Parlant d’une seule voix sur les quais arlésiens, le ministre des transports Jean-Baptiste Djebbari et CMA CGM ont annoncé, le 1 mars 2022, la fin des surcoûts de manutention du fluvial dans les terminaux à conteneurs de Générale de Manutention Portuaire au Havre et à Fos avec effet au 1 avril. Il s’agit de stimuler le recours à ce mode dont les volumes de trafics sont à la peine, notamment sur le bassin Rhône-Saône-Méditerranée (voir encadré plus bas).
Cette mesure destinée à compenser le surcoût du chargement d’un conteneur sur la barge, évalué entre 45 et 50 euros par mouvement, sera assumée par CMA CGM pour les conteneurs que cette compagnie transporte.
L’effort financier devrait rapidement atteindre des sommets au regard des volumes manutentionnés sur PortSynergy. « Cette mesure représente entre 2,5 et 3 millions d’euros par an, a précisé Christine Cabau Woehrel, vice-présidente exécutive de CMA CGM. Nous prenons en charge le surcoût de manutention pour aider le fluvial. C’est notre contribution au développement des modes de transport massifiés. Nous avons aussi lancé fin janvier 2022 une navette ferroviaire, la ligne Fos-Duisbourg et Marseille-Duisbourg ».
Il reste à savoir si MSC, actionnaire de Seayard à Fos, et Marfret, co-gestionnaire de Rouen Conteneur Terminal, s’aligneront sur ces mesures dans les temps à venir.
D’autres mesures
« Une fois de plus, CMA CGM montre l’exemple avec une offre « all inclusive ». C’est une bonne chose que les armateurs développent les connexions avec l’hinterland. Nous espérons que les autres manutentionnaires vont suivre », a commenté Mathieu Gleizes, délégué général de Medlink Ports.
L’association envisage de s’ouvrir aux armateurs et aux collectivités territoriales. Elle prévoit de déployer dans le courant de l’année un éco-calculateur développé par Searoutes, start-up lauréate du Smart Port Challenge 2020 à Marseille.
Cette décision de supprimer les surcoûts de manutention du fluvial (ou THC pour terminal handling charges, selon le vocabulaire des ports du Range nord européen) est complétée notamment d’une autre mesure en faveur des modes massifiés avec un nouveau programme de certificat d’économie d’énergie (CEE) baptisé REMOVE (pour REport MOdal et VErdissement).
Doté d’un budget de 38 millions d’euros de l’Etat, REMOVE va pouvoir servir à financer des opérations de transfert de marchandises de la route vers le fluvial, le ferroviaire ou le cabotage maritime ou des projets de transition énergétique des flottes et moyens de manutention. NPI reviendra dans un prochain article de manière plus détaillée sur ce nouveau programme.
Ces mesures sont saluées par Medlink Ports : elles « vont totalement dans le sens du rapport remis par Cécile Avezard, présidente de l’association » en juillet 2021 au ministre des transports. Ce rapport « visait à mettre en place des dispositifs incitatifs en direction des chargeurs pour l'utilisation des modes massifiés et développer le verdissement de la flotte ainsi que des outils de manutention ».
Relancer le fluvial, notamment sur l’axe Rhône-Saône-Méditerranée
Avec 73 500 EVP en 2021, le transport de conteneurs sur le fleuve Rhône a progressé par rapport à 2020 (et ses 67 104 EVP) mais reste en retrait par rapport à 2019 (et ses 88 582 EVP). Ces trois dernières années sont loin d’un pic enregistré en 2015 avec 103 300 EVP sur le Rhône et que l’on peut comparer, par exemple, aux 216 500 EVP transportés sur le bassin de la Seine, soit plus du double, la même année. Avec la suppression du surcoût de la manutention fluviale, le volume cible de conteneurs transportés sur le Rhône, en se fondant sur la tendance positive enregistrée entre 2013 et 2015 sur ce fleuve, pourrait être de 200 000 EVP en 2025, selon des estimations des opérateurs eux-mêmes. A noter qu’en 2021, ce sont 220 000 EVP qui ont été transportés par le ferroviaire sur l’axe Rhône-Saône-Méditerranée.