Sursaut ou déclic. Depuis quelques mois, les commandes de navires avec une propulsion plus efficiente sur un plan écologique ont largement pris le dessus au point de représenter 40 % du carnet de commandes.
Ainsi, les porte-conteneurs avec le gaz naturel liquéfié ont atteint les 198 unités représentant une capacité de 2,31 MEVP (données arrêtées au début de cette semaine), soit un peu moins de 30 % du carnet de commandes, indique le dernier relevé d’Alphaliner. Le taux était de 25 % il y a un an.
Mais l’analyste, qui fait autorité dans la ligne régulière, confirme aussi, avec des données, le sentiment projeté par le marché et les commandes en cascade annoncées par les chantiers coréens et chinois : le méthanol convainc de plus en plus. Les contrats de construction de navires bicarburant avec le méthanol concernent 68 unités totalisant une capacité de 0,93 MEVP. Cette option représente désormais 12 % du carnet de commandes en termes de tonnage, contre moins de 1 % il y a un an.
A contrario, la propulsion conventionnelle a pesé pour 14 % de la capacité commandée au cours du second semestre de 2022 et sur les 0,38 MEVP contractés avec les chantiers en 2023 (au 24 février), seuls 8 % l’ont été avec une propulsion conventionnelle (fuel).
Accélération verte, surtout pour le méthanol
Rien qu’en février, HMM en a commandé dix porte-conteneurs de 9 000 EVP auprès de Hyundai Heavy Industries pour une livraison en 2025 et 2026.
Quelques semaines seulement après qu’on lui ait attribué la commande de douze navires de 13 000 EVP au méthanol passée au constructeur sud-coréen Hyundai Samho Heavy Industries, CMA CGM serait à l’origine d’une autre commande importante, cette fois au chantier naval chinois Jiangnan (groupe CSSC) pour une série de six navires de 16 000 EVP, également avec une propulsion bicarburant au méthanol.
Á l’état de spéculation, Alphaliner la formule sans conditionnel. Au prix unitaire estimé à 175 M$, le numéro trois mondial de la ligne régulière pourrait ainsi investir 1,05 Md$ pour cette nouvelle série, dont les livraisons sont prévues pour 2025 et 2026. Selon les rumeurs, d'autres commandes seraient en cours.
Maersk et CMA CGM au coude à coude
Pour Alphaliner, sur la base des commandes fermes et à l’horizon 2025, Maersk et CMA CGM vont se retrouver au coude à coude, avec une prime à CMA CGM (342 000 EVP), au rattrapage record.
Le transporteur danois a commandé à ce jour près de 300 000 EVP de capacité en bicarburation méthanol, ce qui équivaut à 80 % de ses nouvelles constructions sous contrat. Son dernier engagement ferme remonte à octobre et porte sur six unités de 17 000 EVP auprès de Hyundai Heavy pour une livraison resserrée, sur une période de sept mois, d’ici décembre 2025.
OOCL, qui n'est entré sur le marché du tonnage bicarburant au méthanol qu'en octobre dernier, a toutefois commandé sept navires de 24 000 EVP (à Nacks) pour livraison en 2026 et 2027.
Ready or not ready
En revanche, les « prêts pour le carburant », ces navires désignés comme étant configurés pour recevoir le cas échéant du GNL, du méthanol ou de l'ammoniac, sont en perte de vitesse. Il n'y a pas eu de nouveaux contrats de ce type depuis août 2022. Pour autant, ils ont tout pour plaire face à des technologies de rupture qui n’existent pas sur étagères et pour lesquelles tout est à faire.
Garder raison. La flotte existante (97,8 %) a encore recours au bon vieux fuel, dont un tiers environ est équipé de scrubbers, ce qui laisse à penser qu’ils carburent au fuel dont la teneur en soufre est de 3,5 %. La flotte au GNL en commande représente un encore faible 2,2 % de la capacité totale en exploitation.
Adeline Descamps