Le Ghana possède deux ports internationaux, Tema et Takoradi, tous deux gérés par la Ghana Ports and Harbours Authority (GPHA), un établissement créé par une loi de 1986 qui prévoit la planification, la construction, le développement, la gestion, les opérations et le contrôle des ports au Ghana. Cet établissement est dirigé par un directeur général. Chaque port dispose d’un directeur pour gérer les affaires quotidiennes, avec l’espoir qu’une concurrence s’établisse entre les deux pour créer une émulation et de la concurrence.
Ces ports ont évolué du statut de port de services vers une participation privée plus active. Une réforme, au début des années 2000, a eu pour but de passer vers une administration de type de Landlord port. Dans les faits, les autorités portuaires ne se précipitent pas pour poursuivre l’agenda prévu par la loi. Elles sont plutôt enclines à laisser les opérateurs privés participer graduellement dans les opérations tout en conservant une partie des opérations sous leur égide. Dans ce contexte, neuf sociétés privées disposent de licences de manutentionnaires pour opérer sur des terminaux publics avec un système de quota. Cette situation est considérée comme non compétitive et annule les effets de l’intervention du privé dans les opérations portuaires. La plus grande implication du secteur privé s’est réalisée dans le seul terminal dédié aux conteneurs dans le port de Tema. Ce terminal public est géré par Meridian Port Services (MPS). Cette dernière est un consortium entre la GPHA et la Meridian Port Holdings qui est, pour sa part, une entreprise dont le groupe Bolloré et APM Terminals détiennent la majorité.
Le port de Takoradi est le plus ancien des ports ghanéens. Il est situé à 228 km à l’ouest d’Accra, la capitale du pays. Il est aussi à 300 km de son principal concurrent, Abidjan. Il traite 62 % des exportations de matières premières du Ghana et 20 % des importations. Au total, il réalise environ 37 % du trafic maritime du pays. Ce déséquilibre de flux entrés et sorties tient à l’histoire. Il a toujours été considéré comme le port d’exportation du manganèse, de la bauxite et du bois par l’administration coloniale britannique qui a construit le port en 1928. Avec le volume important d’exportations depuis Takoradi, les chargeurs ghanéens ont toujours eu une perception erronée de la situation portuaire ghanéenne, considérant Takoradi pour les exportations et Tema pour les importations.
Pour sa part, le port de Tema a été construit par le premier gouvernement du Ghana, après l’indépendance, quand le besoin d’un port s’est fait sentir au plus proche du site de construction de la centrale hydroélectrique et de l’usine d’aluminium pour les importations de minéraux et de matières premières. Il a aussi servi une économie en pleine croissance quand les industries se sont implantées au gré des volontés d’industrialisation des gouvernements en place. Aujourd’hui, le port de Tema est devenu la porte d’entrée du pays et d’une partie de la région d’Afrique de l’Ouest. Il traite quelque 70 % du trafic maritime du Ghana. Il joue un rôle dans l’économie de pays enclavés de la région comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Il dispose d’un terminal à conteneurs avec des équipements adaptés à sa fonction. Le port souffre de congestion sur deux fronts. Du côté maritime, la file d’attente des navires prouve cette congestion. Du côté terrestre, le manque d’espaces de stockage, le nombre accru de jours pour réceptionner la marchandise et les routes encombrées sont devenus courants. Tout cela est d’abord le fait d’un trafic croissant passant par le port. Des négociations sont en cours vers un projet pour une extension du port.
Le port de Takoradi a longtemps été privilégié, lorsque du pétrole a été découvert dans la région occidentale du Ghana, là où se trouve le port. Certains ont pensé que la découverte de gisements de pétrole serait une opportunité pour le port, mais il a plutôt révélé ses inadaptations en termes de linéaires de quai et de capacité d’entreposage. Les navires travaillant pour les groupes pétroliers « chassent » les trafics traditionnels du port, qui sont sa véritable source financière. Cette situation a obligé l’autorité à réfléchir à une extension.
Concurrence et défis
Les ports du Ghana se battent pour un trafic d’environ 5,5 Mt destinées aux pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest (Mali, Burkina Faso et Niger). Ils sont en concurrence avec Abidjan, Lomé, Dakar, Cotonou, Lagos, Conakry et Nouakchott. Considérant que les ports ghanéens n’ont pas réussi à prendre des parts de marché dans ce trafic réservé aux pays africains francophones, on peut dire que les ports ont su tirer leur épingle du jeu. Même si les trafics de transit dans les ports ghanéens ont baissé globalement, le port de Takoradi a le plus souffert, et ce pour des raisons qui ne tiennent pas à l’autorité portuaire: le temps pour le dédouanement, le coût du transport terrestre comparé à d’autres corridors, le coût exorbitant pour les dépôts de conteneurs (de 2 500 $ pour un EVP à 5 000 $ pour un EQP), des coûts déraisonnables de location des conteneurs, la mise en place d’une taxe par l’Ecowas, le manque d’entreposage, l’extorsion par l’État d’une taxe de 200 $ par lot, le réseau routier mauvais et le manque de coordination entre les différents opérateurs de transit. Tous ces paramètres ont joué en la défaveur des ports ghanéens, avec en plus le barrage de la langue entre les importateurs francophones et les opérateurs portuaires ghanéens anglophones, et des régimes des douanes non intégrés.
Les événements en Côte d’Ivoire ont été bénéfiques pour les ports du Ghana. Des clients sont repartis à Abidjan quand la situation s’est calmée, mais certains ont préféré rester pour la sécurité apportée à leurs marchandises. Une étude menée par les chargeurs ghanéens (Ghana Shipper’s Authority) démontre que la majorité des trafics du Burkina Faso passe par le Ghana, ceux pour le Mali utilisent les installations d’Abidjan et de Dakar quand les trafics vers le Niger sont principalement utilisateurs des installations de Cotonou.
Il n’existe actuellement pas de hub de transbordement en Afrique de l’Ouest. Tous les ports de la région rassemblent leurs forces pour décrocher ce statut. Cela sera-t-il décidé par les actions du port? Un partenariat entre les armateurs et les opérateurs de terminaux deviendra-t-il le facteur déterminant? Ou bien les ports ouest-africains seront-ils tous feederisés depuis un port d’un autre range? La bataille est en cours.