Les prix du gaz européen sous de multiples influences

Article réservé aux abonnés

L’escalade diplomatique autour du gazoduc germano-russe controversé Nord Stream 2 fait flamber les prix du gaz. Toutes les conditions sont réunies pour maintenir des prix durablement élevés. Les stocks sont passablement bas. La saison hivernale s’annonce très froide. Et la révolution verte en Europe a fait perdre en flexibilité. Le GNL « peut sauver l’Europe », explique le négociant d'énergies MET.

La crainte d’une invasion de l'Ukraine par les troupes russes a de nouveau tendu les relations entre les occidentaux et la Russie. Le gazoduc, reliant la Russie à l'Allemagne via la mer Baltique, « ne peut de toute façon pas pour le moment être autorisé car il ne remplit pas les règles de la législation européenne de l'énergie », a balayé la ministre allemande des Affaires étrangères, à l’issue d’une réunion du G7 consacrée notamment aux tensions avec le grand voisin russe. Le ministre américain des Affaires étrangères Blinken a pour sa part déclaré que la mise en service de Nord Stream 2 était « peu probable si la Russie poursuit son agression envers l'Ukraine ».

Pour rappel, mi-novembre, l'autorité allemande de régulation de l'énergie avait suspendu la procédure de certification de Nord Stream 2 – dont la construction est terminée – en demandant au consortium suisse chargé de son exploitation de créer une société de droit allemand.

Ce gazoduc, ardemment voulu par le président russe Poutine mais aussi par la chancellerie outre-Rhin, est très critiqué par de nombreux pays européens de l’Est, à commencer par la Pologne, qui s'inquiètent d'une trop grande dépendance de l'Europe à l'égard de la Russie de Poutine. Par ailleurs l'Ukraine, un des grands pays de transit du gaz russe vers l'Europe mais contourné par le nouvel ouvrage, craint d'en ressortir économiquement affaiblie.

Stocks particulièrement bas

Le risque d'un retard dans les livraisons de gaz russe à l'Europe et les menaces qu’il fait peser sur l’approvisionnement hivernal ont provoqué un nouvel accès de fièvre dans les prix du gaz, actuellement fixés à leur plus haut niveau, dans une fourchette entre 80 et 100 €/MWh. Le contrat TTF européen de référence à un mois était en hausse de 10,85 €, à 116,20 €/MWh. La référence EUA décembre 2021 CFI2Zc1 était en hausse de 0,93 €, à 84,66 € la tonne.

Les prix sont soutenus par les niveaux particulièrement bas des stocks de gaz (le précédent historique date de 10 ans) et par les prévisions d’une saison hivernale particulièrement froide. D’avis d’experts, les conditions météorologiques restent le principal facteur d'influence des prix : plus ou moins 2 degrés au-dessus ou au-dessous représenterait l'équivalent de centaines de millions de mètres cubes de gaz sur un horizon d'une semaine.

Le négociant européen en énergies MET a modélisé l'impact des changements météorologiques sur les niveaux de stockage. Un temps particulièrement froid pourrait par exemple vider les stocks européens à 90 %, alors qu'en tenant compte du temps des derniers hivers, le taux de remplissage serait supérieur à 20 % à l’issue de la période hivernale.

Révolution verte

La « révolution verte » en Europe – avec l’abandon du lignite, du charbon dans une grande partie de l'Europe, la sortie progressive du nucléaire en Allemagne et l’électrification progressive du parc de véhicules –, devrait assurer la fermeté des prix pendant un certain temps.

Selon MET, la volatilité des prix, aux positions hyper aléatoires, « va probablement se poursuivre ». Le système gazier européen est façonné par des « pertes de flexibilité », indique le négociant, imputant les ajustements opérés ces dernières années sur les contrats à long terme (délaissés au profit du spot), tandis que dans le secteur de l'électricité, « l'offre de base est moins importante en raison de la fermeture des centrales nucléaires, au charbon et au lignite ».

Pour le courtier de matières premières, le GNL « peut sauver l’Europe ». Les écarts de prix entre les deux références de prix pour le gaz naturel et le GNL (TTF et JKM) « laissent présager des volumes à destination de l'Europe plus importants en janvier et février » si une vague de froid en Asie du Nord-Est ne vient pas modifier la dynamique du marché. « Les détenteurs de stocks de gaz européens pourraient alors chercher à vendre plutôt que d'attendre mars, lorsque les prix sont beaucoup plus bas. »

Adeline Descamps

 

 

Marchés

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15