Tanger Med vit au rythme des investissements privés

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Sept mois après avoir lancé la phase deux de son plan d'investissement sur le troisième terminal à conteneurs du port marocain, APM Terminals, la filiale portuaire de Maersk, enclenche une nouvelle étape. Les deux terminaux à conteneurs de Tanger Med2 sont pour l'heure un véritable succès commercial. Ils drainent des investissements maritimes et logistiques.

Depuis l’inauguration officielle de Tanger Med2 en juin 2019, le port marocain du détroit de Gibraltar ne cherche pas à contrarier son « mektoub ». Entre 2019 et 2020, il s’est hissé parmi les 25 premiers ports à conteneurs mondiaux, passant en un an de la 31e à la 24e place avec 5,77 MEVP. Il s’est ainsi imposé en tant que nouveau champion méditerranéen, contestant au port espagnol de Valence (5,42 MEVP) mais aussi à Algésiras (5,1 MEVP), le jumeau espagnol d’en face dans le détroit de Gibraltar, leur statut de hub de transbordement en Méditerranée.

Les arbitrages opérés par les armements dans leur réseau durant la crise sanitaire, consistant à s’appuyer sur des ports pivots, ont pleinement profité à la porte d’entrée du royaume chérifien. En 2020, 916 porte-conteneurs de plus de 290 m de long y ont accosté sur un total 4 306 escales de navires marchands. Une hausse de 14 % par rapport à 2019. L’an dernier, Tanger a traité à quatre reprises 500 000 EVP par mois et a même une fois atteint les 530 000 unités

Juteuse opération d’extension

Il le doit en partie à sa phase d'extension dite Tanger Med2 qui, avec ses deux nouveaux terminaux à conteneurs (TC3 et TC4), a apporté une capacité additionnelle de 6 MEVP portant la capacité nominale du complexe portuaire à 9 MEVP. Grâce à ses 2,8 km de linéaire de quais à 18 m de tirant d’eau, il peut ainsi accueillir simultanément sept porte-conteneurs de 400 m de long et de 22 000 EVP.

Le monumental chantier, dont les travaux avaient été lancés en 2010, aura toutefois coûté 8,1 Md€ de financements privés et publics, ce qui lui vaut aujourd’hui un endettement non négligeable : en 2020, Tanger Med SA a affiché un endettement global de 10 milliards de dirhams – 1,1 Md$ – dont 7,6 milliards pour Tanger Med2.

Hapag-Lloyd et Maersk aux affaires

Livré à l’issue de 18 mois de travaux et moyennant 215 M$ d’investissement, le troisième terminal à conteneurs (TC3) a a été concédé à Marsa International Tangier Terminals SA, un consortium formé du principal opérateur portuaire du pays, Marsa Maroc (50 %), et d’Eurogate/Contship Italia (40 %), qui ont été ensuite rejoints par Hapag Lloyd à hauteur de 10 % du capital. Dernièrement, il a été annoncé que l’État marocain cédera 35 % du capital de l’exploitant de terminaux portuaires Marsa, présent dans 9 ports du Royaume, au profit de Tanger Med. Le gouvernement marocain conservera une participation de 25 % du capital et des droits de vote.

Après un chantier de 800 M$, le TC4, quatrième installation et seconde de Tanger Med2 a, elle, été confiée à APM Terminals pour une durée de 30 ans. La filiale portuaire du groupe danois A.P. Møller-Maersk, qui gère depuis juillet 2007 un autre terminal sur Tanger Med1 (1,8 MEVP), a prévu d’y investir 1,1 Md€ sur la durée de sa concession.

De 1 200 m à 2 000 m de quai

Le danois a annoncé en avril dernier une nouvelle phase d’extension sur son nouvel outil. Dans sa forme actuelle, l'infrastructure offre 1 200 m de quai et est équipée de douze grues à conteneurs navire-terre (STS) de taille mégamax. D’une capacité nominale de 3 MEVP par an, le terminal a enregistré 2,2 MEVP en 2020 d’après Alphaliner. APM Terminals MedPort Tangier a enclenché une nouvelle phase d’investissement pour porter le linéaire à 2 000 m et l’ensemble à 5 MEVP. Ces réalisations nécessiteront un investissement de plus de 400 M$ selon des sources croisées.

+35 % au premier trimestre

Mitoyen de Tanger Med I, ouvert en 2007, TangerMed2 a représenté la troisième phase de développement de Tanger, avec le terminal dédié aux passagers et aux rouliers (capacité d’un million de véhicules, 700 000 unités TIR et 7 millions de passagers).

Le complexe portuaire a très bien démarré l’année 2021 avec une croissance de son trafic de 35 % (1,8 MEVP) dès le premier trimestre, bénéficiant de l’arrivée de nouveaux services sur le TC3, dont les FE2 et SPX (rotation Asie-Europe et Europe du sud-Afrique) de Hapag-Lloyd, actionnaire du terminal, mais aussi du FAL3 de CMA CGM dont les navires touchent Tanger à l’import et à l’export. Le Bijagos Shuttle de la compagnie française escale par ailleurs en fréquence saisonnière et bi-hebdomadaire sur le TC2 en service feeder intra-africain. En outre, l’implantation dans les zones logistiques attenantes de Dachser, Gefco et de l’industriel Te Connectivity, spécialisé dans la fabrication de capteurs électroniques, y ont drainé de nouveaux flux.

Ro-ro en yo-yo

Avec une progression de 15 % sur les trois premiers mois et 112 419 unités, le trafic ro-ro a reflété la reprise économique européenne, qui s’est grippée depuis en raison de la pénurie de puces électroniques. À nouveau, l’année ne devrait pas être si profitable que prévu.

En 2020, le trafic de véhicules neufs manutentionnés sur les deux terminaux dédiés avait accusé une baisse de 28 % par rapport à 2019 avec 358 175 unités. Le premier port marocain avait notamment payé sa dépendance à la production automobile de Renault (de 400 000 à 500 000 véhicules par an en temps ordinaires) et de PSA, les deux constructeurs français étant implantés à Tanger et Kenitra.  

Adeline Descamps

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