Le rejet des scrubbers se confirme

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Un autre sujet polémique anime les différents sessions de l’OMI. Les scrubbers, notamment à boucle ouverte, font partie de ces thèmes qui s’invitent régulièrement à l’ordre du jour. Selon les dernières données de la Lloyd’s List Intelligence, 2 753 navires, totalisant 328,7 millions de tpl, en sont actuellement équipés.

Ces systèmes (EGCS), qui jouent le rôle de pots catalytiques en agissant notamment sur les dioxydes de soufre (SOx), avaient tout pour convaincre les armateurs conformité sur la teneur en soufre ou sur les émissions de ces carburants?. La solution offre en effet plusieurs avantages. Par rapport à une propulsion au GNL par exemple, l’usage des scrubbers présente un capex bien inférieur, évite l»angoisse concernant la disponibilité du carburant puisqu’il permet de conserver le fuel lourd à 3,5 %, bien moins cher que ses équivalents à basse teneur en soufre. Il offre en outre un retour rapide sur investissement. Le prix à l’unité s’est largement démocratisé en à peine deux ans, passant de 8-10 M€ à 3-8 M€. Et à l’affrètement, l’existence d’un marché à deux vitesses entre les navires équipés ou non de scrubbers devient de plus en plus évident. Un exemple parmi d’autres: un 2 824 EVP équipé a récemment obtenu un contrat d’affrètement de 6 à 8 mois à 13 000 $/j pour un emploi en Asie contre 9 000 $/j pour un navire comparable sans scrubber.

Or voilà, la solution convient pour la réglementation IMO 2020 (désormais passée), mais elle n’a aucune vertu pour traiter le CO2. Et d’autant moins que, équipé de ces systèmes, le navire consomme davantage de carburant donc émet plus de CO2. Pis, quand le scrubber est à circuit ouvert, il rejette des eaux chargées en sulfites dans les mers et océans. La liste des ports les interdisant ne cesse de s’allonger. S’il existe des alternatives – des systèmes à boucle fermée ou hybrides –, ils sont encore peu usités. Les premiers sont complexes à gérer du point de vue opérationnel, reconnaissent les ingénieurs. Les seconds sont en revanche intéressants dans le sens où, le cas échéant, ils permettent la bascule.

Danger pour la chaîne alimentaire

Sur la base de plusieurs rapports, des ONG et organisations internationales ont demandé à l’occasion du sous-comité de la prévention de la pollution de février que soit révisée la directive existante sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et autres métaux lourds, notamment sa définition, sa méthodologie, les limites fixées et son suivi.

À cette occasion, un rapport de 121 pages sur le sujet a été présenté. Il avait été commandé par l’OMI au Gesamp, un acronyme désignant un consortium d’experts issus de différentes organisations internationales émanant de l’ONU (Fao, Unesco, Onudi…). Il indique que les produits chimiques rejetés par les navires équipés de scrubbers peuvent contaminer la chaîne alimentaire humaine. Il soutient également que les données actuellement disponibles ne sont pas suffisantes pour comprendre pleinement les impacts des HAP et autres métaux lourds sur l’environnement marin. Finalement, il conclut que « les polluants présents dans les eaux de lavage rejetées par les scrubbers sont potentiellement préoccupants pour l’environnement dans les zones à fort trafic maritime tels que les détroits, les chenaux et les canaux de navigation mais aussi dans les baies et les ports ».

Un document a également été soumis par plusieurs ONG, dont les Amis de la Terre international, WWF et Pacific Environment. Intitulé « Exhaust gas cleaning system discharges into waters off the west coast of Canada and potential impacts on threatened and endangered marine mammals », il alerte sur la menace que font peser les rejets de scrubbers « chargés en substances cancérigènes (HAP et métaux lourds) pour la faune aquatique, notamment les groupes d’épaulards résidents qui vivent au large des côtes de la Colombie-Britannique, menacés ou en voie d’extinction ». Plus radicale, l’ONG bruxelloise Transport &Environnement estime qu’en l’absence d’une évaluation précise et renseignée sur les conséquences pour la santé humaine et la chaîne alimentaire, « les navires ne devraient pas être autorisés à utiliser les scrubbers ». Il en faudra sans doute davantage pour clore le débat.

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