« La reprise encourageante du marché des pétroliers mise en évidence au moment de nos résultats du troisième trimestre a malheureusement été différée par la propagation du variant omicron à partir de la mi-novembre et les restrictions rapides de l'activité économique qui y ont été associées. Nous pensons qu'il s'agit d'un décalage temporaire », a réaffirmé Hugo de Stoop, le PDG d'Euronav.
Plombé par des taux de fret pétroliers en grande dépression, la société de transport maritime spécialisée dans le transport et le stockage de pétrole brut a enregistré un résultat net négatif de 339,2 M$ en 2021 – dont 71,8 M$ au cours du seul quatrième trimestre – contre un bénéfice de 473,2 millions en 2020. Le bénéfice avant intérêt, impôts, dépréciation et amortissement (Ebitda) ressort à 85,42 M$ contre 864 M$ au cours de l’exercice précédent.
Son chiffre d’affaires s’est établi à 419,8 M$ (dont 364,42 M$ pour les tankers), contre 1,2 Md$ l’année précédente. Sur l’année, le taux de fret spot moyen d’un VLCC (capacité de transport de deux millions de barils) a atteint 11 300 $, contre 54 600 $ en 2020. Le suezmax a gagné en moyenne 11 100 $ (39 400 $ en 2020).
Sous le seuil de rentabilité
Au cours du premier trimestre de 2022, la flotte de VLCC de l’armateur (43 unités), négociés dans le Tankers International Pool dont Euronav est l'un des principaux partenaires, est resté en deçà du seuil de rentabilité, à 12 500 $ par jour alors que 43 % des jours disponibles ont été fixés. Les suezmax (27 unités), qui opèrent aussi sur le marché spot, ont été négociés autour de 12 500 $/j en moyenne et 45 % des jours disponibles avaient été contractés.
La société belge ne se laisse pas pour autant perturber par la mauvaise conjoncture et poursuit le programme de renouvellement de sa flotte. Elle a réceptionné en janvier deux suezmax du sud-coréen Daehan Shipbuilding (DHSC) et devrait être livrée de six autres au cours des 18 prochains mois, dont trois VLCC (premier et le deuxième trimestre de 2023) et trois autres suezmax (troisième trimestre de 2023 et premier trimestre de 2024). Un investissement de 414 M$.
Configuration positive du secteur
Pendant la majeure partie de 2021, les volumes transportés par l’exploitant belge de VLCC auront été inférieurs aux niveaux de 2019 même s’ils se sont légèrement améliorés au cours des troisième et quatrième trimestres, soutenus par le retour de la demande asiatique d'importation de brut. Le dirigeant s’attend à un « fort rebond de l'offre de pétrole en 2022 ».
Plusieurs données étayent, selon lui, une configuration positive pour le secteur : l'OPEP (2,9 millions de barils par jour) et les pays non OPEP (3,3 MB/j) devraient augmenter leurs volumes de 6,2 Mb/j tandis qu’il est prévu un rebond de la consommation de 4,6 Mb/j. La production devrait ainsi retrouver son niveau de 2019, à savoir autour de 100 Mb/j alors que les stocks mondiaux de brut sont à leur plus bas niveau depuis six ans. Par ailleurs, aucune commande n’a été enregistrée pour les VLCC ou les suezmax, pour la première fois depuis le deuxième trimestre 2009, alors que 25 VLCC ont été envoyés à la casse.
« Le ratio carnet de commandes/flotte (le plus bas depuis 25 ans), la flotte âgée (25 % de plus de 15 ans) et les nouvelles réglementations sur les émissions (par exemple, l'EEXI en 2023) constituent une base favorable à la reprise », assure le dirigeant.
708 M$ de liquidités
L’exploitant de superpétroliers, coté sur Euronext Brussels et sur le NYSE, maintient son objectif de verser 0,3 $ par action à ses actionnaires malgré les conditions actuelles du marché. La rémunération sera soumise lors de l'assemblée générale annuelle en mai.
« La société dispose d’une base financière solide, assure Hugo de Stoop, et d'excellentes relations avec ses investisseurs ». Fin décembre 2021, la société bénéficiait de 708 M$ de liquidités, dont 556 M$ de facilités de crédit.
Adeline Descamps