Assurance maritime : l'évolution des risques en débat

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Organisé chaque année par le Comité d’études et de services des assureurs maritimes et transports (Cesam), Paris MAT, le rendez-vous des assureurs maritimes, s’est tenu les 27 et 28 juin. Au coeur des échanges, les risques générés par la désorganisation logistique et la multiplication des incidents en lien avec la présence de batteries au lithium à bord.

C’est tout naturellement aux évolutions des risques que s’est focalisée l’intervention du président du Cluster maritime français, Frédéric Moncany de Saint-Aignan, qui a ouvert le rendez-vous Paris MAT : « Le nouveau risque, c’est la rupture des chaînes d’approvisionnement. On l’a vécu avec le Covid, on l’a vécu un court instant avec l’Ever Given bloqué à Suez, et on le vit aujourd’hui avec la guerre en Ukraine. On pensait que les choses se rétabliraient rapidement. La crise sanitaire et la guerre en Ukraine accélèrent un phénomène que l’on considérait déjà comme irréversible : le déplacement du centre de l’économie mondiale vers l’Asie. Avec le Covid, nous avons pris conscience de la nécessité de retrouver la souveraineté européenne sur la production et sur la maîtrise des flux de marchandises. Pour cela, il faut absolument garder chez nous les centres de décision. »

Les tensions sur l’emploi et la pénurie d’officiers sont aussi classés parmi les risques pour le président du Cluster : « Pendant des décennies on ne parlait que de chômage. Aujourd’hui je ne connais aucun secteur du maritime qui ne soit pas en tension sur l’emploi. Doubler les effectifs de l’ENSM prend du temps et demande des moyens matériels et humains. Or les enseignants doivent être des navigants ou d’anciens navigants, alors que la marine marchande manque justement d’officiers. »

Incendie et explosion

C’est à une autre forme de risque que s’intéresse Uwe Schieder, expert technique à l’association allemande des assurances GDV et vice-président du comité de la prévention des pertes de l’IUMI (union internationale de l’assurance maritime) : celui de l’incendie à bord, qui peut être amplifié à la fois par la taille toujours croissante des porte-conteneurs et par la présence à bord des rouliers de véhicules électriques dont les batteries électriques sont problématiques comme l’illustre la perte totale du Felicity Ace et de sa cargaisons de berlines de luxe.

« En 50 ans, la taille moyenne des porte conteneurs a été multipliée par quinze alors que la taille des équipages s’est réduite », ajoute Uwe Schieder. Il se trouve donc moins de personnes pour combattre le feu, ce qui ne peut d’ailleurs se faire que pour les conteneurs en pontée. « Pour un feu se déclarant en cale, une des méthodes de combat est de fermer la cale pour l’étouffer, rappelle Uwe Schieder. Autrefois, il suffisait d’un détecteur de fumée dans la cale. L’équipage, une fois en sécurité, déclenchait le CO2 pour étouffer le feu. Aujourd’hui sur les porte-conteneurs les cales ne sont plus étanches, puisque le conteneur protège les marchandises de presque tout… y compris de l’eau. Il est donc impossible d’éteindre un incendie déclenché à l’intérieur d’un conteneur. » La solution préconisée par l’expert : la partition des cales, avec la possibilité de remplir celle où s’est déclaré le feu avec de l’eau provenant des systèmes de ballast.

Problématique des batteries au lithium

La présence à bord de batteries au lithium est un autre source d’inquiétude en cas d’incendie à bord, à plus forte raison pour les rouliers, à bords desquels les batteries des voitures électriques peuvent côtoyer les réservoirs de gasoil des camions. Par ailleurs, les perforations prévues pour l’arrimage des véhicules font communiquer les ponts entre eux et accélèrent la propagation du feu.

La combustion des batteries au lithium produit du dihydrogène, qui constitue un redoutable carburant alimentant l’incendie, et ce même en présence de faibles taux d’oxygène. D’où la nécessité, si l’on recourt au CO2 pour étouffer le feu, de le faire très rapidement et de façon massive pour abaisser le taux d’oxygène sous les 4 %, contre 10 % pour un incendie classique. Ou d’inonder la cale au plus vite avec de l’eau sous pression.

Étienne Berrier

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