Il y a encore quelques années, le marché céréalier était qualifié de relativement « prévisible ». Les facteurs climatiques faisaient la pluie et le beau temps, les prix réagissant nerveusement tant que la récolte n’était pas effectuée. Aujourd’hui, on prête volontiers à cette économie, où la concurrence des origines est forte, tous les synonymes de la volatilité: imprévisible (ce qui est valable aujourd’hui risque fort bien d’être bouleversé demain), capricieux (soudaineté et brutalité des variations de prix) et spéculatif (financiarisation accrue).
Toujours extrêmement dépendant du temps qu’il a fait, qu’il fera, qu’il risque de faire, le marché céréalier est de plus en plus influencé par d’autres « agents extérieurs »: la parité des monnaies qui handicape (souvent) les exports, les coûts du transport maritime, lui-même indexé au prix du baril, à la disponibilité des navires ou à l’intensité des échanges de matières premières et les décisions géopolitiques dont peuvent dépendre les politiques d’importation ou d’exportation des pays.
Entre 1976 et 2015, la production de céréales a été multipliée par deux en France, le pays passant du statut d’importateur à celui de deuxième exportateur mondial. Mais, depuis le mauvais printemps 2016, l’épi de blé gaulois est à la peine, rattrapé par la fertilité des terres slaves, Russie en tête.
Sur le marché international des céréales, les rapports de force sont rapidement établis: moins de 10 exportateurs – dont France, Allemagne, Roumanie, Russie, Ukraine et Australie – face à un grand nombre de potentiels acheteurs. « Le Brésil et le Mexique mais aussi l’Asie du Sud-Est asiatique, traditionnellement pas de blé français, mais nous étudions les conditions et les opportunités offertes par ces pays pour nos blés. Grâce aux efforts sur la teneur en protéines, les marchés de l’Arabie saoudite deviennent également accessibles », défend François Gatel, directeur de France Export Céréales. Dans la balance commerciale extérieure des céréales françaises, la France exporte la moitié de ce qu’elle produit, quelle que soit la céréale, blé, orge ou maïs.
Mais le marqueur de référence reste le blé tendre, dominant la production. En 2016-2017, les exportations avaient lourdement chuté, à 11,1 Mt, en baisse de 45 %, de façon plus nette vers les pays tiers, parmi lesquels Algérie, Maroc et Afrique subsaharienne (– 60 %), que vers l’UE (– 22 %).
Cette année, la restauration des volumes n’est pas encore au rendez-vous dans les champs. Mais, a rassuré Philippe Pinta, président de l’Association des producteurs de blé, « les stocks disponibles et la qualité des récoltes devraient permettre de satisfaire l’ensemble de nos clients ». A fortiori, les étrangers d’ailleurs…