Face à la faiblesse persistante des trafics, le port de Liverpool annonce un plan social

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Port de Liverpool

Crédit photo ©Adeline Descamps
Un an, quasiment jour pour jour, après être parvenu à un accord sur les salaires avec les dockers à l'issue d'un mois de complications à Liverpool, l'opérateur portuaire Peel Ports annonce un plan social qui peut concerner jusqu'a 125 des 850 salariés dans les deux terminaux à conteneurs. La forte inflation outre-Manche pèse sur les importations conteneurisées des ports britanniques.

Un an après un mouvement social d’ampleur, en trois temps du 19 septembre au 7 novembre, le port de Liverpool est de nouveau rattrapé par les difficultés.

Face à une baisse persistante des volumes de conteneurs et sans améliorations en perspective, annonce l'opérateur portuaire britannique Peel Ports, il se dit contraint de mettre en œuvre un plan social dans les deux terminaux à conteneurs qu’il opère à Liverpool (75 000 EVP, 60 escales par mois).

L’employeur a bien engagé les procédures requises par le droit du travail britannique en cas de licenciement économique, ouvrant la période d’information et de concertation des syndicats qui peut durer jusqu'à 45 jours.

Dans un communiqué, Peel Ports, qui opère dans huit ports en Grande Bretagne, considère cette décision comme « inévitable » au regard de la situation des ports britanniques.

Un trafic inférieur de 12 %

Selon ses données, les ports du pays ont enregistré un trafic inférieur de 12 % au cours du premier semestre à celui de l’année dernière, déjà en recul de 7 %.

Sorti de l’UE, le Royaume-Uni a fait les frais des mouvements sociaux l’an dernier. Felixstowe a décroché de 9 % pour s’établir à 3,3 MEVP et Southampton de 5 % (1,73 MEVP). Londres en a profité en revanche (1,96 MEVP, + 6 %).

Une sévère inflation

La Grande-Bretagne est l’un des pays en Europe les plus sévèrement sanctionnés par l’inflation, qui a pu dépasser les 10 % l’an dernier. Il est par ailleurs le seul du G7 à ne pas avoir retrouvé son niveau d’activité prépandémique.

La valse des étiquettes a perduré cette année et les prix étaient encore en juin supérieurs de 7,3 % à leur niveau un an auparavant. Ils reculent aussi plus lentement qu’ailleurs.

Par crainte d’aggraver l’inflation, le gouvernement britannique a même annoncé fin août et ce, pour la cinquième fois, le report de la mise en œuvre de ses contrôles sanitaires frontaliers post-Brexit. Les formalités administratives sur les importations de produits alimentaires et frais provenant de l’Union européenne, qui devaient être mises en place pour la fin octobre, n’entreront en vigueur qu’en janvier prochain.

Tension sur les importations conteneurisées

La direction mentionne donc à raison l'impact de l'inflation sur la demande de biens de consommation, pilier des importations conteneurisés. D’autant que la tension sur les prix n’est pas le seul facteur qui pèse sur le panier des ménages. La remontée des taux d'intérêt est amère outre-Manche où les prêts sont majoritairement souscrits à taux variable.

Elle évoque aussi les effets géopolitiques (guerre en Ukraine) et la crainte d'une récession imminente que nombre d’analyste promettent en effet à l'île d’ici la fin de l’année.

Les derniers indicateurs économiques communiqués en août par le Bureau des statistiques nationales britanniques avaient trompé les attentes par leur robustesse (PIB en hausse de 0,2 % au deuxième trimestre, meilleure performance depuis plus d'un an), porté par les dépenses des ménages (+ 0,7 %), l'investissement des entreprises (+ 3,4 %), et la forte augmentation des dépenses publiques.

Jusqu'à 125 licenciements

L’opérateur portuaire envisage de licencier jusqu'à 125 personnes (sur les 850 salariés). L'entreprise et le syndicat Unite the Union, majoritaire dans les ports au Royaume-Uni, se sont mutuellement engagés à travailler au reclassement des personnes concernées.

Au Royaume-Uni, l’Employment Rights Act ne prévoit pas expressément une obligation de reclassement préalable. Celle-ci a été dégagée par la jurisprudence qui prévoit l’obligation pour l’employeur de « se comporter de manière raisonnable ». Mais il n’est pas tenu comme son homologue français à reclasser le salarié à la fois dans l’entreprise et, le cas échéant, dans les autres entreprises du groupe.

Un accord arraché in extremis l'an dernier

Bien qu'il ne soit pas aussi grand que Felixstowe, Liverpool est l'un des principaux ports du nord-ouest de l’île. Le Royal Seaforth Container Terminal (RSCT), le plus ancien des deux terminaux, et Liverpool2, dans lequel Peel Ports a investi 400 M£, sont reliés à l’Écosse, Dublin et aux ports intérieurs le long du Manchester Ship Canal.

En novembre 2022, alors que les dockers menaçaient d’une quatrième grève si leur demande n'était pas satisfaite – un alignement de la base des salaires sur le niveau de l’inflation –, un accord avait été arraché in extremis par les syndicats.

Après avoir suspendu le travail du 19 septembre au 3 octobre puis du 11 au 17 octobre, et enfin du 24 octobre au 7 novembre, les 600 dockers avaient obtenu des augmentations de salaires entre 14 % et 18 %, selon les catégories d'emploi.

L’employeur avait proposé initialement « un paquet salarial avec une augmentation de 8,3 % et une prime de 750 £ », et à effet rétroactif (à partir de juin 2022), rappelant qu'il avait déjà concédé une augmentation de 4,5 % en 2021.

Agitation sociale

Les grèves à Liverpool sont intervenues dans un contexte d’agitation sociale touchant de nombreux secteurs au Royaume-Uni, notamment les transports et d’autres ports comme Felixtowe.

À Liverpool, alors que les dockers entamaient leur second débrayage pour obtenir une revalorisation de la grille salariale, Peel Ports avait annoncé son intention de mettre en œuvre un plan social en raison d’une « détérioration marquée » de son environnement, prévoyant une baisse d'au moins 30 % des volumes à long terme.

Adeline Descamps

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