Il y a un an, à la même époque, les grandes compagnies pétrolières européennes annonçaient la cession de leurs participations dans des projets russes et/ou la suspension de leurs activités dans le pays. BP avec Rosneft. Shell avec Gazprom. Equinor avec Rosneft. TotalÉnergies ou Technip Energies avec Novatek. Engie avec Nord Stream 2....
BP, un des premiers à se mettre en conformité
Le groupe pétrolier et gazier BP avait été parmi les premiers à annoncer le plan de sortie de ses actifs russes, trois jours seulement après l’invasion de l’Ukraine. Présente en Russie depuis trois décennies, la major britannique était actionnaire à hauteur de 19,75 % du deuxième producteur russe de pétrole Rosneft.
Cette affaire a pesé fortement sur ses résultats année, représentant une charge de plus de 24 Md$ dans son compte de résultats annuels.
En décembre, neuf mois après s'être engagé à sortir du groupe pétrolier russe (qui a aussi connu une année 2022 difficile) pour se conformer aux sanctions occidentales, le groupe pétrolier britannique évoquait une cession complexe.
Un an plus tard, BP a enregistré un bénéfice net part du groupe de 8,2 Md$ au premier trimestre.
Réaction prompte de Shell
Shell avait réagi tout aussi promptement aux sanctions européennes. Son conseil d'administration s’était engagé dès la fin février à revendre ses parts dans plusieurs projets communs avec le russe Gazprom à l’instar du projet Sakhalin-II dont l’entreprise européenne était actionnaire à hauteur de 27,5 %.
Le groupe pétrolier avait été contraint d'abandonner en outre le gazoduc Nord Stream 2 (achevé mais pas mis en service) dont il avait financé la construction à hauteur de 10 % des 9,5 Md$. Ses autres engagements concernaient les gisements en Sibérie de Salym et Guydan, détenus à 50 %.
L’entreprise a annoncé le 4 mai un bénéfice net part du groupe en progression de 22 % sur un an, à 8,7 Md$. Le bénéfice ajusté, mesure de référence du secteur, affiche une progression plus modérée de près de 6 % à 9,6 Md$. Le chiffre d'affaires trimestriel s'inscrit à 89 Md$, en hausse de 7 % (voir plus bas).
Pour mémoire, les parts de Shell dans des entreprises russes valaient 3 Md$ et avaient généré un bénéfice de 700 M$ en 2021.
Contraste avec TotalEnergies
La rapidité de réaction de Shell et BP avait contrasté avec l’attitude plus réservé de TotalEnergies, qui ayant le plus à perdre, a longtemps dilué ses réponses.
Le groupe français était alors actionnaire à 19,4 % du géant du gaz russe Novatek.
Il est aussi très investi dans les riches complexes gaziers en Arctique, détenant une participation de 20 % dans Yamal LNG qui exploite les ressources du champ South Tambey sur la péninsule de Yamal au nord-ouest de la Sibérie et 10 % dans Arctic LNG 2, clone de Yamal LNG. Les deux gisements sont portés par le grand producteur de gaz russe.
Novatek, propriété à 10 % de Gazprom, est visé par les liens de son principal actionnaire, Leonid Mikhelson, avec Vladimir Poutine.
Le 9 décembre, le Français a fini par annoncer la déconsolidation de sa participation de 19,4 % et le retrait de ses administrateurs de la société. La décision lui a coûté une dépréciation de 3,7 Md$ au quatrième trimestre.
TotalEnergies a néanmoins enregistré un résultat net en hausse de 12 %, à 5,6 Md$ au cours du premier trimestre de cette année, contre 4,9 milliards il y a un an à la même époque. Les ventes et le prix moyen du GNL sont toutefois en baisse.
Technip Energies, partie prenant de Arctic LNG2
Le géant français du gaz et du pétrole n’a pas été le seul dont la position a été traquée. Technip Energies était aussi exposé à la Russie en étant partie prenante de Arctic LNG 2.
La société d'ingénierie vient d'annoncer un résultat net en hausse au premier trimestre de 18,3 %, à 81,4 M€. Le chiffre d'affaires ressort à 1,4 Md€, en baisse par rapport au premier trimestre 2022 (1,7 Md€), notamment du fait de la sortie du projet Artic LNG2 en Russie, « partiellement compensée » par des projets de GNL au Qatar.
Si Technip Energies est très impliqué dans le GNL, elle dit vouloir accélérer sur la transition énergétique et miser sur l'hydrogène vert. Avec la société belge John Cockerill, spécialiste des électrolyseurs, elle vient d'annoncer la création d'une coentreprise, Rely (60/40% par John Cockerill), spécialisée dans le Power-to-X. La technologie permet la conversion de l'électricité renouvelable, par nature intermittente, en un autre vecteur énergétique, stockable.
Adeline Descamps
Lire aussi : TotalEnergies, Shell, Equinor, ExxonMobile, Chevron : des profits proches des 200 Md$ en 2022
Shell : des ventes de GNL en baisse
Shell, le leader mondial pour le GNL a connu au cours du premier trimestre le même sort que TotalEnergies, dont les ventes de gaz naturel liquéfié ont baissé de 17 % au cours du premier trimestre. Shell a vendu 16,97 Mt de GNL entre janvier et mars, ce qui représente une baisse par rapport aux 18,29 millions au cours de la même période l'année dernière.
Les ventes ont légèrement augmenté de 1 % par rapport au trimestre précédent (16,82 Mt). Les volumes de liquéfaction ont chuté de 10,1 % sur une base annuelle pour atteindre 7,19 Mt au cours du premier trimestre. Cependant, les volumes de liquéfaction ont augmenté de 6 % par rapport aux 6,78 Mt du trimestre précédent, notamment en raisond'une sollicitation accrue du complexe Prelude FLNG en Australie.
La société s'attend à ce que les volumes de liquéfaction atteignent environ 6,8 à 7,4 Mt au deuxième trimestre.
La production totale de pétrole et de gaz, par rapport au quatrième trimestre 2022, a augmenté de 6 % pour atteindre 970 000 barils équivalent pétrole par jour, du fait d'une maintenance réduite à Prelude et de la montée en puissance de nouveaux champs, souligne la major.
Le segment appelé Gaz intégré a enregistré des bénéfices ajustés de 4,91 Md$ au premier trimestre (versus 4,09 Md$ il y a un an et 5,96 Md$ du trimestre précédent, reflétant la baisse des prix.