Le premier méthanier de classe glace construit par la Russie a démarré ses essais en mer, selon les données de LSEG. Le navire, baptisé Alexey Kosygin, nom d'un homme d'État soviétique, sort du chantier naval Zvezda et devrait rejoindre la flotte de navires conçus pour transporter le GNL issu d'Arctic LNG 2, projet porté par le producteur de gaz Novatek, dont les avancées sont entravées par des sanctions américaines en réaction à l'invasion de l'Ukraine par la Russie.
Le groupe russe, qui détient 60 % de la société exploitant Arctic LNG 2*, avait envisagé, avant la guerre entre l'Ukraine et la Russie, la construction de 21 méthaniers Arc7 de classe glace d'une capacité de 172 600 m3 pour transporter le GNL issu de la péninsule de Gydan. Le second complexe de liquéfaction de Novatek se situe à une trentaine de kilomètres de Yamal LNG, son clone qui exploite depuis 2017 les ressources de gaz du champ South Tambey au nord-ouest de la Sibérie.
Contraint dans les expéditions
Les navires ont tous été commandés mais n'ont pas pu être livrés. Visé par plusieurs sanctions, qui ont contraint les banques internationales à suspendre tout financement et ses actionnaires (dont TotalEnergies) à se désengager et du financement et des contrats d'achat long terme, Novatek doit financer ses navires par ses propres moyens et vendre le gaz sur le marché au comptant. Quinze d'entre eux ont été confiés au chantier naval de Zvezda. Deux d'entre eux devraient être achevés d'ici la fin de 2024 ou le début de 2025 (au lieu de 2023 initialement) tandis que seuls trois méthaniers composent à ce stade la flotte dédiée à Arctic LNG 2 : les Alexey Kosygin, Pyotr Stolypin et Sergei Witte. Mais énième coup dur : la compagnie japonaise MOL a indiqué en octobre qu'elle ne serait pas en mesure d'exercer ses responsabilités dans l'affrètement des trois unités en raison du durcissement des sanctions occidentales, notamment américaines. Les trois navires font partie de la série de six confiée à Hanwha Ocean, (ex-DSME). Les trois autres, dédiés à Sovcomflot, ont également été annulés en raison des sanctions, selon un document déposé en bourse par le chantier naval.
Arctic LNG 2, qui prévoit la construction de trois trains de liquéfaction de GNL d’une capacité de production de 6,6 Mt par an chacun, devait être opérationnel à la fin du premier trimestre 2024 pour atteindre en 2026 sa pleine capacité. La production, depuis le premier train de liquéfaction, a démarré en fin d'année dernière mais a été suspendue en octobre jusqu'à nouvel ordre, Novatek ayant déclaré la force majeure.
Arctic LNG2 est, avec Yamal (Novatek) et Sakhalin 2 (porté par Gazprom), l'un des grands projets de production à grande échelle de gaz naturel liquéfié dans l'Arctique. Ils sont tous trois essentiels aux ambitions de la Russie, qui veut porter sa part mondiale de 8 % à 15-20 % d'ici 2035 face à ses concurrents américains, qataris et australiens, soit un niveau de production d'environ 100 Mt par an.
Adeline Descamps
* TotalEnergies détient toujours 10 % des actions (mais ne perçoit plus de dividendes en raison des sanctions), les Chinois CNPC et CNOOC, 10 % chacun, et Japan Arctic LNG (consortium entre Mitsui & Co et Jogmec), également 10 %.
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