Tout salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur, soit 30 jours ouvrables (cinq semaines) par an. Pour l’appréciation du droit au congé, la période de référence à prendre en considération pour l’ensemble du personnel des entreprises de transport routier s’étend du 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année au cours de laquelle doit être pris le congé.
Toutefois, dans les entreprises qui sont tenues de s’affilier à une caisse interprofessionnelle de congés payés, telles que les entreprises de transport routier de fret interurbain (49.41A) ou de proximité (49.41B), la convention collective transport prévoit que ces dates sont avancées du 1er avril au 31 mars. Ainsi, il est important de bien connaître, en fonction de son secteur d’activité, la période de référence pour calculer les congés payés. En tout état de cause, les salariés peuvent immédiatement acquérir et poser des congés payés dès leur embauche, sans attendre la fin de la période de référence.
La détermination des dates de prise du congé principal et de l’ordre des départs en congé constitue l’une des prérogatives de l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.
Préalablement, l’employeur doit informer chaque année les salariés des périodes de prise des congés payés, c’est-à-dire de la période pendant laquelle ils sont dans l’obligation de prendre leur congé principal d’au moins 12 jours ouvrables consécutifs (deux semaines) et de 24 jours ouvrables au maximum (quatre semaines). Concernant la cinquième semaine de congés payés, elle doit obligatoirement être prise en dehors de la période de congé principal, donc, par exemple, en fin ou début d’année.
Cette note d’information doit rappeler la période de prise du congé principal. Légalement, cette période est fixée du 1er mai au 31 octobre. Néanmoins, la convention collective nationale des transports déroge au droit commun en prévoyant des périodes de prise du congé principal spécifiques à certains domaines d’activité et/ou catégories de salariés. Dans le transport de marchandises, cette période s’étale du 1er juin au 31 octobre pour les ouvriers (hors entreprises de déménagement), les convoyeurs de fonds, ainsi que les ingénieurs et cadres de toutes les entreprises de transport. Pour tous les autres salariés, la convention collective fait référence à la période légale du 1er mai au 31 octobre.
Cette information doit être réalisée au moins deux mois avant le début de la période de prise du congé principal susvisé, par affichage d’une note de service communiquée au préalable au CSE, si ce dernier existe (donc selon le cas, avant le 1er janvier, 15 février, 1er mars ou 1er avril).
Au-delà, cette note doit informer les salariés des délais pour présenter leurs desiderata et les informer que, faute de retour, l’employeur fixera les dates de départ en congé en fonction des souhaits réceptionnés et des critères d’ordre posés par le Code du travail (voir encadré).
L’élaboration de cette note de service est la première des étapes permettant à l’employeur de justifier qu’il a accompli les diligences qui lui incombent légalement. Pour information, le non-respect des règles relatives aux congés payés est passible de l’amende liée aux contraventions de 5e classe, pour chaque salarié concerné, soit 7 500 € maximum par salarié, si la personne morale est poursuivie. Sans compter les dommages et intérêts qui pourraient être sollicités par les salariés pour les préjudices subis.
Une fois la note de service affichée, l’employeur doit organiser la prise des congés pour chaque salarié. À cette fin, il doit recueillir leurs desiderata mais, in fine, c’est bien lui qui décide des dates effectives de départ, notamment en fonction des impératifs de service.
Ensuite, il doit communiquer à l’ensemble des salariés l’ordre des départs en congé (c’est-à-dire les dates exactes des congés de chacun), au moins un mois avant le départ en congé. En cas de modification de cet ordre des départs, le délai d’un mois minimum doit également être respecté.
Si le personnel en fait la demande, il doit bénéficier d’au moins 24 jours ouvrables de congé au cours de la période de prise du congé principal susvisée, soit en continu, soit, si les conditions de l’exploitation l’exigent, en deux fractions de 18 et 6 jours.
En revanche, si des salariés ne prennent pas la totalité des 24 jours ouvrables sur la période de prise du congé principal précédemment évoquée (ce qui est tout à fait possible, puisque l’obligation est seulement qu’ils prennent 12 jours ouvrables consécutifs au minimum), cela ouvre droit à des jours de congé supplémentaires (appelés jours de fractionnement). Que le fractionnement résulte de l’initiative de l’employeur ou du salarié, il est attribué deux jours ouvrables de congé supplémentaires lorsque le nombre de jours de congé annuel pris en dehors de la période est au moins égal à six ; et un jour ouvrable de congé supplémentaire lorsque ce même nombre est égal à trois, quatre ou cinq.
La cinquième semaine de congé n’ouvre pas droit à un congé supplémentaire de fractionnement, puisqu’elle doit nécessairement être prise hors période de congé principal.
Oui, l’employeur peut décider de fermer son entreprise pendant quatre semaines au mois d’août, par exemple, et une semaine en fin d’année et donc imposer les dates de prise des congés payés à l’ensemble de son personnel.
Dans cette situation, plus que toute autre, l’employeur doit impérativement procéder à l’information des salariés de la fermeture de l’entreprise dans le cadre de la note de service annuelle relative aux congés payés, sans oublier de consulter le CSE en amont sur le projet de fermeture, s’il existe. En effet, faute d’information, cette fermeture pourrait ne pas être considérée comme une période de prise de congés payés et les salariés pourraient alors solliciter un rappel de salaire correspondant, alors même qu’ils n’ont pas travaillé.
La prise effective des congés payés par les salariés est obligatoire et ne peut être remplacée par le versement par l’employeur d’une indemnité compensatrice correspondante (même si c’est le salarié qui est à l’initiative d’une telle demande). Ce n’est que lorsque le salarié quitte définitivement l’entreprise (rupture du contrat) que l’employeur peut lui payer les jours de congé acquis et non pris. Une exception existe cependant concernant la cinquième semaine de congés payés. Cette dernière peut être affectée sur un compte épargne-temps (lorsqu’il existe) en lieu et place de sa prise effective.
Ainsi, il est important de rappeler que l’employeur doit faire en sorte que les salariés puissent effectivement bénéficier de leur congé annuel et, à défaut, les imposer aux salariés. L’employeur qui ne rappelle pas aux salariés de prendre leurs congés et qui n’oblige pas ces derniers à prendre au moins quatre semaines de congé sur l’année engage sa responsabilité civile et encourt des sanctions pénales, même s’il estime avoir respecté le choix de son salarié. Pour comprendre ce principe, il faut garder en mémoire, que les congés payés sont faits pour se reposer et qu’un conducteur qui ne prend aucun congé constitue un danger pour la circulation routière. À titre d’exemple, en cas d’accident corporel grave, il pourrait être vérifié le respect par l’employeur des règles d’information et de prise effective des congés payés. La responsabilité de ce dernier pourrait être recherchée en cas de manquement.
Si, malgré le refus de l’employeur, le salarié part en congé, la question des sanctions disciplinaires pouvant être prononcées à son égard se pose légitimement. Jusqu’à présent, l’employeur qui n’avait pas respecté les règles d’information en matière de congés payés ne pouvait pas sanctionner un salarié qui partait en congé sans son accord. Autrement dit, les salariés ne pouvaient pas être sanctionnés si l’employeur avait manqué lui-même à ses obligations en la matière. Toutefois, un arrêt récent de la Cour de cassation est venu quelque peu atténuer ce principe. La haute juridiction a validé le licenciement pour cause réelle et sérieuse d’un salarié qui était parti en congé sans prévenir son employeur, et ce, alors même que ce dernier avait été défaillant quant aux diligences qui lui incombaient dans l’organisation des congés payés. Mais cet arrêt relève d’un cas d’espèce spécifique et nous ne pouvons qu’encourager les employeurs à se mettre en conformité en ce qui concerne leurs obligations, afin de conserver leur pouvoir disciplinaire à l’égard des salariés récalcitrants.
Légalement, à ce jour, le salarié continue d’acquérir des congés payés lorsqu’il est absent de l’entreprise et que son contrat de travail est suspendu, mais uniquement au titre des périodes assimilées par la loi à du temps de travail effectif.
Ces périodes sont limitativement énumérées par le Code du travail et, jusqu’à présent, n’y figuraient pas les arrêts de travail d’origine non-professionnelle. Pour les arrêts d’origine professionnelle, la loi prévoyait un maintien de l’acquisition des congés pendant une durée limitée d’un an. Or, depuis le 13 septembre 2023, la Cour de cassation, qui s’est mise en conformité avec le droit européen, estime que les salariés peuvent désormais acquérir des congés payés pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident professionnel ou non professionnel, et ce, sans limitation de durée. Partant de ce postulat, la Cour considère qu’au vu du droit européen, les arrêts maladie constituent des périodes de travail effectif, et ce, au mépris des dispositions légales actuellement applicables et toujours en vigueur à ce jour.
De son côté, le Conseil constitutionnel a récemment considéré que les dispositions du Code du travail prévoyant un régime différent d’acquisition des congés payés selon que l’arrêt de travail a une origine professionnelle ou non étaient conformes à la Constitution. Ainsi, l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie non professionnel n’a pas été admise par cette juridiction.
Néanmoins, le fait que le Conseil constitutionnel ait validé les dispositions actuelles du Code du travail par rapport à la Constitution ne vient nullement contredire le fait que ces dernières sont tout de même contraires au droit européen. En effet, le Conseil constitutionnel ne peut que statuer sur la conformité d’un texte étatique par rapport à la Constitution et ne peut nullement se prononcer sur un conflit entre une norme étatique et le droit européen. Ainsi, cette décision n’a pas réellement d’impact sur ce sujet majeur et ne vient pas remettre en cause les jurisprudences rendues par la Cour de cassation en septembre dernier.
Toujours est-il que ces décisions et l’état de notre droit actuel démontrent l’insécurité juridique pour les entreprises qui se posent naturellement des questions sur la façon de procéder : dois-je régulariser les situations passées ou en cours ? Quel est le délai de prescription d’une demande de congés payés fondée sur une absence maladie ? Y a-t-il une limite au report des congés non pris du fait d’un arrêt maladie ? S’agissant de la prescription, tant la Cour de cassation dans ses arrêts du 13 septembre 2023 que les juridictions d’appel estiment que le point de départ de ce délai doit être fixé à l’expiration de la période déterminée au cours de laquelle le salarié doit prendre ses congés payés, dès lors que l’employeur justifie avoir accompli les diligences nécessaires.
Une juridiction d’appel a récemment ajouté que la prescription de ce droit ne court qu’une fois que l’employeur a mis le salarié en mesure d’exercer ses droits à congés payés. Elle a ainsi fait droit à une demande d’indemnité compensatrice de congés payés formulée au titre des années 2013 à 2016, alors que le salarié avait quitté l’entreprise en 2019.
Seule une intervention législative sur le sujet pourrait clarifier ces questions et mettre fin à tout débat en la matière. Il convient donc désormais au législateur de déterminer si l’acquisition de congés payés durant une absence pour maladie non professionnelle est possible et ainsi se conformer au droit de l’Union européenne.
Comment fixer les dates de départ en congés?
L’employeur fixe les congés en fonction des souhaits réceptionnés et des critères d’ordre posés par le Code du travail. Selon l’article L. 3141-16 du Code du travail :
« À défaut de stipulation dans la convention ou l’accord conclus en application de l’article L. 3141-15, l’employeur définit après avis, le cas échéant, du comité social et économique :
a) la période de prise des congés ;
b) l’ordre des départs, en tenant compte des critères suivants :
– la situation de famille des bénéficiaires, notamment les possibilités de congé, dans le secteur privé ou la fonction publique, du conjoint ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ainsi que la présence au sein du foyer d’un enfant ou d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée en perte d’autonomie ;
– la durée de leurs services chez l’employeur ;
– leur activité chez un ou plusieurs autres employeurs.
Par ailleurs l’employeur ne peut, sauf en cas de circonstances exceptionnelles, modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date de départ prévue. »