Les prévisions pour le trafic global sont de 23,9 Mt, soit une forte croissance de 43 % par rapport à 2013 et de 3,8 % par rapport à 2012. Ce niveau de trafic correspond à une croissance de 34,7 % du nombre de navires, soit 3 068 unités dont 2 412 au niveau du port de commerce.
Cela s’explique par le niveau du PIB (8 %) annoncé pour l’année 2014, et toutes les actions de développement programmées par l’État de Côte d’Ivoire. C’est-à-dire la reconstruction des infrastructures et la croissance au niveau de la production agricole, l’exploitation des ressources minières, la croissance de la consommation. Toutes choses qui contribueront à atteindre ce niveau de trafic avec la mise en œuvre d’une politique commerciale agressive. Pour atteindre ce défi, le port d’Abidjan doit être compétitif. Et ses dirigeants le savent très bien. C’est pourquoi, en début d’année, son directeur général, Hien Sié, a relevé que la conjugaison de tous les efforts a permis de relancer les activités portuaires qui étaient complètement arrêtées à cause de la crise post-électorale. Entre janvier et mai 2011, le trafic portuaire commercial était en recul de 54 % par rapport à la même période en 2010. « Des actions commerciales agressives ont été menées par les uns et les autres pour amoindrir ce déficit qui, à tous les points de vue, semblait s’installer dans la durée », a-t-il précisé à l’époque. À l’en croire, l’engagement commun a permis de ramener ce recul à 12 % sur la période de juin à décembre 2011, comparativement à la même période en 2010.
Ainsi, le trafic global annuel du port s’établit à 16,6 Mt, soit une baisse de 26 %. D’autre part, la reprise des activités, notamment avec les pays de l’hinterland, va impliquer une croissance du trafic et donc une forte demande en infrastructures économiques, notamment routières et ferroviaires.
Surveiller le plan d’eau ivoirien
Les opérateurs économiques de ces pays de l’hinterland soutiennent cette infrastructure pour faire d’elle un hub portuaire. Pour gagner ce pari, les autorités doivent prendre les mesures idoines pour surveiller le plan d’eau ivoirien. Le port autonome d’Abidjan a été, pendant les années troubles, de moins en moins fréquenté par les opérateurs économiques des pays de l’hinterland, le Burkina Faso, le Mali, etc. Un phénomène déclenché depuis le coup d’état de 1999 et amplifié après la rébellion de 2002. Aujourd’hui encore, les opérateurs économiques de ces États sans littoral continuent de prendre la direction des ports de Lomé au Togo et de Tema au Ghana. Ils semblent s’y habituer, puisque ces deux ports font tout leur possible pour les capter durablement, avec la « complicité » des autorités d’Abidjan, critiquées. Les raisons: les frais imputés aux marchandises sont excessifs. En clair, une marchandise achetée 1 million de francs CFA (FCFA) est évaluée, au débarquement au port d’Abidjan, au double de son prix d’achat par la société Webb Fontaine Group au service de la douane. Et les frais de dédouanement sont calculés sur cette base. En effet, l’État de Côte d’Ivoire a signé deux conventions, le 28 février 2013 avec la société Webb Fontaine Group, l’une portant sur la classification et l’évaluation de la valeur des marchandises importées dont la valeur FOB dépasse 1 MFCFA. La seconde concerne la mise en place d’un guichet unique du commerce extérieur, non encore effectif. Depuis son implantation au port d’Abidjan, les opérateurs économiques ne font qu’indexer Webb Fontaine, accusant les responsables de fausses pratiques. De la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI) à l’Association maritime de Côte d’Ivoire (AMCI), en passant par les chambres de commerce du Burkina Faso et du Mali, etc., tous sont montés au créneau pour dénoncer les mauvaises pratiques, empreintes d’amateurisme, de Webb Fontaine Group, jusqu’à saisir le directeur du port et celui de la douane, mais rien n’est fait. Sans oublier les contentieux sur les coûts qui constituent un casse-tête chinois pour les importateurs à destination du port d’Abidjan. À cela, il faut ajouter les factures de la nouvelle société concessionnaire des opérations de sûreté du port d’Abidjan, Port Sécurité, qui a doublé les coûts des services aux armateurs. Ceux qui payaient 100 MFCFA par an devraient désormais débourser 200 MFCFA. Première conséquence de ces pratiques qui ne respectent aucune norme, la fuite des opérateurs économiques des pays de l’hinterland. Il est évident que le port, qui a manutentionné 22,5 MEVP en 2012, et qui ambitionnait d’atteindre 24 MEVP en 2013, n’a pas pu atteindre cet objectif. Les experts de la communauté portuaire avancent même que le trafic total de l’année 2014 n’excédera pas 26 MEVP. C’est donc pour remédier à toutes ces insuffisances, booster les fréquentations commerciales du port d’Abidjan et faire de lui l’un des importants ports d’Afrique que le ministère ivoirien de l’Économie et des Finances a abrité, en décembre dernier, la cérémonie de signature de convention de concession du deuxième terminal à conteneurs (TC2) du Port autonome d’Abidjan. La signature de cette convention est intervenue entre l’État ivoirien et le consortium adjudicataire de l’appel d’offres international, composé de Bolloré Africa Logistics, d’APMT et de Bouygues, représenté par Dominique Lafont, président de Bolloré Africa Logistics. Les responsables du port ont salué la signature de cette convention qui vient offrir des avantages comparatifs énormes en termes de mise à disposition d’infrastructures modernes et de compétitivité. Le TC2 représente pour l’État de Côte d’Ivoire un gain en droit d’entrée avoisinant 80 MdFCFA en plus d’une redevance annuelle d’environ 14,5 MdFCFA. La construction du terminal à conteneur 2 (TC2) va permettre au port d’Abidjan de se positionner comme un hub sur la façade Atlantique de l’Afrique, à mi-chemin entre les grandes lignes maritime au nord et au sud du continent africain. Le consortium ambitionne d’attirer les plus grandes compagnies maritimes du monde, en provenance d’Asie, jusque-là très peu tournées vers le port d’Abidjan. L’agrandissement du canal de Vridi et la construction du TC2 au port d’Abidjan vont favoriser l’accostage des grands navires affrétés par les armateurs asiatiques. Enfin, il a fait savoir que la réalisation du TC2 entre dans la droite ligne de la politique de création d’emplois du gouvernement avec 4 000 emplois directs et indirects. Daniel Dongo, directeur des affaires commerciales du Port autonome d’Abidjan, a confié que la réalisation d’un second terminal sur le site actuel du port est « un projet ambitieux » qui découle du plan stratégique de relance élaboré à la suite du diagnostic fait de la situation du port d’Abidjan dès la prise de service de l’équipe dirigeante actuelle à partir du mois d’avril 2011. Il a aussi révélé que le futur terminal sera construit sur une superficie de 37,5 ha pour 1 250 mètres linéaires de quai et une profondeur de 18 mètres, permettant l’accueil des navires porte-conteneurs de 8 500 EVP. En phase d’exploitation, a-t-il ajouté, « ce terminal sera équipé de six portiques de quais de type post-panamax et 13 portiques de parc de type RTG; ces équipements permettront de traiter annuellement 1 500 EVP, doublant pratiquement la capacité de traitement sur les deux terminaux à 2 500 EVP ».
Le port demande aux opérateurs de revenir
Prévus pour durer quatre ans et demi, les travaux de construction du TC2 nécessiteront un financement de l’État à hauteur de 380 MdFCFA contre 160 MdFCFA pour les opérateurs privés. À nouveau sécurisé, le port d’Abidjan, qui collectait 90 % des ressources douanières de la Côte d’Ivoire avant la crise, espère un retour rapide du trafic en provenance de l’Afrique de l’Ouest. Le problème pourrait désormais se situer en amont, sur les routes ivoiriennes. Pour se remettre à respirer normalement, le port d’Abidjan, dont se sont détournés les utilisateurs en raison de la crise post-électorale, demande aux opérateurs économiques d’Afrique de l’Ouest de revenir. Le commandant du port, Philippe Abou Yao, est en visite actuellement au Burkina Faso, au Mali et au Niger afin d’exhorter les responsables des chargeurs, des chambres de commerce et les opérateurs économiques à revenir au port d’Abidjan. Les opérateurs économiques ouest-africains ont délaissé le port d’Abidjan pendant la crise post-électorale en Côte d’Ivoire de fin 2010 à avril 2011, après que celui-ci, principal débouché pour les pays continentaux d’Afrique de l’Ouest, a fait l’objet d’un embargo de l’Union européenne. Philippe Abou Yao assure qu’« au niveau de la sécurité, au port d’Abidjan, tout est redevenu normal ». Daniel Dongo a conclu sur le fait que le gouvernement ivoirien a tenu à diminuer les barrages sur les routes et a mis en place une police anti-racket pour rassurer les pays de l’hinterland. Tout cela afin de rendre plus fréquentable le port d’Abidjan.