La responsabilité civile et pénale du chef d'entreprise

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L'accident au travail n'est plus perçu aujourd'hui comme une fatalité, mais comme un dysfonctionnement de l'entreprise. Les magistrats sanctionnent de plus en plus lourdement les auteurs d'atteintes à la santé des salariés, tant sur le plan civil que pénal.

En matière d'hygiène et de sécurité, le chef d'entreprise est tenu de respecter les règles précises et les principes généraux de prévention contenus dans le Code du travail. En cas d'infraction, le droit privé français distingue deux grandes catégories de responsabilités : civile et pénale.

La responsabilité civile a pour but d'indemniser une victime et donne droit à l'allocation de dommages et intérêts. En matière d'accidents du travail (AT) et de maladies professionnelles (MP), la Caisse régionale d'assurance maladie (Cram) est l'assureur de l'entreprise, en contrepartie du versement de cotisations qui permettent de financer la couverture des dommages. Aussi l'allocation est-elle versée par la Cram.

Une exception à ce principe : les dommages accordés à la victime au titre de la faute inexcusable, par décision de justice, en général le tribunal des affaires sociales et sanitaires (TASS). Lorsque la faute inexcusable est reconnue, l'employeur peut être condamné à verser jusqu'à plusieurs centaines de milliers de francs et les indemnités versées par la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT/MP) de la Sécurité sociale sont majorées. La Cour de cassation a d'ailleurs récemment modifié la définition de la faute inexcusable, pour la rendre plus favorable aux salariés. Il s'agit de tout manquement de la part de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, alors qu'il a ou devrait avoir connaissance du danger auquel est exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Cette nouvelle définition, établie dans une décision rendue le 28 février 2002 dans une affaire relative à l'amiante mais ayant vocation à s'appliquer à l'ensemble des AT/MP, a pour effet de faciliter les condamnations pour faute inexcusable des chefs d'entreprise et celles-ci devraient se multiplier. Mais elle devrait aussi, selon les spécialistes, encourager les pouvoirs publics à réformer enfin le système français de réparation des risques professionnels au titre de l'assurance maladie en le faisant évoluer vers la réparation intégrale. Actuellement, celle-ci n'est que partielle et forfaitaire et c'est pourquoi les victimes d'AT/MP engagent des actions en faute inexcusable. Avec l'instauration de la réparation intégrale, la faute inexcusable devrait disparaître.

Responsabilité pénale

La responsabilité pénale s'appuie sur deux codes : celui du travail et le Code pénal. En cas d'infraction aux règles d'hygiène et de sécurité énoncées dans le premier, le responsable est unique : il s'agit soit du chef d'entreprise, soit du chef d'établissement si l'entreprise possède plusieurs établissements, soit du collaborateur auquel celui-ci a délégué son pouvoir, de manière écrite ou orale. Le juge apprécie et vérifie alors si le délégataire possède bien la compétence, l'autorité et les moyens nécessaires pour être en mesure de piloter l'entreprise en toute sécurité. Dans tous les cas, le responsable identifié encourt une amende maximum de 3811 € par salarié en infraction (sauf cas d'antécédent). En revanche, le Code pénal s'applique à « tous ceux qui par imprudence, négligence, maladresse, inattention, ou inobservation d'une règle de prudence imposée par la loi ou les règlements portent atteinte à la vie ou à l'intégrité physique d'autrui ». Plusieurs personnes peuvent donc être condamnées simultanément, chacune à titre personnel. Contrairement à la responsabilité civile, il n'est pas possible de s'assurer pour garantir sa responsabilité pénale. La personne condamnée devra effectuer elle-même la peine de prison prononcée et payer sur patrimoine personnel l'amende requise. Selon l'infraction, les sanctions pénales maximum sont de un à cinq ans de prison et 1524 à 76 224 €. Si le risque zéro n'existe pas, le juge appréciera en revanche le contexte et les dispositions prises par les responsables : mise à disposition de matériel conforme, formation du personnel, utilisation du pouvoir disciplinaire en cas de manquement aux règles de sécurité par un membre du personnel. Dans tous les cas, il est attendu du chef d'entreprise qu'il fasse respecter les principes généraux de prévention contenus dans le code du travail qui impose d'identifier et, le cas échéant, de supprimer l'ensemble des risques professionnels auxquels les salariés peuvent être exposés.

A retenir

- La responsabilité civile a pour but d'indemniser une victime d'AT/MP et donne droit à l'allocation de dommages et intérêts payée par la Caisse régionale d'assurance maladie, assureur de l'entreprise.

- La reconnaissance de la faute inexcusable a été récemment facilitée par une décision de la Cour de cassation. Elle se traduit pour le dirigeant par de lourdes conséquences pécuniaires.

- L'employeur ou son délégataire de pouvoir dont la responsabilité pénale est engagée au titre du code du travail encourt une amende maximum de 3811 € par salarié en infraction. Il peut également être condamné au titre du code pénal avec des sanctions maxima de un à cinq ans de prison et 1524 à 76224 €.

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