L’association Équilibre des énergies, qui rassemble de grandes entreprises des secteurs de l’énergie, du bâtiment et des transports, a publié en avril une étude sur le captage, le stockage et la valorisation du CO2. La capture du carbone, jusqu’ici peu rentable avec un prix stagnant autour de 6 €/t pendant la décennie 2010, a trouvé un nouvel intérêt alors que le prix du CO2 oscille depuis un an aux alentours de 80 €/t. Il y aurait donc désormais une certaine rentabilité au captage du CO2.
« Les technologies de transfert par pipe et de liquéfaction dans les ports en vue du transport maritime sont bien maîtrisées, estime Jean-Pierre Hauet, le président du comité scientifique de l’association. Le transport maritime, à bord de navires de 10 000 à 30 000 m3 de capacité, trouvera sa place à partir de hubs situés le long de la mer du Nord, et peut être aussi ultérieurement de la mer Méditerranée ou de la mer Noire. »
Les projets de hub de CO2 se sont déjà multipliés dans les ports de la mer du Nord, généralement portés par les grandes entreprises du secteur pétrolier et gazier: projet d’Artagnan à Dunkerque, Porthos à Rotterdam, Antwerp@c à Anvers, Ghent Carbon Hub à Gand. Côté méditerranéen, les choses sont moins avancées mais Air Liquide et le pétrolier italien Eni ont fait part d’un projet en mars dernier. « Aujourd’hui, on peut considérer comme très improbable le recours à un stockage souterrain onshore en Europe et les opérateurs se limitent à considérer des projets offshore, principalement en mer du Nord », note dans son étude l’association Équilibre des énergies. « Lorsque les sites de réinjection sont relativement éloignés des côtes, ce qui sera probablement de plus en plus le cas, le transport maritime semble plus économique que par pipeline, dès lors que l’on considère des volumes annuels de plusieurs millions de tonnes. »
À plus long terme les prévisions de captage de CO2 établies par l’UE font état de 300 à 500 Mt à l’horizon 2050. À l’échelle mondiale, l’Agence internationale de l’énergie estime que, sur 40 milliards de tonnes émises, on pourrait en capter 5,7 milliards en 2050.
Au-delà du stockage du CO2, le captage ouvre la voie à la fabrication de carburants de synthèse. « Jusqu’ici le dioxyde de carbone, inerte, était considéré comme un déchet, rappelle Jean-Pierre Hauet. Il peut constituer une ressource si on lui redonne de l’énergie. Or les carburants de synthèse nécessitent du carbone, et si possible neutre en CO2, c’est-à-dire que l’on va récupérer dans l’air. » Dans ce domaine, tout dépendra du coût futur de la tonne de carbone, avec un point d’équilibre estimé par les auteurs de l’étude aux alentours de 150 €/t. À l’avenir, le CO2 capturé pourrait aussi être utilisé comme crédit dans le système européen d’échange de quotas d’émission (ETS).