Dans son rapport annuel 2012, le courtier parisien Barry Rogliano et Salles (BRS) pointe du doigt la situation difficile pour les armateurs de vracs secs. « 2010 s’est terminée sur un excédent massif de tonnage et des acteurs se demandant ce qui pourrait bien arrêter la chute des taux. En fait, rien ne pouvait la stopper, sauf à toucher le fond. » La baisse importante des taux de fret dans les vracs secs s’est répercutée sur les résultats financiers des armateurs au travers d’une diminution des revenus d’affrètement. Genco Shipping a vu son chiffre d’affaires perdre 14,4 % à 392,2 M$. Navios Holding annonce des chiffres s’inscrivant dans la même tendance avec une baisse de 6,3 % à 429,5 M$. Pour Paragon Shipping, la chute est encore plus dure avec 28,5 % de diminution à 92 M$. Pour continuer la liste, Star Bulk ne déroge pas à la situation avec une baisse de 13,4 % de son chiffre d’affaires à 105,2 M$. La litanie de ces résultats en rouge des armateurs de vracs secs pourrait s’étendre encore. La baisse généralisée est principalement liée à la baisse des taux de fret du vrac sec partiellement compensée par un nombre de jours opérationnels en augmentation. Les armateurs ont vu les TCE (Time Charter Equivalent) s’effondrer. Genco Shipping annonce une diminution de 55 % de son TCE sur l’année à 17 644 $/jour. Paragon Shipping n’est guère mieux placé avec une diminution de 22 % du TCE à 21 250 $ par jour. Enfin, Navios a limité un peu les dégâts avec une baisse de 9,3 % de son TCE à 23 160 $/jour. Si la baisse du chiffre d’affaires n’est pas en corrélation avec celle des TCE, la raison invoquée par les armateurs tient à l’augmentation du nombre de jours opérationnels des navires en propriété. « Travailler plus pour gagner moins. » Des chiffres qui tirent leur origine d’un marché d’une demande plus aléatoire et d’une surcapacité qui devient chronique. Pour preuve, l’indice du Baltic index montre tout au long de l’année une courbe dont l’augmentation amorcée sur la fin du premier trimestre ne s’est pas confirmée sur le reste de l’année. Un regain s’est montré dès l’automne pour que 2011 se finisse au niveau de la fin de 2010. Une année pour rien, un coup dans l’eau malgré toutes les tentatives des armateurs de se prémunir contre ce marasme. Une courbe qui suit l’évolution de l’économie chinoise et les événements liés aux pays producteurs. Un cyclone en Australie, des pluies diluviennes au Brésil et un gouvernement chinois qui milite pour la maîtrise de son inflation ont eu raison d’un marché des vracs secs en plein marasme. Dans ce contexte morose, certains indicateurs laissent un espoir comme une demande soutenue de charbon de la Chine et de l’Inde qui pourrait continuer à alimenter le marché. Un autre élément aurait pu jouer en faveur d’un retour de flamme du marché des vracs secs. Le ferraillage des navires a quadruplé en 2011 à 22,3 Mtpl détruits. Une bonne nouvelle contrecarrée par les livraisons toujours massive de nouveaux navires sur le marché.
Des espoirs demeurent pour 2012
L’année 2011 se terminant sur une note aussi basse que 2010, des espoirs demeurent pour 2012. En premier lieu, sur les données extraites par Genco Shipping, la demande devrait maintenir sa croissance. La construction en Chine apparaît comme un élément majeur de l’optimisme. L’application dans le monde du vrac sec du « slow steaming », réduction de la vitesse des navires, et le rallongement du parcours entre l’Asie et l’Europe par le Cap de Bonne Espérance ajouteront des miles-tonnes et donc réduiront l’offre. Ensuite, selon les dernières analyses des économistes, la Chine devrait aussi consommer plus de charbon pour son énergie et le Japon revient peu à peu sur le marché pour se reconstruire après le tsunami de mars 2011. Le report de livraisons de navires pourrait encore tirer vers le bas le marché des vracs secs. Peu à peu, avec la crise et une certaine frilosité de certaines banques, des armateurs dont les comptes ont longtemps flirté en zone rouge se retrouvent aujourd’hui dans des situations de faillite, à l’image de Sanko Shipping. Les armateurs profitent de cette période difficile pour consolider leur position et modifier légèrement leur stratégie. Il s’agit désormais d’opérer plus sur le marché spot et de délaisser un peu le long terme tant que les taux ne reviennent pas à un niveau plus près des coûts opérationnels.