Jean-Michel Richard a présenté le 17 septembre, au nom de la commission Transports du Conseil économique, social et environnemental régional d’Ile-de-France (Ceser), un rapport et avis intitulé « Les activités de transport de fret et de logistique en Ile-de-France, un atout pour l’attractivité de la région ». Le document souligne l’importance économique du fret pour l’Ile-de-France et les changements logistiques majeurs que connaît le secteur depuis ces vingt dernières années, principalement en ce qui concerne « le traitement des produits manufacturés dans les grandes conurbations ». Pour relever des défis économiques et environnementaux nouveaux, le secteur a en effet engagé des mutations que le Ceser analyse avec une projection jusqu’en 2025, qui lui permet de proposer une série de préconisations à l’usage des acteurs publics qui définissent la politique générale des transports aux échelles nationale et territoriale.
Un état des lieux
La commission Transports insiste avant tout sur l’importance du fret pour l’attractivité de la région, « première zone logistique d’Europe », importance qui selon le rapport n’est pas suffisamment prise en compte par les élus et la société civile. Acteurs institutionnels et privés doivent donc prendre la mesure des « bouleversements » intervenus dans la logistique urbaine pour le traitement des produits manufacturés, résumés à travers les expressions « pilotage par la demande, diminution de la taille des envois mais augmentation de leur nombre, juste à temps, éloignement des structures d’entreposage des centres de consommation, émergence puis croissance rapide de l’e-commerce et des systèmes de distribution/livraison associés. »
Les freins aux reports modaux
Le report modal de la route vers le ferroviaire et le fluvial est une préoccupation de longue date, mais ce report se trouve toujours freiné par des contraintes logistiques majeures. Pourtant, avec « la spectaculaire augmentation des flux de conteneurs par voie maritime à destination de l’Europe », l’Ile-de-France représentant un marché d’1,3 MEVP, les pré et post-acheminements terrestres ou fluviaux constituent « un enjeu important du report modal souhaité » (actuellement 75 % des produits manufacturés sont transportés par route depuis Le Havre, contre 20 % par voie fluviale et seulement 5 % par fer). Plusieurs raisons bien connues à cela. La problématique du dernier kilomètre par route en zone urbaine, et les coûts afférents engagés par l’aide au coup de pince et la double rupture de charge qui empêchent le plein développement de la technique de « la caisse mobile ». Égalementes des distances de transport insuffisantes, sans parler de la rareté des sillons ferroviaires en Ile-de-France, occupés par le trafic de voyageurs, qui rend difficilement pertinent le concept d’autoroutes ferroviaires. Toutes contraintes logistiques qui font que le mode routier reste le mode le plus compétitif.
Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, s’est interrogé le 29 septembre, lors de la quatrième Conférence pour la relance du fret ferroviaire,sur « la place qu’il convenait de réserver au wagon isolé », en soulignant que « nos voisins européens ont abandonné une technique qui, selon lui, ne répond plus à la massification des flux ». Hors en Ile-de-France, comme le relève le rapport du Ceser au contraire, la tendance pour les produits manufacturés est plutôt à la fragmentation des flux, notamment en raison de l’impact du e-commerce sur la multiplication des livraisons. Dans ce contexte, il paraît en effet souhaitable de s’interroger sur « la place » du wagon isolé, pas seulement en termes de rentabilité ni pour conclure uniquement à son caractère obsolète.
Pour le fluvial, en raison de la forte croissance du transport de conteneurs par voie d’eau, le Ceser estime « justifiée » l’augmentation programmée de la capacité des terminaux fluviaux en Ile-de-France et le développement des infrastructures à vocation multimodale, dans le cadre d’Haropa-Ports de Paris et du projet de Port Seine-Métropole, mais aussi le projet de canal Seine-Nord Europe qui, après avoir obtenu un financement européen en juin à hauteur de 42 %, devrait finalement engager la réalisation de la première tranche des travaux en 2017 (sur la période 2016-2020, Seine-Nord Europe bénéficie d’une subvention de 980 M€ de la Commission européenne).
Les préconisations du Ceser
Les auteurs du rapport rappellent qui si la logistique est bien une activité de marché, les aménagements d’infrastructures relèvent du pouvoir décisionnaire des acteurs publics. Si ces aménagements indispensables pour accroître « l’usage de modes de transport alternatifs plus respectueux de l’environnement » sont effectivement fortement contraints « tant par l’aspect foncier que par les dimensions économique et financière », il s’agit ici de points sur lesquels « la Région est en mesure d’agir ».
La commission Transports recommande donc d’identifier clairement dans les documents d’urbanisme les « sites à construire ou à préserver, réhabiliter », en tenant compte de la qualité environnementale des sites et des raccordements aux réseaux ferroviaires et fluviaux, afin de favoriser le report vers ces deux modes, ce qui constitue précisément sa deuxième préconisation. La troisième préconisation s’inscrit également dans ce souci environnemental puisque le Ceser invite à « prendre des mesures susceptibles d’impacts environnementaux à moyen terme, comme la définition de zones à faibles émissions de polluants ou des chartes de qualité environnementale incitatives ».
L’intégralité du rapport est consultable à l’adresse: