également, selon le texte adopté, un décret pris par le gouvernement qui doit exclure le pavillon Rif des liaisons ferries transmanches. Ce recours au décret, plus facile à modifier que la loi, s’explique par la volonté de se mettre à l’abri d’éventuelles actions judiciaires des compagnies maritimes qui pourraient arguer de la pratique d’une navigation internationale et non intra-européenne.
La proposition de loi doit désormais, avant d’entrer en vigueur, être adoptée par le Sénat.
Étienne Berrier