MSC, CMA CGM, Maersk trois approches dans le fret aérien

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Les trois premiers armateurs mondiaux ont pris de l’altitude en poursuivant une finalité peu ou prou similaire, avec des moyens financiers plus ou moins égaux, mais pas avec le même empressement. Ils investissent un domaine aussi sensible aux cycles que le maritime.

Conformément au plan de vol que le premier armateur mondial de porte-conteneurs avait présenté lors du lancement de sa propre compagnie aérienne MSC Air Cargo, le premier B777-200F d’une série de quatre a été a été livré fin novembre.

MSC Air Cargo est ainsi en mesure de démarrer ses opérations en 2023. C’est l’horizon que le groupe de la famille Aponte s’est fixé.

« Nos clients ont besoin de solutions aériennes, c’est pourquoi nous intégrons ce mode de transport en complément de nos opérations de fret maritime et terrestre. La livraison de ce premier appareil marque le début de notre investissement à long terme dans le fret aérien », a indiqué à cette occasion Jannie Davel, que MSC a recruté pour diriger sa nouvelle filiale.

« Depuis mon arrivée chez MSC, j’ai rencontré de nombreux partenaires et clients et il est clair que le fret aérien, pour ses qualités en termes de vitesse, de flexibilité et de fiabilité, peut répondre aux besoins logistiques d’un certain nombre d’entreprises (…) Il présente aussi des avantages particuliers pour le transport des denrées périssables, des produits pharmaceutiques et les marchandises de grande valeur », ajoute l’ex-directeur commercial de Delta Cargo qui a occupé des postes de responsabilité au sein d’Emirates SkyCargo et de DHL.

Avant de penser à se doter de sa propre compagnie aérienne, MSC avait déposé une offre en janvier, conjointement avec la compagnie aérienne allemande Lufthansa, pour acquérir une participation majoritaire d’ITA Airways dans le cadre de la privatisation partielle de la compagnie italienne, héritière d’Alitalia Airways. Mais le ministère italien de l’Économie avait finalement choisi fin août de poursuivre les échanges avec l’offre concurrente pilotée par le fonds d’investissement américain Certares, associé à Air France-KLM et Delta Air Lines. Bien que le nouveau gouvernement italien, qui a succédé à celui de Mario Draghi, a finalement décidé de ne pas aller plus loin avec ce dernier, la compagnie aux origines italiennes a fait savoir récemment « qu’elle n’était plus intéressée » par le dossier. Entre-temps, elle a pris son envol en solitaire…

Trois types de décollage

MSC est le dernier du trio de tête de la ligne régulière à poursuivre cette approche, qui relève à la fois du pari risqué et de l’aventure pionnière, mais qui n’est qu’un volet d’un projet stratégique: devenir opérateur de logistique global. C’est net et assumé chez Maersk qui a multiplié les acquisitions (entreposage, gestion sous douane, traitement des commandes, livraison du dernier kilomètre, logistique de projet…) et chez CMA CGM qui a musclé Ceva Logistics, ex-commissionnaire suisse acquis en 2018, avec des spécialistes de la distribution et livraison de véhicules, du dernier kilomètre, de la logistique retour… C’est moins évident pour le transporteur de Genève, plus réservé sur ce plan.

Néanmoins, pour prendre de l’altitude, l’armateur semble procéder comme CMA CGM à ses débuts dans le fret aérien: confier l’exploitation des avions à un partenaire aérien confirmé. La future flotte de MSC sera opérée par Atlas Air, une filiale du groupe Atlas Air Worldwide.

La compagnie française a en effet démarré en février 2021 en s’appuyant sur Air Belgium, depuis sa plateforme de Liège avant de créer une compagnie de fret aérien indépendante, CMA CGM Air Cargo. Celle-ci dispose aujourd’hui de son Certificat de transporteur aérien (CTA), de ses pilotes et de ses avions.

Elle a récemment lancé son premier service aérien entre Paris-CDG et Hong Kong après avoir inauguré des vols transatlantiques depuis Liège. Ce lancement marque le transfert progressif de ses six freighters (quatre A330-200F et deux B777F neufs) de Liège à Roissy, qui sera désormais leur base.

Deux autres Boeing, ceux-là neufs, doivent entrer en flotte à partir de 2024 tandis que quatre A350F, le nouveau freighter d’Airbus, ont été commandés et entreront en service entre 2025 et 2026.

Toutefois l’alliance de partage avec Air France-KLM, dont l’armateur français est désormais le premier actionnaire privé avec 9 % du capital, et second derrière les États français et néerlandais, contrarie l’intention de départ. Dans les faits, la toute jeune compagnie serait devenue un joint-venture des deux mastodontes du transport aérien et maritime, sous la direction du transporteur aérien franco-néerlandais.

Maersk sur le tarmac

Maersk, pour sa part, abandonné en avril 2022 Star Air, le nom de sa compagnie aérienne tout-cargo depuis 1996, au profit de Maersk Air Cargo, propriété du groupe A.P. Møller Maersk. Billund devient l’aéroport où seront basés les appareils alors qu’ils étaient jusqu’ici à Cologne-Bonn.

Star Air avait été créée en 1987 au moment de la déréglementation du ciel. Filiale de Maersk Air, elle avait échappé à la revente en 2005 lorsque Maersk Air avait été vendue à Sterling Airlines. L’entreprise avait alors été rattachée directement au groupe A.P. Møller-Maersk.

Le groupe danois avait annoncé en novembre, à l’occasion de la présentation de ses résultats du troisième trimestre, la commande de deux B777F neufs (à livrer en 2024) et l’affrètement de trois B767-300F auprès de Cargo Aircraft Management. A.P. Møller-Maersk avait dans le même mouvement fait part de l’acquisition de Senator International, un commissionnaire de transport allemand, plutôt spécialisé dans le fret aérien (65 % de son chiffre d’affaires, 19 vols quotidiens) et particulièrement établi dans l’industrie automobile et pharmaceutique.

« Notre ambition est de faire transporter environ un tiers de notre tonnage aérien annuel au sein de notre propre réseau. Cet objectif sera atteint en conjuguant capacités en propre et affrétées sur le modèle du fret maritime », avait alors indiqué la direction.

« Nous observons une demande accrue de fret aérien et de logistique de bout en bout, raison pour laquelle il est important pour nous de renforcer notre capacité contrôlée par nos soins et de poursuivre notre stratégie de fret aérien », avait ajouté Torben Bengtsson, responsable mondial du fret aérien et des conteneurs de faible tonnage (LCL).

Chute de la demande

Le premier vol direct entre la Chine et les États-Unis était prévu en décembre après le lancement fin octobre de deux vols hebdomadaires entre Greenville-Spartanburg, en Caroline du Sud, et Incheon, en Corée du Sud, opérés par les trois B767-300F.

Deux nouvelles liaisons ont été lancées en novembre, via Incheon, entre Hangzhou (haut-lieu chinois de la high-tech, à 190 km au sud-ouest de Shanghai) et Chicago Rockford. La fréquence devait être portée à six liaisons par semaine début janvier. Deux autres lignes doivent relier Greenville-Spartanburg, porte d’entrée des bassins de consommation de Charlotte, Atlanta et Dallas, à Shenyang, proches des centres manufacturiers que sont Dalian et Tianjin.

Depuis, la conjoncture a subi un coup d’arrêt. La demande de transport aérien n’échappe pas au ralentissement économique. Selon l’IATA, la demande mondiale, mesurée en tonnes-kilomètres de fret (CKT), avait dévissé de 10,6 % en septembre (dernières données communiquées par rapport à 2021). La capacité de fret aérien, quant à elle, a augmenté de 2,4 %.

Hors Europe, des compagnies maritimes disposent de longue date d’une compagnie aérienne : Evergreen avec EVA Air et la japonaise NYK Line avec Nippon Cargo Airlines.

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